Le principe de concentration des moyens.

Par Elvis Leumega, Sophie Tiemagni Djoufa et Nicaise Nkeumadjeu Tema.

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Explorer : # concentration des moyens # autorité de la chose jugée # procédure civile # célérité de la justice

A la lumière du droit camerounais, l’article suivant consistera à analyser, dans la froideur et l’objectivité juridiques, les différents contours du principe de concentration de moyen qui, bien qu’intéressant aussi les magistrats et la justice – entendue comme mission régalienne de l’Etat – semblent encore plus intéresser les avocats, dont la responsabilité personnelle peut être engagée le cas échéant.

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"Rira bien qui rira le dernier". Mais qui sera le dernier à rire ?

Se prétendant titulaire d’une créance de salaire différée sur la succession de son père pour avoir travaillé sans rémunération au service d’icelui-ci, Gilbert Cesareo a, sur ce fondement, assigné son frère, M. René Cesareo, pris en sa qualité de seul autre cohéritier de leur défunt père, en paiement d’une somme d’argent. Après qu’un jugement eut rejeté cette demande au motif que l’activité professionnelle litigieuse n’avait pas été exercée au sein d’une exploitation agricole, Gilbert Cesareo a de nouveau assigné son frère en paiement de la même somme d’argent sur le fondement de l’enrichissement sans cause. Cette seconde action sera déclarée irrecevable. Non satisfait, sieur Gilbert Cesareo fera grief à l’arrêt [1] d’avoir accueilli la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de chose jugée attachée au jugement rejetant la première demande alors, selon le moyen, « que l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’en cas d’identité de cause, c’est-à-dire si les demandes successives sont fondées sur le même texte ou le même principe ; que la cour d’appel a constaté que la première demande de Gilbert Cesareo avait été fondée sur le salaire différé défini par le Code rural, tandis que la demande dont elle était saisie était fondée sur l’enrichissement sans cause ; qu’en estimant que ces deux demandes avaient une cause identique, la Cour n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 1351 du Code civil (…) ». Sans désarmer, sieur Cesareo se pourvoira en cassation.
Par un arrêt de principe [2], l’Assemblée plénière de ladite Cour, après avoir constaté que, comme la demande originaire, la demande dont elle était saisie, formée entre les mêmes parties, tendait à obtenir paiement d’une somme d’argent à titre de rémunération d’un travail prétendument effectué sans contrepartie financière, indiquera, pour rejeter le pourvoi, que la cour d’appel en a exactement déduit que Gilbert Cesareo ne pouvait être admis à contester l’identité de cause des deux demandes en invoquant un fondement juridique qu’il s’était abstenu de soulever en temps utile, de sorte que la demande se heurtait à la chose précédemment jugée relativement à la même contestation. Elle posait alors ainsi les jalons du principe de la concentration des moyens.
Il faut dire que ce principe, dans sa substance et à l’origine, traduit simplement l’idée selon laquelle il incombe au demandeur de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci, le cas échéant, il ne pourra plus être reçu à en présenter d’autres au cours d’une seconde demande. Chemin faisant, le principe se précisera davantage et on entend dorénavant parler de la concentration de moyens au cours de la même instance et non plus nécessairement lorsqu’il s’agira d’une première demande. Dans cette nouvelle architecture processuelle, les variantes du principe voient le jour. Ainsi l’exigence de la concentration substantielle fait désormais chemin avec celle de la concentration procédurale des moyens : les parties à une instance doivent présenter tous les moyens, principaux et subsidiaires, susceptibles de soutenir une prétention donnée car elles n’auront pas l’occasion d’en présenter d’autres après ou alors lors d’une autre instance. L’une des raisons fondamentales de cette position prétorienne se trouve être la nécessité de célérité de la justice tout en conservant la qualité de celle-ci. En 2008, le Premier Président de la Cour d’Appel de Paris, Monsieur Jean-Claude Magendie, tiendra d’ailleurs un rapport en ce sens au Ministre français, Garde des sceaux [3].
En date du 13 décembre 2011, toujours dans la vue de la célérité et de la qualité de la justice, interviendra à la Cour d’Appel de Paris un protocole entre ladite Cour et les Ordres des Avocats des Barreaux de Paris, du Val-de-Marne, de l’Essonne, de Meaux, de Melun, de Fontainebleau, de Sens, sur la mise en œuvre des principes de concentration et de structuration des écritures.
A en croire les exigences du principe et son renouveau, on est à se demander notamment ce qu’il reste du principe de liberté formelle des écritures judiciaires ? Que vise clairement le principe ? Qu’attend ce principe des acteurs de la justice ? En cas de violation, quelle(s) sanction(s) encourt-on ? Par qui ? Le principe est-il absolu ou admet-il des exceptions ?
A la lumière du droit camerounais, notre prospection consistera à analyser, dans la froideur et l’objectivité juridiques, ces différents contours qui, bien qu’intéressant aussi les magistrats et la justice – entendue comme mission régalienne de l’Etat – semblent encore plus intéresser les Avocats dont la responsabilité personnelle peut être engagée le cas échéant.

Dans une excursion formelle aux parties susceptiblement inégales, une présentation traditionnelle nous permettra d’envisager, en réaction à la problématique posée, les exceptions (II) à la suite de l’énoncé du principe (I).

Vous trouverez l’analyse complète de ce sujet dans le document ci-après  :

Le principe de concentration des moyens.

Elvis Leumega, Consultant et Chercheur en droit
Sophie Tiemagni Djoufa,
Nicaise Nkeumadjeu Tema.

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Notes de l'article:

[1CA Agen, 29 avril 2003.

[2C. cass. Ass. plén. 7 juill. 2006, Cesareo, Bull. civ. n° 8.

[3Voir Mission Magendie II - Célérité et qualité de la justice devant la cour d’appel - Rapport au garde des sceaux - 24 mai 2008.

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