Le nouveau modèle réglementaire de lettre de licenciement pour motif disciplinaire.

Par Laure Virlet, Avocate.

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Explorer : # licenciement disciplinaire # faute professionnelle # procédure de licenciement # modèle de lettre

Comme annoncé en marge des Ordonnances Macron, le Décret n° 2017-1820 du 29 décembre 2017 propose notamment un modèle de lettre de licenciement pour motif disciplinaire.

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Explication et analyse : Le modèle proposé par le décret n’est pas obligatoire et il est tout à fait possible de rédiger la lettre d’une autre manière, pour autant, ce modèle reste un guide utile à la rédaction.

Attention toutefois, un modèle reste un outil qu’il faut utiliser avec précaution en prenant le plus grand soin à l’adapter à la situation : détailler les faits reprochés, respecter le règlement intérieur de l’entreprise, les éventuelles spécificités de la convention collective telles qu’une soumission pour avis à un conseil de discipline, etc.

S’agissant du licenciement disciplinaire, il s’applique lorsque le salarié a commis une faute. Ainsi par exemple, la simple insuffisance professionnelle n’entre pas dans ce cadre puisqu’elle n’est pas fautive : le salarié n’est pas capable de remplir la tâche pour laquelle il a été engagé mais il n’a pas commis de faute en tant que telle.

Un licenciement disciplinaire suppose encore que la faute soit suffisamment importante : il existe une échelle des fautes et une échelle des sanctions.

La première faute est la faute « légère » qui ne justifie pas un licenciement mais éventuellement un rappel à l’ordre ou un avertissement. Le grade supérieur est celui de la faute « simple » ou « sérieuse » qui est suffisante pour justifier une sanction plus lourde comme une mise à pied ou un licenciement. Dans le cas de licenciement pour faute simple, l’indemnité de licenciement est due et le salarié effectue son préavis ou perçoit une indemnité compensatrice de préavis si l’employeur souhaite l’en dispenser.

Si la faute est une faute « grave » en revanche, c’est-à-dire d’une telle importance qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, c’est le licenciement pour faute grave qui est encouru avec pour conséquence de priver le salarié de son indemnité de licenciement et de son préavis.

Enfin, si le salarié s’est rendu coupable d’une faute « lourde » qui suppose d’avoir volontairement cherché à nuire à l’employeur, il encourt un licenciement pour faute lourde qui le prive également de son indemnité de licenciement et de son préavis et autorise l’employeur à se retourner contre le salarié pour lui demander réparation financière du préjudice qu’il a subi.

En vertu du principe non bis in idem, une faute peut faire l’objet d’une seule sanction : ainsi, il est impossible de licencier un salarié uniquement pour une faute qui a déjà été sanctionnée à titre disciplinaire, par exemple par un avertissement ou une mise à pied.

Un dernier point d’attention concerne le délai, puisqu’en matière disciplinaire l’employeur dispose de seulement deux mois pour engager la procédure disciplinaire, c’est-à-dire concrètement, envoyer la lettre de convocation à entretien préalable. Passé ce délai et sauf exceptions, le licenciement n’est plus possible pour cette faute.

Le modèle proposé par le décret est le suivant :
« Dénomination sociale et adresse du siège social de l’entreprise
Lieu et date
Nom, prénom et adresse du salarié

Objet : notification d’un licenciement pour faute (préciser s’il s’agit d’une faute sérieuse, grave ou lourde)

Lettre recommandée avec avis de réception ou lettre remise contre récépissé (en cas de remise en main propre, la lettre doit être établie en double exemplaire et celui de l’employeur doit être accompagné de la mention « reçue le… » avec la signature du salarié ; la lettre ne peut être expédiée ou remise en main propre moins de deux jours ouvrables après l’entretien préalable et au plus tard un mois à compter de l’entretien préalable ou, le cas échéant, à compter de l’avis rendu par une instance disciplinaire).

« Madame, Monsieur…,
Suite à notre entretien qui s’est tenu le … (date à compléter), nous vous informons de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants : … (énoncer les éléments fautifs de façon précise et objective. Ils doivent être matériellement vérifiables, si possible en précisant les dates, les lieux, le contexte plus général de l’attitude fautive du salarié et être imputables personnellement au salarié. S’il est reproché une faute lourde, mentionner l’intention de nuire à l’entreprise).
[Ou]
Si le salarié ne s’est pas présenté à l’entretien préalable, indiquer :
« Nous vous avons convoqué à un entretien préalable en date du … auquel vous ne vous êtes pas présenté. Nous vous informons, par la présente, de notre décision de vous licencier pour les motifs suivants : … » (énoncé des éléments fautifs comme ci-dessus).

Si le salarié est un salarié protégé, ajouter :
« Votre licenciement a fait l’objet d’une autorisation de l’inspecteur du travail (ou du ministre du travail) en date du … » (date à compléter).

Si le salarié est licencié pour faute sérieuse et si vous souhaitez qu’il exécute son préavis :
« Vous restez tenu d’effectuer votre préavis d’une durée de … (durée du préavis à compléter), qui débutera à la date de première présentation de cette lettre. »

Si le salarié est licencié pour faute sérieuse et si vous le dispensez d’effectuer son préavis :
« Nous vous dispensons d’effectuer votre préavis qui débute le … (date présumée de première présentation de cette lettre à compléter) et se termine le … (date à compléter selon la durée du préavis), date à laquelle vous quitterez les effectifs de l’entreprise. Votre salaire continuera de vous être versé durant cette période. »

Si le salarié est licencié pour faute grave ou faute lourde :
« Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l’entreprise est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement. »

Si le salarié est licencié pour faute grave ou lourde et qu’il fait l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire au cours de la procédure de licenciement :
« Vous avez fait par ailleurs l’objet d’une mise à pied à titre conservatoire qui vous a été notifiée le … (préciser la date). Dès lors, la période non travaillée du … (indiquer la date de début de la mise à pied) au … (indiquer la date de la notification du licenciement) ne sera pas rémunérée. »

Pour l’ensemble des cas :
« A l’expiration de votre contrat de travail, nous tiendrons à votre disposition [ou] nous vous remettrons [ou] nous vous adresserons par courrier votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi.

Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d’y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l’initiative d’apporter des précisions à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement. »

Nom, prénom
Qualité
Signature

Remarques :

  • Dans tous les cas, l’appréciation finale de l’existence de la faute et de son degré de gravité revient au juge en cas de contestation,
  • Dans tous les cas également et même en cas de faute grave ou lourde le salarié pourra s’inscrire à Pôle emploi et bénéficier de l’allocation de retour à l’emploi,
  • Il convient par précaution de collecter et conserver les preuve des faits reprochés au salarié pendant toute la durée de la prescription, soit un an à compter de l’envoi de la lettre de licenciement, voire par sécurité pendant deux ans pour les salariés susceptibles de bénéficier de l’aide juridictionnelle puisque la demande d’aide juridictionnelle interrompt le délai de recours et en fait partir un nouveau d’une durée égale à compter de la décision rendue par le bureau d’aide juridictionnelle,
  • Il n’est plus nécessaire de mentionner les droits à la portabilité en matière de frais de santé et de prévoyance dans la lettre de licenciement depuis 2013, une simple mention sur le certificat de travail suffit (cf article L.911-8 du Code de la sécurité sociale),
  • De même pour les retardataires, le DIF n’existant plus, il n’est plus nécessaire de mentionner les droits acquis à ce titre dans la lettre de licenciement,
  • Penser à vérifier l’existence d’une clause de non-concurrence dans le contrat et à l’opportunité de la lever ou d’en demander l’application en respectant les formes prévues par le contrat ou la convention collective (qui prévoient souvent que la clause doit être levée dans la lettre de licenciement).

Laure VIRLET,
Avocate au Barreau de Paris,
www.avocat-virlet.fr

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