5 questions sur la commission de discipline du personnel sédentaire de navigation.

Par Emilien Halard.

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Explorer : # discipline du personnel # licenciement pour faute grave # commission de discipline # convention collective

La convention collective du personnel sédentaire de navigation prévoit le recours à une commission de discipline en cas, notamment, de licenciement pour faute grave.
Voici cinq questions qui se posent au sujet de cette procédure.

-

L’article 3.4.2 de la convention collective du personnel sédentaire de navigation prévoit le recours à une commission de discipline dans les conditions suivantes :

« Lorsque l’employeur envisage de prendre une sanction de rétrogradation ou de licenciement pour faute grave ou lourde, il informe le salarié, dans le courrier de convocation à l’entretien préalable, qu’il pourra demander par écrit contre récépissé, la consultation pour avis d’une commission de discipline, dans un délai de quatre (4) jours ouvrables à compter de la première présentation de la convocation. La commission de discipline devra se réunir avant l’entretien préalable et dans un délai maximum de huit (8) jours ouvrables après la réception de la demande.
La commission de discipline est constituée comme suit :

  • l’employeur ou son représentant, en qualité de Président de la commission ;
  • 1 membre de l’entreprise désigné par la direction en dehors du service de l’intéressé ;
  • 1 ou 2 salariés choisi(s) par le salarié, prioritairement parmi les représentants du personnel : au sein de l’établissement, s’il comporte des institutions de représentation du personnel, à défaut, au sein de l’entreprise.
    La commission est valablement constituée même en l’absence de membres choisis par le salarié dès lors qu’ils ont été valablement convoqués par l’employeur.
    L’employeur informe le salarié par écrit de la date à laquelle la commission se réunira et l’invite à s’y présenter.
    Les membres de la commission sont également convoqués par écrit. La convocation indique les faits reprochés au salarié.
    L’employeur tient à la disposition du salarié convoqué et des membres de la commission l’ensemble des pièces du dossier disponibles au moment de la demande de réunion de la commission de discipline illustrant les faits reprochés.
    La commission de discipline entend le salarié, s’il est présent, avant délibération. Elle rend un avis écrit avant la clôture de la réunion. Cet avis est porté à la connaissance du salarié et des participants
     ».

1. Dans quels cas faut-il convoquer la commission de discipline ?

- La commission de discipline ne doit être convoquée que si le salarié le demande.
Si le salarié ne le demande pas dans le délai requis, la commission n’a pas à être réunie.

- Le salarié n’a la possibilité de demander la convocation de la commission de discipline que si l’employeur envisage à son égard une mesure de rétrogradation ou de licenciement pour faute grave ou lourde.
Les mesures de rétrogradation disciplinaire étant rares, c’est avant tout en cas de licenciement pour faute grave que la commission devra être consultée.
Les licenciements pour faute simple ne nécessitent pas la consultation de la commission.
Par conséquent, un employeur qui voudrait licencier un salarié pour faute sans avoir à saisir la commission peut se contenter de le licencier pour faute simple et devra seulement payer l’indemnité de licenciement et le préavis, que ce préavis soit exécuté ou non.
Quant aux licenciements non disciplinaires (pour motif économique, pour insuffisance professionnelle etc.), ils ne nécessitent pas la consultation de la commission.

2. Combien de membres de la commission sont choisis par le salarié ?

La convention collective indique que la commission comprend « 1 ou 2 salariés choisi(s) par le salarié ».

Mais qui décide de ce nombre de 1 ou 2 membres ?
La présence d’un unique représentant du personnel au sein de l’entreprise viendrait-elle réduire le nombre possible de représentants du salarié dans la commission ?
En l’absence de précisions dans le texte, il convient de comprendre que c’est le salarié lui-même qui décide de nommer 1 ou 2 membres dans cette commission.
En effet, l’employeur pouvant désigner 2 membres de la commission, si l’on réduisait à 1 seul le nombre de membres choisis par le salarié, cela reviendrait à déséquilibrer la composition de la commission au détriment du salarié.

3. Quelle est la conséquence d’un défaut de convocation de la commission ?

Pour les ruptures de contrat survenues avant l’ordonnance Macron de décembre 2017, la jurisprudence distinguait [1] selon que le non-respect d’une procédure disciplinaire prévue par une disposition conventionnelle constituait la violation d’une garantie de fond ou pas.
Si c’est une garantie de fond qui n’avait pas été respectée, alors le licenciement était déclaré dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Depuis cette ordonnance, l’article L1235-2 du Code du travail prévoit que si le licenciement d’un salarié intervient « sans que la procédure conventionnelle ou statutaire de consultation préalable au licenciement ait été respectée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire  ».
Il semble néanmoins envisageable que les juges continuent de déclarer un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse si l’employeur se dispense purement et simplement d’appliquer la procédure de recours à la commission de discipline.

4. Que se passe-t-il si les membres de la commission de discipline ne sont pas d’accord entre eux sur l’avis à donner ?

La convention collective ne donne pas de précisions sur le mode de fonctionnement de la commission.
Il est bien sûr souhaitable que les membres de la commission rendent un avis commun.
Mais, lorsque les différents membres ne sont pas d’accord sur l’avis à donner, cette solution n’est pas possible.
Il ne serait pas non plus possible de soumettre l’avis à un vote majoritaire, car en cas d’égalité des voix, aucun avis ne pourrait être exprimé.
Le plus simple serait de suivre le fonctionnement de la Cour suprême américaine : en l’absence d’unanimité, chaque membre de la commission peut rédiger son avis sur le cas disciplinaire examiné.
Au demeurant, le rôle de la commission ne se cantonne pas à émettre un avis favorable ou défavorable sur la décision envisagée.
Les membres de la commission peuvent mettre en avant le contexte du fait reproché au salarié, le passif disciplinaire du manager, de collaborateurs ou de tiers impliqués dans l’incident, ou tout autre élément pouvant constituer une circonstance aggravante ou atténuante pour le salarié mis en cause.

5. L’employeur peut-il prononcer le licenciement malgré l’avis contraire de la commission ?

La convention collective prévoit que la commission est consultée « pour avis ».
Autrement dit, l’employeur reste libre de prendre une décision contraire à l’avis rendu par la commission.

Quel est alors l’intérêt de cet avis ?
En cas de contestation du licenciement en justice, les juges examineront l’avis rendu par la commission.
Si l’employeur a prononcé un licenciement malgré l’avis défavorable de la commission et en particulier du membre salarié nommé par l’employeur, alors la probabilité de voir ce licenciement reconnu sans cause réelle et sérieuse sera augmentée.
Inversement, si même les membres de la commission nommés par le salarié ont rendu un avis favorable au licenciement, il sera moins probable que les juges invalident le licenciement.
Autre intérêt de cette procédure : l’employeur doit tenir les pièces du dossier à la disposition de la commission, mais aussi du salarié.
A contrario, dans une procédure de licenciement classique, bien que le salarié doive avoir connaissance des motifs du licenciement lors de l’entretien, il n’a pas accès aux pièces du dossier et il ne les découvre souvent qu’après saisine du conseil de prud’hommes.
Le recours à la commission de discipline permet au salarié d’avoir connaissance de ces pièces avant la rupture de son contrat et donc de pouvoir mieux assurer sa défense.

Emilien Halard,
Responsable affaires sociales,
Ancien avocat.

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Notes de l'article:

[1Cass. Soc. 13 septembre 2023, n°21-25.830.

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