Mis à pied à titre conservatoire pour avoir insulté son entraîneur et tenu des propos déplacés à l’encontre des cadres du vestiaire du Paris-Saint-Germain, Serge Aurier a d’abord été écarté du groupe retenu pour le match contre Chelsea, puis mis à pied à titre conservatoire dans l’attente d’une décision prise par la direction.
Pour rappel, le droit du travail offre à l’employeur plusieurs types de sanctions disciplinaires à l’encontre des salariés. Il faut distinguer la mise à pied à titre disciplinaire de la mise à pied à titre conservatoire. La première est une véritable sanction à l’encontre du salarié. Elle nécessite donc le respect d’une procédure caractérisée par une convocation à un entretien qui permettra aux deux parties de s’expliquer. Elle est une sanction autonome et les faits déjà sanctionnés ne pourront servir de fondement à un licenciement.
La mise à pied à titre conservatoire a pour effet d’empêcher le salarié de se rendre sur son lieu de travail. En d’autres termes, la mise à pied à titre conservatoire est un outil à disposition de l’employeur qui considère que les faits reprochés à son salarié sont suffisamment graves pour l’empêcher d’exercer son activité. La mise à pied à titre conservatoire a pour suite logique le licenciement pour faute grave, mais la Cour de cassation considère de manière constante que l’issue peut être différente.
Dans le cas Aurier, il est intéressant de s’interroger sur l’utilisation de cette sanction. Non sélectionné pour le match de Ligue des Champions joué dans la semaine par le club, le joueur est déjà sanctionné tant cette rencontre est attendue par l’équipe. Pour autant, il parait assez évident que le joueur représente potentiellement une « nuisance » pour le groupe à deux jours d’un match comme celui-ci. La justification de la mise à pied à titre conservatoire semble donc reposer sur la nécessité de préserver et protéger un groupe.
Plus encore, il est indéniable que Serge Aurier a porté atteinte à l’image du club. Il a sans doute également violé à nouveau [1] certaines clauses de son contrat de travail lui imposant une certaine discrétion en matière de communication.
Les conséquences de cette affaire vont être de plusieurs ordres.
D’une part, la mise à pied à titre conservatoire pourrait se transformer en une rupture du contrat à durée déterminée pour faute grave et le joueur pourrait quitter le club.
D’autre part, si le PSG se refuse à prendre ce risque sportif, il pourra décider de transformer la mise à pied à titre conservatoire en mise à pied à titre disciplinaire comme le permet la jurisprudence actuelle [2] .
Dans tous les cas, il faudra être attentif à l’éventuel prononcé d’une sanction pécuniaire à l’encontre du joueur. En effet, l’article L.1331-2 du Code du travail sacralise le principe de l’interdiction des sanctions pécuniaires à l’encontre des salariés [3]. Déjà, les premières rumeurs évoquaient une amende de 160 000 euros à l’encontre du joueur. Il faudra analyser le fondement de cette sanction qui, de prime abord, s’avère contraire aux dispositions du Code du travail et même à la Charte du Football Professionnel.
Enfin, « l’affaire Aurier » rappelle qu’il serait peut être utile que les clubs ou la Ligue elle-même mettent en place des chartes ou des règlements relatifs à l’utilisation des réseaux sociaux par les sportifs. Le cas du joueur de basket de Rouen sanctionné par son club pour un retweet, bien qu’invalidé par le conseil de prud’hommes [4], a démontré que le monde du sport avait tout intérêt à s’organiser très rapidement sur cette question.