Industriel japonais et important collectionneur d’art, Kōjirō Matsukata est né le 17 janvier 1866. Fils d’un ancien Premier ministre du Japon, il est formé à la culture occidentale à l’issue de ses études aux États-Unis d’où il sort diplômé de l’université de Yale. À l’occasion de deux longs séjours en Europe, à Londres et à Paris entre 1916 et 1922, il se constitue une imposante collection d’art moderne de plusieurs milliers de toiles, allant de Claude Monet à Pablo Picasso, de Paul Gauguin à Gustave Courbet, en passant notamment par Vincent Van Gogh, Paul Cézanne, Paul-Auguste Renoir ou encore Kees Van Dongen.
Doté d’un goût très sûr, Kōjirō Matsukata acquiert au début des années 1920 « La Chambre à Arles » chez le célèbre marchand parisien Paul Rosenberg, sur les conseils de Yukiō Yashirō, historien de l’art à qui il a confié la mission de l’assister dans la constitution de sa collection.
Sur le thème de sa chambre, Van Gogh réalise trois toiles quasi identiques. La première, exposée au musée Van Gogh d’Amsterdam a été peinte en octobre 1888 et abimée lors d’une inondation durant l’hospitalisation du peintre dans la ville d’Arles. L’année suivante, ce dernier en fait deux copies : la première copie, de mêmes dimensions, est conservée aujourd’hui à l’Art Institute de Chicago ; la seconde copie, celle acquise par Matsukata, est de taille plus réduite. Il s’agit d’une huile sur toile de 57,3 cm sur 73,5 cm.
Kōjirō Matsukata a pour projet de créer au Japon un musée rassemblant les œuvres des plus grands maîtres occidentaux. Mais le rapatriement des œuvres vers l’empire du soleil levant se heurte à la législation fiscale nipponne qui applique des droits de douane de 100%. Face à cette taxation, il décide alors de stocker une partie de son immense collection à Londres, au garde-meuble « Pantechnicon », et à Paris, où son ami Léonce Bénédite accepte de remiser temporairement les œuvres dans les caves du musée Rodin.
Kōjirō Matsukata va jouer de malchance. Le 9 octobre 1939, un violent incendie éclate dans le garde-meuble londonien et la quasi-totalité de la collection est détruite par les flammes [1].
C’est son homme de confiance, Kōsaburō Hiōki, qui veille sur le reste des œuvres entreposées à Paris.
En 1940, Hiōki décide de mettre la majeure partie de la collection parisienne à l’abri de la menace allemande. Il transporte les 336 tableaux dans la propriété que possède sa compagne à Abondant dans le département d’Eure-et-Loir. Les sculptures au nombre de 58, plus difficiles à transporter restent au musée Rodin.
Une saisie conservatoire sans fondement juridique.
Mais à la fin de la guerre, le sort semble s’acharner sur la collection puisqu’une ordonnance du gouvernement provisoire de la République française datée du 5 octobre 1944 place les « biens ennemis » sous séquestre, le Japon étant membre du pacte tripartite Rome-Berlin-Tokyo opposé aux Alliés [2] Il s’agit, à ce stade, d’une mesure purement conservatoire. La direction des domaines prend en charge les œuvres séquestrées et, en septembre 1945, donne son accord pour transférer dans les réserves du musée d’Art moderne les quelque vingt-cinq caisses plombées de tableaux. L’inventaire établi à cette occasion, mentionne plusieurs centaines d’œuvres comportant, des peintures sur toile, des aquarelles, des dessins, des livres, des gravures et des bronzes. Bernard Dorival, conservateur du musée d’Art moderne, rédige en septembre 1948 la note suivante destinée à Alain Poher, secrétaire d’État au budget [3].
« Note sur la collection Matsukata :
Par suite de la guerre entre la France et le Japon, séquestre a été mis sur la collection de M. Matsukata, sujet japonais, vivant au Japon depuis 1925 et qui avait laissé en France, aux soins de son mandataire et compatriote, M.Hiōki, la collection d’œuvres d’art qu’il avait réunie. Cette collection, une des plus belles de France, est à peu près unique au monde. Signalons parmi les quelque onze cents ouvrages qui la composent :
une cinquantaine de sculptures de Rodin, tant en bronze qu’en marbre, qui constituent un ensemble sans rival dans l’univers, si ce n’est le Musée Rodin
une dizaine de sculptures de Bourpelle
huit tableaux de Courbet, dont les fameux « Paysans de Flagey revenant de la Foire »
la toile célèbre de Billet, « Daphnis et Chloé »
une des plus belles peintures de Manet, « La Serveuse de bocks »
un ensemble important de vingt-cinq tableaux de Claude Monet
trois œuvres peintes par Pissaro
l’illustre « Portrait de Berthe la Sourde » par Toulouse-Lautrec
le chef-d’œuvre de Renoir, « Les Parisiennes costumées en Algériennes » ainsi qu’un portrait et un paysage du même artiste
six aquarelles de Cézanne
une collection unique de huit toiles de Gauguin, dont le prestigieux « Vairumati »
une des pièces capitales de Van Gogh, « La Chambre de l’artiste à Arles »
un important ensemble de tableaux de Maurice Denis
un important ensemble de tableaux de Marquet
trois ouvrages de Picasso, dont la « Grande liseuse en gris »
deux peintures de Soutine
sans compter des dessins de Delacroix, Puvis de Chavannes, Rodin, des tableaux de Bonvin, Lépine, etc.
L’acquisition de cette collection par les Musées Nationaux représente pour eux leur dernière chance de combler des lacunes qui ne pourront plus jamais l’être. Quand on connaît leur pauvreté en chefs-d’œuvre de Renoir, Toulouse Lautrec, Gauguin, Van Gogh, on mesure l’importance qu’ils peuvent attacher à l’entrée de cette collection dans les fonds artistiques nationaux. Cette entrée devrait se faire en deux temps
1) confiscation de la collection à titre de réparation des dommages de guerre causés par le Japon ;
2) attribution de la collection ainsi confisquée aux Musées Nationaux. Il serait indispensable à ce propos que l’Administration des Domaines ne la mît pas en vente, les prix qu’atteindraient ses pièces maîtresses dans une vente publique ne permettant pas d’espérer que les Musées Nationaux les pussent acquérir ».
La collection Matsukata, mise sous séquestre, est utilisée pour contribuer au rayonnement culturel de la France à l’étranger. Des expositions itinérantes sont organisées à Bruxelles, Stuttgart, Vienne, Londres, Bâle, Copenhague, Amsterdam, Zurich, Rome, Florence, Moscou, Varsovie, mais également à New York et San Francisco.
Kōjirō Matsukata décède le 24 juin 1950 à l’âge de 84 ans.
Son fils, Kōsuke Matsukata et son gendre, Shigeharu Matsumotō, sont désormais en charge de la collection.
Georges Salles, directeur des Musées de France et également directeur du Musée du Louvre, demande à Jacques Chazelle, secrétaire de la Mission française au Japon, de prendre attache avec les héritiers de Matsukata afin de trouver un terrain d’entente pour que la France puisse conserver certaines des œuvres placées sous séquestre. En effet, les autorités françaises sont bien conscientes que la saisie conservatoire de la collection effectuée à la Libération repose sur un fondement juridique incertain et discutable. L’article 2 de l’ordonnance du 5 octobre 1944 prise par le général de Gaulle considère que « sont réputés ennemis pour l’application de la présente ordonnance tout ressortissants d’États ennemis, quel que soit le lieu de leur domicile ou de leur résidence habituelle. Seront considérés comme ennemis aux fins de la présente ordonnance l’Allemagne, la Bulgarie, la Finlande, la Hongrie, l’Italie, le Japon, la Roumanie et la Thaïlande ».
Cependant, pour que le Japon ait pu légalement être considéré comme un « ennemi » (et donc que les biens de la collection Matsukata aient pu être légalement séquestrés) encore eût-il fallu que la France ait été en état de guerre avec le Japon.
Or, depuis la Révolution française, il y a un principe intangible selon lequel seul le Parlement peut autoriser la déclaration de guerre.
Par ailleurs, l’article 1er de la IIIe convention de La Haye du 18 octobre 1907 relative à l’ouverture des hostilités stipule que les « puissances contractantes reconnaissent que les hostilités entre elles ne doivent pas commencer sans un avertissement préalable et non équivoque, qui aura, soit la forme d’une déclaration de guerre motivée, soit celle d’un ultimatum avec déclaration de guerre conditionnelle ».
Cette formalité substantielle a bien été respectée par la France et l’Angleterre en septembre 1939 dans l’état de guerre faisant suite à l’ultimatum adressé à l’Allemagne d’avoir à stopper l’invasion de la Pologne. Mais s’agissant du Japon, la France n’a jamais procédé formellement à une déclaration de guerre ou à un ultimatum avec déclaration de guerre conditionnelle. Et ce d’autant plus que durant la période du gouvernement de Vichy, la France était neutre vis-à-vis du Japon, allié de l’Allemagne et de l’Italie.
À la suite de l’appel du 18 juin 1940, alors que se met en place le régime de l’État français, le général de Gaulle, en installant à Londres la France libre, entame un périple qui le ramènera à Paris, quatre ans plus tard comme chef du Gouvernement de la République. On note cinq étapes :
28 juin 1940, Londres, le gouvernement britannique reconnaît le général de Gaulle comme chef des Français libres ;
27 octobre 1940, Brazzaville, création du Conseil de défense de l’Empire ;
24 septembre 1941, Londres, création du Comité national français ;
3 juin 1943, Alger, création du Comité Français de la Libération nationale ;
3 juin 1944, Alger, création du Gouvernement provisoire de la République française.
Lorsque le Japon a attaqué la base de Pearl-Harbour le 7 décembre 1941, le général de Gaulle, chef de la France Libre, a procédé à un simple communiqué reproduit ci-après daté du lendemain 8 décembre 1941 [4] et publié dans les « Documents du Service d’Information de la France Libre » :
« La France Libre déclare la guerre au Japon
Le Comité National Français s’est réuni, le 8 décembre, sous la Présidence du Général de Gaulle. II a décidé que l’état de guerre existait entre tous les territoires et toutes les forces terrestres, maritimes et aériennes françaises et le Japon.
Le Contre-Amiral Thierry d’Argenlieu, Commissaire National délégué dans le Pacifique qui a été récemment investi de la double mission d’assurer la défense de tous les territoires relevant de l’autorité du Comité National dans le Pacifique : Nouvelle-Calédonie, Tahiti, Établissements Français de l’Océanie, Condominium des Nouvelles-Hébrides, et de représenter la France en Extrême-Orient, a reçu pour instructions de concourir à l’effort interallié par tous les moyens dont il dispose et de se tenir, à cet effet, en liaison étroite avec les Autorités de la Grande-Bretagne et de ses Dominions, des États-Unis, et des Indes Néerlandaises.
Le Comité National fait appel, d’autre part, à toute la population civile et militaire de l’Indochine et l’invite à résister par tous les moyens en son pouvoir à l’agression japonaise. Le Comité National, en prenant ces décisions, est certain d’agir au nom de la France tout entière ».
Durant la période du Comité national français, la France Libre s’était dotée d’un Journal officiel dans lequel elle publiait régulièrement les actes et décisions pris.
Or, la déclaration de guerre au Japon prise par le Comité national français n’a jamais été publiée au Journal officiel de la France Libre ni même notifiée aux autorités japonaises. Il s’ensuit que le communiqué susvisé du 8 décembre 1941 n’a aucun caractère légal.
De plus, l’article 6 de l’ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental dispose que [5] :
« Les textes publiés au Journal officiel de la France libre, au Journal officiel de la France combattante, au Journal officiel du commandement en chef français civil et militaire depuis le 18 mars 1943, enfin au Journal officiel de la République française entre le 10 juin 1943 et la date de la promulgation de la présente ordonnance ne seront applicables sur le territoire continental de la France qu’à partir de la date qui sera expressément fixée pour chacun d’eux ».
Le communiqué de déclaration de guerre au Japon du 8 décembre 1941 n’ayant pas été publié au Journal officiel de la France Libre, il n’a pas pu, bien évidemment, faire l’objet d’une date effective d’application au sens de l’article 6 de l’ordonnance du 9 août 1944 susvisée.
Dès lors, l’ordonnance du 5 octobre 1944 en tant qu’elle prévoit la mise sous séquestre des biens appartenant aux citoyens Japonais comme ressortissants d’une « puissance ennemie » manque de base légale dans la mesure où ni le régime de Vichy du maréchal Pétain ni la France Libre du Général de Gaulle n’ont jamais procédé à une déclaration de guerre valide en droit international.
À la date du 5 octobre 1944, le Japon n’était donc pas en état de guerre avec la France. Ses ressortissants n’appartenaient pas à une « puissance ennemie ».
Quand le régime de Vichy s’effondra, le Gouvernement provisoire de la République française demanda à l’amiral Decoux, gouverneur général d’Indochine nommé par le maréchal Pétain, de ne pas se démettre de son poste et de continuer à « collaborer » avec les Japonais qui occupaient le territoire [6]. Mais au moment de la chute de Manille (5 mars 1945), le gouvernement de Tokyo mit fin unilatéralement à cette collaboration jusque-là pacifique. Ne pouvant plus tolérer la présence, au milieu de leur dispositif, d’une force étrangère qui menaçait de devenir hostile, les Japonais sommèrent, le 9 mars 1945, l’amiral Decoux à Saigon et le général Aymé à Hanoï de se soumettre à eux et de placer les forces françaises sous leur contrôle, en attendant qu’elles fussent désarmées. Le gouverneur général et le commandant supérieur français ayant refusé d’obtempérer à la sommation, l’armée japonaise passa à l’attaque des garnisons françaises.
L’agression japonaise du 9 mars 1945 eut pour résultat de conférer à la France, et à partir de cette date-là seulement, la qualité indiscutable de belligérante dans la guerre du Pacifique. Cette analyse est confirmée en ces termes par le général de Gaulle lui-même dans son troisième volume des « Mémoires de Guerre » [7] :
« J’envisageais volontiers qu’on en vint aux mains en Indochine... connaissant la malveillance des alliés, surtout des Américains, à l’égard de notre position en Extrême-Orient, je tenais pour essentiel que le conflit ne s’y achevât pas sans que nous fussions, là aussi, devenus des belligérants ».
Si La France était « devenue » belligérante du fait de cette agression, cela signifiait bien qu’elle ne l’était pas auparavant, la simple déclaration d’intention non officialisée du 8 décembre 1941 du Comité national français étant à cet égard bien évidemment insuffisante pour caractériser l’état de guerre effectif entre la France et le Japon, ce que le Général de Gaulle admet implicitement.
Dans ces conditions, la mise sous séquestre de la collection Matsukata est entachée, pour cette première raison, d’irrégularité manifeste.
Un traité de paix inapplicable à la collection Matsukata.
Du fait de ce fondement juridique fragile, les autorités françaises n’auront de cesse d’obtenir une transaction amiable afin de conserver la collection. La France est bien consciente qu’il est urgent d’agir avant que le traité de paix avec le Japon, en cours de négociation et impliquant tous les belligérants dont les États-Unis, ne soit signé. En effet, le traité de paix, dont le gouvernement français ne connaît pas encore le contenu, pourrait être favorable au Japon. La France redoute d’être obligée de rendre la collection à la famille Matsukata. La collection étant considérée comme un bien privé, les autorités françaises pensent qu’il existe un risque sérieux d’obligation d’avoir à la restituer aux légitimes propriétaires.
Georges Salles organise une réunion le 24 juillet 1950 à laquelle participent les représentants des Domaines et les représentants des ministères des Affaires culturelles et des Affaires étrangères. Le compte-rendu de cette réunion conclut à la nécessité d’aboutir à un accord amiable avec la famille Matsukata. Si les héritiers « font don aux musées nationaux de quinze à vingt pièces essentielles », la France lèvera son séquestre et permettra la sortie du territoire « pour le reste de la collection qui constituerait au Japon le musée d’art français contemporain souhaité par Kojiro Matsukata » [8].
Shigeharu Matsumotō, gendre de Matsukata et principal interlocuteur des négociations avec les autorités françaises, n’est pas favorable à cette proposition et entend récupérer la totalité de la collection. Il est hors de question pour lui de consentir à un quelconque accord amiable. Mais le gouvernement japonais est également partie prenante du dossier. Le Japon veut à tout prix reprendre une place importante dans le concert des nations. Dans le domaine politique, il veut être admis aux Nations Unies et, sur le plan économique, il souhaite rejoindre le GATT comme partenaire à part entière. Les autorités japonaises sont donc pour un accord amiable, contrairement à la famille Matsukata.
C’est dans ce contexte que le traité de paix de San Francisco [9] est signé le 8 septembre 1951. La France a lourdement pesé dans les négociations. L’article 14.2.1 du traité dispose que :
« Chacune des Puissances Alliées aura le droit de saisir, conserver, liquider ou utiliser de toute autre façon tous biens, droits et intérêts
(a) du Japon et des ressortissants japonais
(b) des personnes agissant aux lieu et place ou pour le compte du Japon
ou de ressortissants japonais, et
(c) d’organismes appartenant au Japon ou à ses ressortissants ou con trôlés par eux,
qui, lors de l’entrée en vigueur initiale du présent Traité, se trouvaient sous la juridiction de ladite Puissance Alliée. Les biens, droits et intérêts mentionnés dans le présent sous-paragraphe comprendront les biens, droits et intérêts actuellement bloqués par les autorités des Puissances Alliées chargées de la gestion des biens ennemis, ou dévolus auxdites autorités, ou se trouvant en leur possession ou sous leur contrôle, et qui appartenaient à l’une des personnes physiques ou à l’un des organismes mentionnés en (a), (b) ou (c) ci-dessus, ou étaient détenus ou administrés pour leur compte à l’époque où lesdits avoirs sont tombés sous le contrôle desdites autorités.
Le droit prévu au sous-paragraphe (I) ci-dessus de saisir, conserver et liquider ces biens, ou d’en disposer de toute autre manière, devra être exercé conformément à la législation de la Puissance Alliée intéressée, et leur propriétaire n’aura que les droits accordés par la législation en question ».
Désormais, le gouvernement français dispose d’une base juridique pour conserver la collection en s’appuyant sur les dispositions de l’article 14.2.1 du traité de paix de San Francisco.
Sauf que le traité ne concerne que les « biens ennemis » et que le Japon n’a jamais été officiellement en état de guerre avec la France, l’ordonnance précitée du 5 octobre 1944 signée par le général de Gaulle se contentant, de manière juridiquement fort discutable, de « réputer ennemi » le Japon dans des conditions très hasardeuses.
Dans les négociations tant avec la famille Matsukata qu’avec le gouvernement japonais, le gouvernement français ne manquera toutefois pas de mettre en avant les dispositions du traité de San Francisco pour affirmer que la France pourrait parfaitement conserver toute la collection.
Une donation partielle basée sur une procédure législative irrégulière.
Forte de sa position (mais conscience de sa faiblesse sur le plan juridique), la France va néanmoins proposer de conserver une vingtaine d’œuvres (les plus importantes) et de « faire don » du reste de la collection au Japon, à la condition que ces œuvres soient exposées dans un musée spécialement construit à cet effet. Il est cependant convenu que le « don » du reste de la collection sera fait exclusivement à l’État japonais et que la famille Matsukata doit renoncer à tous ses droits.
Cette proposition sera finalement acceptée, à contrecœur, par la partie japonaise. Les plans d’un « Musée d’art Occidental, collection Matsukata d’art français » à Tokyo vont être confiés à l’architecte franco-suisse Le Corbusier, flanqué de trois architectes japonais, Sakakura Junzō, Maekawa et Yōshizaka Takamasa.
Les autorités françaises mettent en route la procédure législative pour effectuer le « don ». En effet, le principe d’inaliénabilité des collections publiques implique nécessairement qu’une loi soit votée pour valider l’opération. Le 7 mars 1958, un projet de loi est voté par l’Assemblée nationale. Le dossier est ensuite transmis au Sénat. Mais à la suite de la crise algérienne, le président de la République, René Coty, fait appel au général de Gaulle et lui confie la charge d’un nouveau gouvernement. Une nouvelle Constitution est élaborée. Le projet de loi devant le Sénat se trouve suspendu. Le 3 juin 1958, une loi dite « des pleins pouvoirs » est votée. Cette loi dispose que « pendant une durée de six mois à dater de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement de la République investi le 1ᵉʳ juin 1958 prendra par décrets, dénommés ordonnances, les dispositions jugées nécessaires au redressement de la nation, qui pourront notamment abroger, modifier ou remplacer les dispositions législatives en vigueur. Ces décrets ne pourront porter ni sur les matières réservées à la loi par la tradition constitutionnelle républicaine résultant notamment du préambule de la Constitution de 1946 et de la Déclaration des droits de l’homme de 1789, ni sur l’exercice des libertés publiques et syndicales, ni sur la qualification des crimes et des délits, la détermination des peines qui leur sont applicables, la procédure criminelle, ni sur l’aménagement des garanties fondamentales accordées aux citoyens, ni sur la législation électorale. Ils seront pris en conseil des ministres, après avis du Conseil d’État » [10].
Par ailleurs l’article 92 de la nouvelle Constitution dispose que « les mesures législatives nécessaires à la mise en place des institutions et, jusqu’à cette mise en place, au fonctionnement des pouvoirs publics seront prises en conseil des ministres, après avis du Conseil d’État, par ordonnance ayant force de loi. Pendant le délai prévu à l’alinéa 1ᵉʳ de l’article 91 (4 mois), le Gouvernement est autorisé à fixer par ordonnances ayant force de loi et prises en la même forme le régime électoral des assemblées prévues par la Constitution. Pendant le même délai et dans les mêmes conditions, le Gouvernement pourra également prendre en toutes matières les mesures qu’il jugera nécessaires à la vie de la nation, à la protection des citoyens ou à la sauvegarde des libertés ».
Se fondant, de manière extrêmement discutable en droit, sur le seul article 92 précité de la Constitution, le Gouvernement qui veut aller vite et qui ne souhaite pas que ce dossier passe par la procédure législative classique, va prendre une ordonnance datée du 17 décembre 1958 autorisant le transfert à l’État japonais de la majeure partie de la Collection Matsukata, sauf dix-huit œuvres qu’il entend conserver par devers lui [11].
Or, cette ordonnance ne rentre absolument pas dans le champ d’application limitatif prévu par l’article 92 de la Constitution.
On voit mal en effet en quoi le transfert à l’État japonais de la collection Matsukata relèverait, de près ou de loin, de « mesures législatives nécessaires à la mise en place des institutions ».
Surabondamment, il sera observé qu’un tel transfert ne rentre pas plus dans le champ d’application, lui aussi limitatif, de la loi des pleins pouvoirs du 3 juin 1958, laquelle n’est d’ailleurs pas visée par l’ordonnance du 17 décembre 1958.
En effet, le transfert en question n’est manifestement pas « nécessaire au redressement de la nation ».
En réalité, le Gouvernement français a délibérément escamoté la procédure législative normale passant par le Parlement pour accélérer illégalement un transfert dérogatoire de droit commun qui élude la loi au profit d’une ordonnance totalement arbitraire et dénuée du moindre fondement juridique.
Nous sommes en présence d’une seconde irrégularité manifeste.
Les œuvres conservées par la France.
L’ordonnance vise et renvoie à plusieurs échanges de lettres ayant eu lieu entre les autorités françaises et les autorités japonaises.
Il s’agit en premier lieu, d’une lettre du ministre des Affaires étrangères japonais (le Gaimusho) datée du 4 octobre 1955 adressée à l’ambassadeur de France au Japon aux termes de laquelle [12] :
« 1) Le Gouvernement japonais confirme sa décision de construire un musée nouveau sur l’ancien terrain du temple Ryōun-in dans le parc d’Uenō à Tokyo, en vue d’abriter et présenter les œuvres d’art collectionnées par feu M. Matsukata. Le Gouvernement japonais a déjà commencé les travaux préliminaires relatifs à la construction de ce musée ;
2) Il a l’intention de donner à ce musée le nom de « Musée national d’art occidental », et en sous-titre « Collection Matsukata d’art français » ;
3) Le Gouvernement japonais confirme que le don de la collection est fait au Gouvernement japonais par le Gouvernement français et non à la famille Matsukata, et qu’il a pris toutes les mesures nécessaires pour prévenir n’importe quelles revendications éventuelles et de qui que ce soit, sur la collection. Celle-ci restera à jamais la propriété nationale du Japon, dès la réalisation de la donation.
Sur ce point, le Gouvernement japonais croit devoir annoncer que les héritiers de feu M. Matsukata, ainsi que de feu M. Hyoki, administrateur de la collection à Paris, lui ont confirmé officiellement par lettres respectives, dont ci-joint une copie, datées du 1ᵉʳ avril 1955 et du 30 septembre 1954, qu’ils ont renoncé à tous droits de revendication et privilèges sur ladite collection ».
Il s’agit, en second lieu, d’une lettre en date du 1ᵉʳ avril 1955, signée par Saburō Matsukata (en sa qualité d’héritier) aux termes de laquelle [13] :
« Je soussigné, Saburō Matsukata, déclare renoncer à mes droits sur la Collection Matsukata, devenue propriété du Gouvernement français d’après les clauses du Traité de Paix de. San Francisco de 1951, au cas où grâce à la bienveillance du Gouvernement français ladite collection serait remise au Japon, et n’avoir aucune objection à présenter sur le fait qu’elle devienne à jamais la propriété du Gouvernement japonais et serve au bien de la Culture ».
L’ordonnance comporte en annexe la liste des œuvres issues de la collection transférée [14].
Cette liste comporte plusieurs centaines de peintures, dessins, aquarelles, gravures, livres et sculptures. On relève en particulier des œuvres de Picasso, Monet, Renoir, Rodin, Delacroix, Pissaro, Courbet, Van Dongen, Cézanne, Corot…
Mais cette liste ne comporte pas toute la collection. En effet, la France s’est réservée la part du lion en conservant dix-huit des plus belles pièces.
Il s’agit des œuvres suivantes :
N°1 - « La chambre de l’artiste à Arles » de Vincent Van Gogh - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 2
N°2 - « Justine Dieulh dite Berthe la sourde au jardin » d’Henri de Toulouse-Lautrec - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 3
N°3 - « La Volaille pendue » de Chaïm Soutine - Actuellement au Centre national d’art et de culture Georges Pompidou à Paris sous le numéro d’inventaire AM 3612 P
N°4 - « Le groom » de Chaïm Soutine - Actuellement au Centre national d’art et de culture Georges Pompidou à Paris sous le numéro d’inventaire AM 3611 P
N°5 - « Le bourgeois de Calais » d’Auguste Rodin - Actuellement au Musée Rodin de Paris sous le numéro d’inventaire S.00450
N°6 - « La liseuse grise » de Pablo Picasso - Actuellement au Centre national d’art et de culture Georges Pompidou à Paris sous le numéro d’inventaire AM 3613 P
N°7 - « Giotto » de Gustave Moreau - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 31174
N°8 - « Le pont Saint-Michel » d’Albert Marquet - Actuellement au Centre national d’art et de culture Georges Pompidou à Paris sous le numéro d’inventaire AM 3614 P
N°9 - « La serveuse de bocks » d’Edouard Manet - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 4
N°10 - « Vairumati » de Paul Gauguin - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 5
N°11 - « Moulin en Bretagne » de Paul Gauguin - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 6
N°12 - « La famille Schuffenecker » de Paul Gauguin Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 8
N°13 - « Nature morte » de Paul Gauguin - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 7
N°14 - « Les paysans de Flagey revenant de la foire » de Gustave Courbet Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 1959 9
N°15 - « Étude d’après Giorgione » de Paul Cézanne – Actuellement au Musée du Louvre à Paris sous le numéro d’inventaire RF 31173
N°16 - « La table dite bocaux et pots de confiture » de Paul Cézanne Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 31172
N°17 - « La montagne Sainte-Victoire » de Paul Cézanne - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous le numéro d’inventaire RF 31171
N°18 - « Décoration de salle à manger- Nature morte au Brie, Nature morte au Lièvre, Nature morte au canard » Trois frises de François Bonvin - Actuellement au Musée d’Orsay à Paris sous les numéros d’inventaire RF 1959 10, RF 1959 11, RF 1959 12
« La chambre à Arles » constitue la pièce maîtresse de la collection. Celle qui a le plus de valeur sur le plan artistique. Celle aussi dont le prix est inestimable. Elle a été réalisée en 1889, alors que Van Gogh était interné à l’hôpital psychiatrique de Saint-Rémy-de-Provence. La tableau est d’autant plus unique que l’artiste l’a spécialement peint pour l’offrir à sa mère.
Tout le tableau repose sur le travail de la matière picturale qui est tout à la fois couleur et texture. Elle est texture, car Van Gogh la triture presque comme un sculpteur, il joue avec la forme de la touche, il accentue les reliefs en créant des empâtements, sur les oreillers par exemple. Partout il laisse visible la trace du couteau, de la brosse ou du pinceau dont il s’est servi pour appliquer la pâte sur la toile.
Dans une lettre à son frère Théo, Van Gogh décrit le tableau en ces termes : « Les murs sont d’un violet pâle. Le sol est à carreaux rouges. Le bois du lit et les chaises sont d’un jaune beurre frais. Le drap et les oreillers citron vert très clair, la couverture rouge écarlate... » [15].
La violation des droits des héritiers de Matsukata.
Toute cette affaire relève d’une spoliation éhontée des droits des héritiers de Matsukata.
En effet, il apparait très clairement :
qu’en l’absence de belligérance officielle entre la France et le Japon, la collection Matsukata ne pouvait faire l’objet, en application de l’ordonnance du 5 octobre 1944, d’une mise sous séquestre comme appartenant à un ressortissant d’une « puissance ennemie »
qu’en l’absence de belligérance officielle entre la France et le Japon, l’article 14.2.1 du traité de paix de San Francisco du 8 septembre 1951 ne s’appliquait pas aux ressortissants japonais
que dès lors c’est de manière totalement illégale que la France a conservé par devers-elle, contre la volonté des héritiers de Matsukata, dix-huit œuvres faisant partie de la collection en invoquant abusivement les dispositions du traité précité
que, s’agissant du reste de la collection, c’est de manière totalement anticonstitutionnelle que la France a utilisé la procédure de l’ordonnance pour valider un « don » au Japon, une telle donation, à la supposer légale ce qui n’est pas le cas, relevant de la loi et donc du seul Parlement
La renonciation par les héritiers à leurs droits sur la collection Matsukata.
Les autorités françaises ont fait en sorte que les héritiers de la collection Matsukata renoncent expressément à tous leurs droits. La renonciation exprimée dans lettre du 1er avril 1955, signée par Saburō Matsukata (voir ci-dessus) n’est cependant pas générale et absolue. En effet cette lettre vise expressément la collection en tant « qu’elle est devenue la propriété du Gouvernement français d’après les clauses du Traité de Paix de San Francisco » et dans la mesure où « ladite collection serait remise au Japon » dans la perspective « quelle devienne à jamais la propriété du Gouvernement japonais et serve au bien de la Culture ».
Or, en l’espèce, la collection n’est jamais devenue la propriété du Gouvernement français, car le traité de San Francisco ne s’appliquait pas en l’absence de belligérance avérée entre les deux pays à la date de la saisie conservatoire effectuée suite à l’ordonnance du 5 octobre 1944.
Par ailleurs, la collection ayant été remise au Japon selon une procédure irrégulière par voie d’ordonnance alors qu’une loi votée par le Parlement français était obligatoire, la condition posée par la renonciation n’est pas remplie, seule une remise juridiquement valable pouvant engager les héritiers.
Enfin et surtout, à supposer, hypothèse d’école, que la « donation » validée par simple ordonnance soit valable, il n’en demeure pas moins que la lettre de renonciation ne concerne expressément que « la collection remise au Japon ».
Or, il reste dix-huit œuvres que la France a conservé par-devers elle, qui n’ont donc pas été remises au Japon et pour lesquelles les héritiers n’ont pas renoncé à leurs droits.
Il s’ensuit nécessairement qu’a minima les héritiers de la collection Matsukata conservent leurs droits sur ces dix-huit œuvres dont il ont été illégalement spoliés.
Les droits des héritiers à revendiquer la restitution des dix-huit œuvres conservées illégalement par la France.
Il est manifeste que les dix-huit œuvres conservées par la France ont fait l’objet d’une appropriation entachée d’excès de pouvoir caractérisé.
Un acte obtenu par fraude ne crée pas de droits (CE 29 novembre 2002, req. 223027). C’est l’application de l’adage « Fraus omnia currumpit ».
Dans son célèbre arrêt d’Assemblée du 31 mai 1957 (req.n°26188), le Conseil d’État français a jugé que « les actes administratifs affectés d’une illégalité particulièrement grave et flagrante doivent être regardés comme inexistants et sont considérés comme nuls et non avenus ».
L’acte inexistant est tellement intolérable que le juge ne fait que le constater. Si le juge l’annulait, cela supposerait que l’acte a été à un moment présumé légal. Il n’a virtuellement jamais vu le jour. La qualification d’un acte inexistant ne répond pas à des critères très précis. En effet, le juge administratif français utilise une formule assez générale qui est la suivante :
« Un acte ne peut être regardé comme inexistant que s’il est dépourvu d’existence matérielle ou s’il est entaché d’un vice d’une gravité telle qu’il affecte, non seulement sa légalité, mais son existence même » (par exemple : CE, 28 sept. 2016, req. n° 399173, Anticor).
L’acte inexistant produit deux séries d’effets : il peut être anéanti à tout moment et il ne produit aucun effet juridique. Lorsqu’un acte qui est en réalité inexistant se présente devant le juge administratif français, celui-ci doit le relever d’office comme moyen d’ordre public (par exemple : CE, 5 mai 1971, req. n° 75655, Préfet de Paris).
L’acte inexistant ne crée aucun droit acquis. Autrement dit, il n’est pas possible d’opposer quoi que ce soit en se fondant sur un tel acte. La constatation ou le retrait d’un acte inexistant entraine la disparition des actes subséquents, soit ceux qui ont été pris sur son fondement.
En l’espèce, l’appropriation des dix-huit œuvres constitue un acte d’une illégalité particulièrement grave.
Dès lors, l’incorporation de ces œuvres au domaine public revêt un caractère inexistant. En droit, une telle incorporation est juridiquement inexistante et de nul effet, les articles L451-3 et L451-5 du Code du patrimoine et l’article L3111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques qui consacrent l’imprescriptibilité et l’inaliénabilité des collections publiques étant inopposables en cas d’inexistence. Par ailleurs, l’article D451-19 du Code du patrimoine dispose que la radiation d’un bien figurant sur un inventaire des musées de France peut intervenir « en cas d’inscription indue sur l’inventaire ».
La restitution par la France de la « Chambre à Arles » de Van Gogh et des autres œuvres conservées illégalement.
Les chances pour les héritiers de la collection Matsukata d’obtenir, devant le Conseil d’État français, la radiation de l’inventaire des œuvres illégalement spoliées en vue de leur restitution sont extrêmement faibles, compte tenu de sa jurisprudence restrictive constante [16] en matière d’inaliénabilité des biens appartenant à une collection publique. Si les héritiers de la collection Matsukata veulent récupérer tout ou partie de la collection dont ils ont été spoliés, la seule voie de recours adaptée est celle de la justice internationale.
À cet égard, la saisine éventuelle de la Cour européenne des droits de l’homme n’apparait pas pertinente. En effet cette juridiction est destinataire de plusieurs milliers de requêtes chaque année. Par son Protocole n°14 entré en vigueur le 1ᵉʳ juin 2010, la Cour a modifié sa procédure pour faire face à l’inflation des requêtes dont elle est saisie en exigeant désormais que le préjudice soit « important ». Plus de 95% des requêtes sont déclarées irrecevables après un simple examen très sommaire à juge unique. Dans la pratique, une équipe de juristes assistant le juge unique ne retient que les affaires paraissant mériter la transmission du dossier à un comité de trois juges ou à une chambre de la Cour. Les autres dossiers sont systématiquement rejetés [17].
En l’espèce, le recours le plus judicieux semble être une plainte devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies pour privation arbitraire du droit de propriété consacré par l’article 17 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948.
L’ONG International Restitutions [18], dont l’objet social est notamment de veiller à la licéité de la composition des collections des musées publics, a engagé auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies une procédure de plainte contre la France pour le compte des héritiers de la collection Matsukata au titre de la gestion d’affaires telle que prévue par les dispositions de l’article 1301 du Code civil français [19].