La déontologie peut se définir ainsi : c’est l’ ensemble des règles et des devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux qui l’exercent, les rapports entre ceux-ci et leurs clients et le public. Elle génère, pour tout juriste (juges, avocats, notaires, greffiers, médiateurs, huissiers....), la compétence de savoir ce qui est juste et convenable de faire ou de dire.
Pour les professionnels du droit elle fait l’objet d’une réflexion constante, car elle représente un enjeu important pour leur fonction. Elle constitue un élément majeur de la politique de Responsabilité Sociale de l’entreprise. Elle est également un outil de communication envers le public, car elle crée un lien de confiance entre les usagers et les professionnels du droit.
Avec l’extension de la possibilité pour les avocats de faire du démarchage auprès de clients potentiels, la déontologie prend tout son sens. Comment se conciliera-t-elle avec la publicité faite par les avocats ?
Nombreuses sont les institutions, associations de toutes professions du droit qui se penchent sur le sujet que ce soit au niveau national ou international. Voici les plus connues d’entre-elles :
l’Association Française pour les Juristes d’Entreprise (AFJE) : elle a créé un comité déontologie et pratique professionnelle dans le but de mettre en place un code de la déontologie pour les juristes d’entreprise.
le Cercle Montesquieu : lors des débats du mois d’avril 2014 du Cercle Montesquieu la question de l’utilité d’un code de déontologie pour les juristes a été abordée.
le Conseil National des Barreaux pour les avocats.
le Conseil supérieur de la Magistrature.
le Collège de la déontologie de la juridiction administrative pour les juges administratifs.
l’Association internationale du Barreau (IBA) : elle a élaboré un documents sur les principes internationaux de la déontologie de la profession juridique des avocats.
le Conseil des barreaux européens (CCBE).
Comme on peut le constater, cette réflexion sur la déontologie se fait par profession (avocats, juristes d’entreprise, magistrats, juges administratifs...) et de ce fait chaque profession du droit ou presque a son code, sa charte de déontologie (exemple : la charte de déontologie des membres de la juridiction administrative, le recueil des obligations déontologiques des Magistrats, le règlement Intérieur National de la profession d’avocat (RIN), l’avant-projet du code de déontologie des juristes d’entreprise).
Cette vision de la déontologie recentrée sur une profession juridique particulière s’explique par la diversité et par la spécificité de chacune d’elle.
Face à cette vision corporatiste de la déontologie, peut-il exister une réflexion commune sur la déontologie des juristes ? Est-il possible de concevoir un code de déontologie commun à l’ensemble des juristes ? Cette dernière idée est-elle réalisable alors que certains juristes font partie d’une profession réglementée, que d’autres sont tenus par le secret professionnel, que certains sont fonctionnaires d’autres professionnels libéraux ?
Messieurs Joël Moret-Bailly [2] et Didier Truchet [3] engagent cette réflexion dans leur essai « Pour une autre déontologie des juristes » [4].
Cet ouvrage bref et de lecture aisée, vise à refondre la déontologie de l’ensemble des juristes.En voici quelques extraits :
Sur la définition du juriste :
Selon le Conseil national du droit [5], "[...] être juriste est d’abord une identité caractérisée par une éthique commune et la maîtrise d’un ensemble de connaissances, de méthodes et de techniques. C’est ensuite un métier qui peut être exercé sous des statuts très variés et dans des institutions très diverses. »
Tout juriste possède une compétence technique et une compétence déontologique.Sur l’insuffisance des déontologies contemporaines :
Elles sont introuvables :
"[...] on ne trouve pas de règles déontologiques communes à tous les juristes puisqu’elles ne sont pas formalisées, ce à quoi cet essai suggère précisément de remédier."
"[...] les déontologies existantes sont peu accessibles au public."
"Du point de vue [...] de la société, il y a là un sérieux problème de communication et même, d’accès au droit."
Emiettement formel des déontologies :
" La multiplication récente des codes et chartes rend l’ensemble de moins en moins lisible."Elles donnent une conception obsolète de la déontologie :
"Elle ne permet que très difficilement à l’usager du droit de connaître les obligations des professionnels du droit envers lui, et par voie de conséquence, ses droits. Or c’est aussi cette connaissance, cette « transparence » que la société attend désormais des juristes."Sur l’opportunité d’une refonte de la déontologie.
"La vision de la déontologie telle qu’elle apparaît actuellement est insuffisante pour répondre aux aspirations sociales contemporaines et aux besoins actuels des juristes, des usagers du droit et de la société."
"Vis-à-vis des usagers du droit, il ne faut pas oublier que la déontologie constitue un affichage, vu de l’extérieur de la profession, notamment destiné à exposer les principes sur lesquels l’exercice de la profession est fondé,[.. .]."
Vis-à-vis des professionnels du droit "la réflexion déontologique vise à définir et à exprimer une déontologie commune à tous les juristes selon une logique de dénominateur commun fondée sur ce qui fait le cœur de leur profession à tous."
"« l’autre » déontologie des juristes serait une déontologie qui concilierait deux impératifs [...] le service de la personne en toute indépendance,[...] le secret professionnel."Dans leur conclusion, les auteurs proposent un socle déontologique uniforme composé de 8 articles.
Pour les juristes, la déontologie et l’éthique représentent bien plus que de simples notions, elles sont constitutives de leur profession. La réflexion sur la déontologie est donc fondamentale pour les professionnels du droit. Doit-elle rester centrée sur une profession particulière ou au contraire commune à l’ensemble des juristes ? Quel serait le mode de réflexion le plus enrichissant pour chaque professionnel du droit ? A vous de trancher....
Discussion en cours :
bjr,
oui est il serait essentiel d’y associer les conciliateurs de justice qui sont à mi chemin entre le juriste et le médiateur et cela dans le perspective de la modernisation urgente de leur statut de 1978....
CJ 78