La plupart des sociétés holdings mixtes y sont soumises, car elles ont généralement trois types de recettes :
des produits soumis à la TVA (prestations de services rendues à leurs filiales),
des produits exonérés de TVA (intérêts), et
des produits qui ne sont pas dans le champ d’application de la TVA (dividendes).
La principale difficulté posée aux sociétés holdings mixtes, en matière de taxe sur les salaires, est l’affectation d’un ou plusieurs intervenants, dirigeants ou salariés, au secteur dit « financier » (perception d’intérêts et de dividendes).
Depuis 2001, l’Administration, s’alignant sur la jurisprudence, considère que les entreprises qui ont constitué des secteurs distincts d’activités pour l’exercice de leurs droits à déduction de TVA doivent obligatoirement en tenir compte pour le calcul de la taxe sur les salaires (Instruction 5 L-4-01 du 7/06/2001).
Le contexte a par la suite profondément évolué, notamment du fait de la jurisprudence communautaire sur les opérations financières accessoires (CJCE 29/04/2004 EDM), et l’Administration a admis que les entreprises puissent constituer un secteur d’activité pour les seuls besoins de la taxe sur les salaires, dans la mesure où elles auraient été autorisées à constituer un secteur d’activité en application de la doctrine antérieure (ce qui n’a d’intérêt, en pratique, que si les produits financiers (intérêts et dividendes) excèdent 5% du montant total des produits, et que les dépenses grevées de TVA engagées pour la réalisation des opérations financières n’excèdent pas 10% des biens et services grevés de TVA acquis par l’entreprise, hors prise en compte des frais généraux) (Lettre DLF du 8/11/2006).
Les juridictions du fond étaient partagées quant aux personnes devant être considérées comme étant affectées au secteur financier. Contrairement à la Cour administrative d’appel de Paris, qui a considéré qu’une société holding peut affecter un seul de ses salariés à son secteur financier, dès lors qu’il lui suffit de comptabiliser les écritures relatives à ce secteur, la plupart des juridictions du fond estiment que les fonctions de direction sont présumées porter, même en partie seulement, sur le secteur financier non soumis à la TVA. Selon cette seconde analyse, les rémunérations versées aux dirigeants doivent par conséquent être soumises à la taxe sur les salaires en fonction du rapport d’assujettissement général de l’entreprise.
Le Conseil d’État vient de trancher entre ces positions divergentes (CE 8/06/2011 n° 331848, 8e et 3e s.-s., Sté Sofic ; n° 331849, 8e et 3e s.-s., SAS Holding Rousseau HCPCE ; n° 341018, 8e et 3e s.-s. Sté P2C Investissement ; n° 340863, 8e et 3e s.-s., SA Balsa), en considérant que :
(i) dans les sociétés anonymes, les pouvoirs du Président du Conseil d’administration et des Directeurs généraux s’étendent en principe au secteur financier, même si le suivi de ce secteur est sous-traité à des tiers ou confié à des salariés spécialement affectés, et si le nombre des opérations relevant de ce secteur est très faible, mais que
(ii) s’il résulte des éléments produits par l’entreprise que certains de ses dirigeants n’ont pas d’attribution dans le secteur financier, notamment lorsque, compte tenu de l’organisation adoptée, l’un d’entre eux est dépourvu de tout contrôle et responsabilité en la matière, la rémunération de ce dirigeant doit être regardée comme relevant entièrement des secteurs passibles de la TVA et, par suite, comme placée hors du champ de la taxe sur les salaires.
Les redevables qui n’acquittent pas la taxe sur les salaires sur l’intégralité des rémunérations qu’ils versent doivent donc pouvoir démontrer que les intervenants dont la rémunération ne donne pas lieu au paiement de la taxe sur les salaires n’ont aucune attribution ni responsabilité dans le secteur financier.
Des éléments tels que les statuts, des délibérations du conseil d’administration, les conventions d’assistance et de refacturation conclues avec les filiales pour les services rendus par la holding, pourront être retenus si ces éléments démontrent que les pouvoirs de ces intervenants sont limités, et qu’un ou plusieurs des dirigeants de la société n’ont d’attributions que dans le secteur de la holding soumis à la TVA.
Notons que la Haute Assemblée exclut toujours toute possibilité de ventiler la rémunération du personnel commun aux différents secteurs des holdings, en fonction d’une clé économique objective, ce qui aurait pourtant permis, comme certains praticiens l’ont appelé de leurs vœux il y a presque dix ans, de soumettre les rémunérations ainsi ventilées à la taxe sur les salaires en fonction du prorata propre à chacun (cf. Droit Fiscal 2002, n°48, Taxe sur les salaires et secteurs d’activité : un fractionnement du salaire du personne commun à plusieurs secteurs est-il possible ?, Alain Recoules et Roland Delfaud).