Drogue, obligation de sécurité et licenciement.

Par Arnaud Pilloix, Avocat

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Consommer de la drogue avant le travail : faute grave ? (A propos de l’arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation du 27 mars 2012)

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Les faits : un steward consomme de la drogue pendant son temps d’escale entre deux vols « longs courriers ». Il reconnaît les faits devant un officier de Police. Son employeur , la compagnie aérienne AIR TAHITI NUI, le licencie pour faute grave.

Le salarié engage une action devant le Conseil de prud’hommes pour voir requalifier son licenciement en licenciement abusif, considérant :

  • Qu’un fait tiré de la vie personnelle ne peut justifier un licenciement au visa de l’article 9 du Code civil et L.1221-1 du Code du travail ;
  • Qu’aucun comportement « anormal » n’a été détecté sur le lieu de travail ;
  • Qu’il s’agit d’une faute ancienne et isolée.

Le pourvoi est rejeté dans un arrêt du 27 mars 2012 (publié au bulletin) au motif qu’« un motif tiré de la vie personnelle du salarié peut justifier un licenciement disciplinaire s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail  ».

Les manquements du salarié à ses obligations professionnelles étaient avérés en l’espèce selon les Juges puisqu’un steward fait partie de la catégorie « personnel critique pour la sécurité ».

Or tant les dispositions du Code de l’aviation que le règlement intérieur de l’entreprise interdisent aux stewards«  d’être sous l’influence de substances psychoactives.  »

De ce fait, le salarié ayant consommé de la drogue durant ses escales entre deux vols « n’avait pas respecté ses obligations prévues dans son contrat de travail et avait ainsi fait courir un risque aux passagers ».

Dans cette décision, la Cour de cassation contourne le débat sur la vie privé mais considère que le salarié se trouvait « sous l’influence de produits stupéfiants pendant l’exercice de ses fonctions  ».

La Cour de cassation invite par cet arrêt à une appréciation in concreto par rapport aux obligations découlant du contrat de travail pour chaque salarié, en prenant en compte les dispositions du règlement intérieur et du Code de l’aviation.

A défaut, il est toujours possible de se référer à l’article L.4122-1 du Code du travail qui impose à chaque salarié de respecter les règles de sécurité, mais cette disposition générale semble moins pertinentes que dans le cas de ce steward, qui n’a pas eu le temps d’atterrir.

Si l’on se réfère à la jurisprudence concernant l’alcool et l’état d’ébriété sur le lieu de travail, la faute grave est rarement retenue.

En effet, il appartient à l’employeur de démontrer que l’état d’ébriété a eu des conséquences sur le travail (ex : conduite d’un véhicule…), ce qui s’avère souvent compliqué en pratique.


En synthèse :
Cet arrêt s’inscrit dans la tendance actuelle de la Cour de cassation en ce qu’elle implique de plus en plus le salarié sur les aspects liés à la sécurité, renforçant ainsi les pouvoirs de sanction de l’employeur en cas de violation de ces règles. Il convient toutefois d’en relativiser sa portée tant les faits d’espèces sont particuliers.

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