La Cour d’appel d’Angers a confirmé, le 24 mars 2009, une décision du Tribunal correctionnel condamnant un militant politique à une amende de 30€ avec sursis pour le délit d’offense au chef de l’Etat. Le mis en cause a immédiatement fait part de son intention de se pourvoir en cassation, voire de saisir la Cour Européenne des Droits de l’homme.
Cette condamnation peut choquer mais force est de constater qu’elle se justifie au plan strictement juridique.
Une infraction constituée
Ancêtre du crime de lèse-majesté, cette législation, bien que critiquable et peu utilisé, reste en vigueur car elle n’a jamais été abrogée.
L’article 26 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse dispose que « l’offense au Président de la République par l’un des moyens énoncés dans l’article 23 est punie d’une amende de 45000€ ». Elle est constituée par toute injure, diffamation et atteinte à la vie privée. Il faut également caractériser l’intention délictueuse de l’auteur. Dans le cas d’espèce, la cour d’appel n’avait d’autre solution que d’entrer en voie de condamnation. Le quantum de la peine (30€ d’amende) est assez éloquent quant à la volonté des juges de condamner l’auteur de l’offense.
La fin du délit d’offense au vue de la jurisprudence européenne ?
Une décision du 25 juin 2002 de la Cour Européenne des Droits de l’homme « Colombani c/ France » a condamné la France pour violation de l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme sur la liberté d’expression. La France a été condamnée au motif que l’article 36 de la loi du 29 juillet 1881 sanctionnant l’offense à un chef d’État étranger, ne permet pas d’opposer l’exceptio veritatis, c’est-à-dire prouver la véracité de leurs allégations afin de pouvoir s’exonérer de leur responsabilité pénale. Cette impossibilité de faire jouer la vérité constitue une mesure excessive pour protéger la réputation et les droits d’une personne. Suite à cette condamnation, la France a abrogé l’incrimination d’offense à un chef d’Etat étranger.
Le délit d’offense au chef de l’Etat de l’article 26 de la loi de 1881 connaît le même régime procédural, sans possibilité d’invoquer l’exceptio veritatis.
Dès lors, dans la lignée de la décision « Colombani c/ France », il semblerait logique que la Cour Européenne considère également le délit d’offense au Président de la République, comme contraire à la Convention Européenne des Droits de l’Homme.
A noter qu’une abrogation de l’offense au chef d’Etat ne modifierait pas la situation du mis en cause car la problématique de l’exception de vérité ne s’applique pas à l’injure.
Source : www.liberation.fr
La rédaction du village