Deux cas de figure peuvent se présenter et il est donc essentiel, dans un premier temps, de lire attentivement le contrat de travail :
Soit le contrat de travail prévoit que les objectifs sont fixés d’un commun accord entre l’employeur et le salarié.
Une négociation doit alors d’engager entre les parties et aboutir à un avenant qui sera signé par elles. L’employeur ne peut imposer unilatéralement de nouveaux objectifs au salarié et « passer en force ». Faute d’accord, les parties doivent s’en remettre au juge.
Soit le contrat de travail prévoit que les objectifs sont fixés unilatéralement par l’employeur, dans le cadre de l’exercice de son « pouvoir de direction ».
L’employeur dispose alors du droit de modifier seul et à sa guise les objectifs et il peut, par exemple, ajouter un objectif supplémentaire à ceux qu’il utilisait auparavant (c’était le cas dans l’affaire tranchée le 2 mars 2011).
La Cour de cassation précise dans son arrêt du 2 mars 2011 que ce droit de l’employeur connaît deux limites qui conditionnent la validité des nouveaux objectifs.
Deux conditions à respecter pour la validité des nouveaux objectifs
Condition de fond : les nouveaux objectifs doivent être réalisables par le salarié.
La décision prise par l’employeur peut avoir pour effet de baisser la rémunération du salarié s’il n’atteint pas ses objectifs. La Cour considère donc que ce droit reconnu à l’employeur doit être encadré pour s’exercer de façon loyale.
Pour cela, seuls des objectifs raisonnablement atteignables par le salarié doivent lui être assignés.
Dans le cas contraire, le salarié pourra faire constater en justice que ses nouveaux objectifs sont fantaisistes et inatteignables et qu’ils ne peuvent avoir d’incidence sur sa rémunération ; dans ce cadre, le juge les écartera et maintiendra au salarié sa rémunération antérieure.
On voit donc se préciser, par cette décision du 2 mars 2011, la démarche de sécurité que doit adopter l’employeur sur le contenu des nouveaux objectifs :
Être en mesure de pouvoir démontrer au juge que les nouveaux objectifs sont pertinents et peuvent raisonnablement être atteints par le salarié. Réfléchir à cette démonstration de la preuve dès le moment où il formule les nouveaux objectifs est sans doute la meilleure des attitudes pour l’employeur ; conserver les documents et informations qui participent à cette démonstration est donc prudent.
Condition de forme : les nouveaux objectifs fixés par l’employeur doivent être communiqués au salarié au début de l’exercice où ils devront être réalisés.
Autrement dit, la nouvelle « règle du jeu » doit être connue du salarié au début de la partie -c’est-à-dire : au début de l’année où ils devront être atteints. Apparaît ici l’autre élément de la démarche de sécurité de l’employeur dans la fixation des nouveaux objectifs : l’élément temporel.
Le conseil à donner est donc clair ; l’employeur doit agir en début d’exercice et il doit pouvoir le prouver. La preuve concerne à la fois la date à laquelle l’information sur les nouveaux objectifs a été donnée au salarié et le contenu précis de cette information.
Plusieurs procédés sont envisageables :
envoi des nouveaux objectifs par LRAR,
remise d’une note de service fixant les nouveaux objectifs en main propre contre émargement par le salarié qui mentionnera la date de remise de ceux-ci,
envoi par email au salarié en lui demandant de répondre par email qu’il a bien réceptionné les objectifs.
Il est probable que c’est cette seconde condition qui fait actuellement le plus souvent défaut dans le processus de fixation des nouveaux objectifs par l’employeur, surtout dans les PME et les TPE.
Par conséquent, employeurs, à vos stylos ou à vos ordinateurs !
En n’oubliant pas que la fixation unilatérale des objectifs par l’employeur ne pourra s’opérer que si, en premier lieu, elle a été affirmée dans le contrat de travail du salarié.
Une vérification initiale impérative s’impose donc avant tout, ce qui sera peut-être l’occasion d’une remise à plat des modèles de contrats de travail de l’entreprise pour les nouveaux embauchés…