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Brocante, braderie et vide-grenier : ce que l’on peut et ce que l’on ne peut pas faire. Par Marie de Champeaux, Rédactrice Web.
Parution : lundi 16 décembre 2019
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Alors que les vide-greniers ont le vent en poupe ces derniers temps, ainsi que tout ce que l’on appelle, en termes juridiques, les ventes au déballage, les contrôles de l’URSSAF et des forces de police se sont intensifiés, auprès des exposants et de leur marchandise.
À Maretz, dans le Nord, 2 personnes ont été arrêtées en juin 2019 pour travail dissimulé. À Mézilles, dans l’Yonne, ce ne sont pas moins d’une cinquantaine d’objets illégaux qui ont été confisqués et retirés de la vente.
Quels sont donc les droits et obligations dans ce domaine ?

L’article L. 310-2 du Code de commerce déclare que les ventes au déballage sont « les ventes ou rachats de marchandises, effectués dans des locaux ou sur des emplacements non destinés à la vente au public ». Particuliers et professionnels peuvent avoir le statut de vendeur. Dans ce genre d’exposition ambulante, le consommateur ignore généralement à qui il a affaire lors de sa transaction, et si les biens proposés à la vente peuvent l’être légalement. Afin de le protéger, le législateur a mis en place un ensemble de normes encadrant les personnes et les biens qui sont concernés par les ventes au déballage.

La réglementation des personnes qui animent les ventes au déballage.

L’organisateur, premier responsable face à la loi.

Que ce soit un professionnel ou un particulier, l’organisateur doit respecter un certain nombre de procédures, qui seront identiques quel que soit son statut. C’est la peine encourue qui sera différente.

Il doit effectuer :
- Une déclaration préalable à la mairie, par lettre recommandée avec accusé de réception (Article R. 310-8 du Code de commerce), dans un délai :
- de 3 mois avant la date du début de la vente, si l’exposition a lieu dans un domaine public ;
- de 15 jours avant la date du début de la vente, si le domaine public n’est pas concerné (lieu privé, parking, etc.).
- Une demande d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public, si tel est le cas ;
- L’inscription de tous les exposants au registre des vendeurs (Article R. 310-9 du Code de commerce), qu’ils soient professionnels ou particuliers.

Le manquement à la déclaration entraîne une amende de 15.000 € si l’organisateur est un particulier, selon l’article L. 310-5 du Code de commerce. Celle-ci est de 75.000 € s’il est un professionnel, comme le stipule l’article L. 310-6 du Code de commerce.

La loi est encore plus stricte en ce qui concerne le registre des vendeurs, qui doit être tenu à jour quotidiennement, pendant toute la durée du vide-grenier ou de la brocante. L’article 321-7 du Code pénal précise que le déclarant risque une amende de 30.000 € et une peine d’emprisonnement de 6 mois.

L’organisateur doit aussi veiller à ce que la vente n’excède pas la durée de 2 mois dans un même lieu, sous peine de subir une amende de 1.500 € (Article R. 310-19 du Code de commerce), s’élevant à 3.000 € en cas de récidive.

Les exposants, responsables différemment selon leur statut.

Dans les brocantes et les vide-greniers, le consommateur pourra acheter des objets aussi bien à des particuliers qu’à des professionnels. Les droits et obligations de ces derniers diffèrent nécessairement.

Le particulier est un vendeur ponctuel, qui doit s’inscrire seulement au registre des vendeurs de la vente au déballage à laquelle il assiste, comme l’exige l’article R. 310-9 du Code de commerce. Cette inscription est accompagnée d’une attestation sur l’honneur, certifiant qu’il n’a pas effectué plus de 2 ventes dans l’année. À ce titre, il a le droit de « vendre exclusivement des objets personnels et usagés » (Article L. 310-2 du Code de commerce). S’il veut vendre des objets qu’il a fabriqués lui-même, il doit posséder une micro-entreprise.

Cette exigence légale s’explique au regard du droit fiscal, qui estime que le particulier n’exerce pas dans le cadre professionnel. Il ne sera donc pas imposable sur la vente de ces objets usagés, l’exception portant toutefois sur :
- La vente de métaux précieux, exigeant le paiement d’une taxe, régie par les articles 150 VI à 150 VM du Code général des impôts ;
- La vente d’autres biens excédant 5.000 €, hormis la cession de meubles, voitures et électroménagers qui sont exonérés.
Les articles 321-1 à 321-9 du Code pénal régissent les peines encourues par les revendeurs ne respectant pas leurs obligations.

Le professionnel doit bien sûr être inscrit dans le registre des vendeurs de la vente au déballage, mais aussi au ROM (Registre des Objets Mobiliers), puisqu’il acquiert des biens dans le but de les revendre. Il peut aussi vendre des objets neufs ou fabriqués par ses soins, contrairement au particulier. Il a l’obligation de déclarer ses revenus sur ses ventes et sera donc imposable. Il dépendra alors du régime micro-BIC ou réel, si ses recettes sont inférieures à 170.000 €, ou réel simplifié, si elles excèdent ce montant.
L’article 321-7 du Code pénal, qui ne concerne pas les particuliers puisqu’il ne s’agit pas de leur activité professionnelle, s’applique bien aux professionnels de la vente au déballage, en plus de l’organisateur de cette vente. Ils peuvent donc être « punis de six mois d’emprisonnement et 30.000 € d’amende », s’ils ne respectent pas les obligations précitées.

Une réglementation stricte sur les objets à vendre.

Les objets autorisés.

Tant que l’objet est usagé ou personnel, il peut être vendu par un particulier. Cela exclut donc les produits neufs, ce qui n’est pas le cas du professionnel. Son activité lui permet évidemment de vendre des objets neufs et d’occasion. Pour l’un comme pour l’autre en revanche, sont bien sûr exclus les produits de contrefaçons et volés. D’où l’importance de ce registre des vendeurs, où ces derniers doivent préciser la nature de leur marchandise (Arrêté du 21 juillet 1992 fixant les modèles de registres relatifs à la vente des objets mobiliers).
Ce registre peut donc être exigé des services fiscaux, de ceux de la concurrence, de ceux de la consommation et répression des fraudes ou encore des douanes. Ainsi, le consommateur a peu de chances d’acheter un objet recelé.

Les objets interdits ou réglementés.

Pour des raisons évidentes d’hygiène, l’exposant ne peut vendre ni de nourriture ni d’alcool, sauf s’il est un professionnel dont c’est l’activité. Il doit pouvoir alors présenter la traçabilité de ses produits, comme l’exige la réglementation de l’EFSA (European Food Safety Authority).

Les armes neutralisées, c’est-à-dire rendues inoffensives, peuvent être vendues avec l’accord de l’organisateur, mais les munitions, armes à feu et armes blanches sont strictement interdites.

La vente d’animaux est aussi prohibée. Il est à noter que cette infraction à l’article 276.4 du Code rural est assez courante : plusieurs stands proposent effectivement à côté de leurs objets usagés, des lapins, des canards ou des poules ainsi que des oiseaux en cage. Seules les expositions prévues à cet effet en ont le droit. Cette interdiction s’étend aussi aux animaux empaillés.
L’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, doit veiller à ce que ce genre d’exposition ne mette pas non plus en vente des objets issus d’animaux protégés, tels que :
- L’ivoire ;
- Les peaux et les fourrures ;
- Les carapaces de tortue ;
- Les rostres de poissons-scie.

Enfin, tout objet susceptible de troubler l’ordre public ou moral doit être exclu des ventes au déballage. Ainsi en est-il, par exemple, de la vente d’uniformes nazis ou de tout autre objet se rapportant à des crimes contre l’humanité (Article R. 645-1 du Code pénal).

Toutes ces règles visent à protéger le consommateur d’éventuelles dérives des exposants malhonnêtes, qui mettent à mal la profession des uns et le plaisir des autres, de vendre ponctuellement.

Marie de Champeaux Rédactrice web SEO