Réforme de la procédure d’appel : le point de vue d’Emmanuelle Vajou.

Article proposé par un Partenaire Voir la page habitant

2749 lectures 1re Parution: 5  /5

A 2 mois de son entrée en vigueur, le décret n° 23-1391 du 29 décembre 2023 est le sixième décret concernant la procédure d’appel civile depuis le décret Magendie de 2009. Les avocats savent qu’un dossier solide peut échouer à cause d’une seule règle de procédure. Ce décret, en vigueur dès le 1er septembre 2024, est-il réellement une simplification de la procédure d’appel, comme le souhaitent les avocats, et accélérera-t-il la mise en œuvre d’une justice contractuelle dans un contexte où les Cours d’appel peinent à gérer les flux judiciaires ?

-

En amont de la formation en webinaire qu’elle coanimera avec Soraya Amrani-Mekki, Professeure à l’école de droit de Sciences Po, jeudi 4 juillet, Emmanuelle Vajou, avocate associée LX et spécialiste de la procédure d’appel, décrypte pour vous les points clefs de la réforme.

Ce Décret entre en vigueur le 1er septembre 2024 et sera applicable aux instances d’appel introduites à compter de cette date, ainsi qu’aux instances reprises devant la cour d’appel à la suite d’un renvoi après cassation lorsque la juridiction de renvoi est saisie à compter de cette même date.

D’un point de vue formel, ce décret contient tout d’abord de nombreuses mesures de restructuration de la procédure d’appel avec représentation obligatoire pour la rendre autonome de celle de première instance et plus lisible dans le code de procédure civile. Il procède également à une réécriture et renumérotation avec un partage, plus clair, des deux circuits que peut suivre une affaire en appel, soit celui de la procédure à bref délai dans les cas prévus à l’article 906 du code de procédure civile, soit la procédure ordinaire plus longue de la mise en état réglementée aux nouveaux articles 907 à 914-5 du même code.

D’un point de vue formel toujours, le Décret codifie une partie de la jurisprudence de la 2ème chambre civile de la Cour de cassation rendue, notamment, depuis le Décret n° 2019.1333 du 11 décembre 2019 réformant la procédure civile, ce qui aura le mérite de simplifier le travail des avocats.

D’un point de vue plus juridique, ce décret n° 23-1391 du 29 décembre 2023 constitue un retour en arrière par rapport au Décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 en permettant que l’effet dévolutif de l’appel ne soit plus figé dans la déclaration d’appel, mais puisse être complété, retranché ou rectifié par l’avocat dans ses premières conclusions d’appelant principal en application du nouvel article 915-2 du code de procédure civile.

L’article 915-2 du code de procédure civile, combiné dans son application à la nouvelle version de l’article 901 du même code, risque d’être source d’une nouvelle sinistralité pour les avocats au moment de la rédaction du dispositif de leurs premières conclusions auquel ils devront être encore plus attentifs. Quid lorsque les chefs du dispositif du jugement critiqué seront visés dans la déclaration d’appel mais pas dans les conclusions d’appelant ou n’y seront repris que partiellement, ou encore lorsqu’ils seront incomplets dans les premières conclusions de l’appelant et rectifiés, seulement, dans un second jeu de conclusions, même si ce dernier est régularisé dans le délai dont l’appelant dispose pour conclure … ?

Et, face à ces nouvelles hypothèses, quelles sanctions ? De ce point de vue, la simplification n’est pas évidente et la vigilance reste de mise en attendant que la 2ème chambre civile de la Cour de cassation ne se prononce sur ces nouveaux cas de figure.

Maitre Emmanuelle VAJOU,
Avocate associée LX
et Directrice de l’Académie LX.

D’un point de vue juridique toujours et concernant les délais, les nouveaux articles 906-1 et 906-2 du code de procédure civile allongent respectivement à 20 jours le délai pour signifier la déclaration d’appel et à 2 mois le délai pour conclure dans les procédures à bref délai, ce qui donnera un peu plus d’oxygène aux avocats, mais risque de rallonger d’autant la fixation de ces affaires le plus souvent urgente.

Du point de la déjudiciarisation, le Décret n° 23-1391 du 29 décembre 2023 poursuit, en appel, sur le chemin de la déjudiciarisation en créant une invitation systématique des parties à conclure une convention de procédure participative aux fins de mise en état dont l’objectif est clairement d’espérer qu’elle aboutisse à un accord total ou partiel.

En conclusion, la chancellerie n’a répondu que partiellement avec ce décret du 29 décembre 2023 au souhait de simplification des avocats, sans tout déréguler, ni supprimer les sanctions attachées au non-respect des règles de la procédure d’appel.

Retrouvez Emmanuelle Vajou et Soraya Amrani-Mekki le 4 juillet prochain pour un webinaire exclusif sur la réforme de la procédure d’appel et l’actualité jurisprudentielle. Informations et inscriptions ici.

Recommandez-vous cet article ?

Donnez une note de 1 à 5 à cet article :
L’avez-vous apprécié ?

7 votes
Village de la justice et du Droit

Bienvenue sur le Village de la Justice.

Le 1er site de la communauté du droit: Avocats, juristes, fiscalistes, notaires, commissaires de Justice, magistrats, RH, paralegals, RH, étudiants... y trouvent services, informations, contacts et peuvent échanger et recruter. *

Aujourd'hui: 156 320 membres, 27837 articles, 127 254 messages sur les forums, 2 750 annonces d'emploi et stage... et 1 600 000 visites du site par mois en moyenne. *


FOCUS SUR...

• Voici le Palmarès Choiseul "Futur du droit" : Les 40 qui font le futur du droit.

• L'IA dans les facultés de Droit : la révolution est en marche.




LES HABITANTS

Membres

PROFESSIONNELS DU DROIT

Solutions

Formateurs