Génération Y
Samuel Ivanier (38 ans), Directeur juridique
Génération Z
Anna-Mariia Voloshchuk (24 ans), Juriste.
Samuel Ivanier : « Cette question de différence "générationnelle" s’est posée à nous pendant nos derniers recrutements, post covid, qui ont été une vraie galère, il faut le dire ! Moi-même et la personne responsable des RH avons été surpris par l’écart monumental entre les candidat(e)s que nous recevions en visio (posé(e)s, sérieux(se) etc.) et les mêmes candidats quand nous les rencontrions en présentiel sur site... C’était "Dr Jekyill et Mister Hyde", tant le changement était flagrant ! Je pense que c’est une génération qui a été en grande partie formée en distanciel, et cela se voit : il y a eu un impact sur le relationnel, ils en ont perdu l’habitude je pense...
Une fois recruté, c’est plus une histoire de personnalité. Sur les trois juristes avec lesquelles je travaille au sein de ma DJ (tous de la génération Z) si deux ont une personnalité identiques, la troisième est différente, en étant plus orientée "marketing".
C’est une génération qui aime l’immédiateté de l’info, et pour cela s’est super, mais c’est plus difficile quand c’est une histoire de réseaux sociaux et de likes... il faut savoir se recentrer sur le fond du travail.
Je pense aussi que cette génération manque de patience... lls ont un problème avec la gestion de la "frustration" sur le plan professionnel, quand ils n’arrivent pas à ce qu’ils voudraient, cela les impacte émotionnellement jusqu’à leur pourrir la santé...
Cela est peut-être lié à une question d’estime de soi, en tout cas une forme d’arrogance qu’ils frôlent souvent...
Il est même possible que les directions juridiques fassent le choix de "by-passer" la génération Z en augmentant leur budget pour embaucher des juristes plus expérimentés... ll appartiendra à ceux de la génération Z de se réadapter en se rendant compte qu’on peut se passer d’eux. »
Anna-Mariia Voloshchuk : « Oui j’avoue que j’ai dû faire l’effort de me calmer sur ces questions d’immédiateté et d’arrogance !
Cela peut être dû au fait que, comme Samuel l’a mentionné, pendant le Covid nous étions seuls, enfermés dans nos coins, il fallait faire preuve de patience, d’où la nécessité d’obtenir des réponses à mes questions rapidement afin de pouvoir me consacrer à mes tâches tout de suite et obtenir des résultats instantanés. Cela peut également être dû à l’environnement numérique et à la facilité d’accès à l’information, qui peuvent contribuer à des attentes élevées pour exécuter les tâches rapidement.
Le feedback de mon manager concernant mon arrogance qui pourrait être perçue comme immature et non professionnelle m’ont encouragée à évoluer et à me remettre en question. Je me suis rendue compte que certains projets et tâches demandent du temps et de la patience pour être menés à bien. Il faut aussi penser au travail des autres, surtout à celui de mon manager qui est le directeur juridique et qui a bien d’autres projets et problèmes à gérer que de répondre à mes questions toutes les dix minutes.
Il était difficile d’accepter que le monde ne tournait pas autour de nous, jeunes juristes qui venions d’entrer dans l’entreprise, et il fallait l’accepter pour faire le travail sans prendre les choses trop à cœur... »
Samuel Ivanier : « Et de mon côté, cela m’a poussé à changer en tant que manager, en accordant plus de temps d’adaptation, et en travaillant beaucoup sur la qualité de vie personnelle et professionnelle.
J’ai aussi réfléchi à leur liberté et leur autonomie : ils en ont besoin... sans qu’on s’éloigne trop d’eux. »
Anna-Mariia Voloshchuk : « Oui nous avons besoin que notre liberté soit encadrée.
Lorsque nous disposons de tant de liberté et d’autonomie, nos responsabilités restent les mêmes et nous essayons de partir dans tous les sens dans notre vie professionnelle dans l’accomplissement de nos tâches quotidiennes. Sans encadrement, la frustration et le stress s’accumulent, nous ne pouvons plus gérer, nous commençons à faire des erreurs, et dans le monde d’entreprise, cela signifie perdre du temps et de l’argent.
En tant que représentant de la génération Z, cet encadrement m’apprend à être plus structurée et organisée, tant sur le plan professionnel que personnel. Je suis capable de mieux gérer mon temps, mais surtout d’apprendre mon métier en voyant la vision du travail à travers le cadre posé par mon manager. »
Samuel Ivanier : « En réalité, je travaille comme ça depuis 15 ans, quelque soit la génération. Je me suis tout simplement demandé comment moi j’aurais aimé être managé.
Quand je suis en entretien, je pose volontairement des questions techniques difficiles, non pas pour les piéger mais pour voir leur rapport à l’échec, voir comment ils savent réagir face à leur erreur... c’est important pour mon service.
Cela étant, un point sur lequel j’ai changé c’est que j’ai appris à prendre en compte l’aspect émotionnel, affectif, dans mes rapports avec la nouvelle génération. C’est extrêmement important pour eux, ils fonctionnent à ça, il faut le prendre en compte. Je suis devenu plus patient... et moins rigide ! »
🤔 De quelle génération faites-vous partie ?
Les années de délimitation des générations varient selon les sources...
Nous avons pour notre part retenu celles-ci :
Génération X : Si vous êtes nés entre 1960 et 1980
Génération Y : si vous êtes nés entre 1980 et 1995
Génération Z : pour celles et ceux nés/nées après 1995.
Quand on parle relations de travail, on parle Management, nouvelles façons de collaborer, nouvelles formations... Autant de réflexions qui alimentent le Congrès annuel des RDV des Transformations du droit en octobre 2023 avec notamment un Village des Trajectoires professionnelles. Lecteurs du Village de la Justice, vous y êtes tous conviés !