Les mesures exceptionnelles préventives et protectrices adoptées par des décrets gouvernementaux [1] , le prolongement de l’état d’urgence [2] et la proclamation du couvre-feu (partie l) par le président de la république [3] et l’interdiction de circulation [4], les arrêtés ministériels et les circulaires [5], les actes et les décisions administratives édictées par les administrations publiques et les collectivités locales [6], constituent l’ensemble de l’arsenal et du dispositif juridique ayant pour objet de lutter, d’une part, contre l’expansion de la sphère du COVID-19 et de prévenir la possibilité d’une augmentation vertigineuse des cas contaminés.
De ce fait, ce décalogue juridique, conformément aux règles du droit administratif en particulier, consiste, donc, à maintenir un ordre public sanitaire afin de remédier à une situation d’insalubrité publique, ce qui dénote les manifestations voire même les concrétisations de la notion des prérogatives de puissance publique.
Toutefois, étant des mesures ayant une dimension « exceptionnelle » et « exorbitante » susceptible d’aliéner l’essence même de certains droits et libertés, dans quelle mesure ces décisions possèdent un caractère qualifié de « raisonnable » ?
L’idée de relier et d’associer la notion des prérogatives ou encore des mesures de police administrative à celle du « raisonnable », semble être, pour une première réflexion et constatation, paradoxale. Mais, malgré ce caractère antagoniste de l’association de ces deux notions susmentionnées, un rapport de complémentarité et d’interaction se noue.
Etant définit comme étant « un standard » [7] , le raisonnable consiste, tout d’abord, à jauger [8] et juger [9], ensuite, l’action administrative ; il referme en substance les idées de « proportionnalité », « raisonnabilité temporelle » [10], la décision à caractère et contenu raisonnable ou encore « décision raisonnable » [11] et « le comportement raisonnable » [12] ; il constitue, également, un instrument susceptible « d’apprécier » [13] l’essence et le bien-fondé de l’agissement et de l’intervention de l’administration notamment à l’instar d’un acte administratif unilatéral.
Cependant, en tenant compte de la particularité de certaines circonstances de l’époque et de lieu, l’autorité administrative dispose d’une certaine liberté en matière de la protection de l’ordre public ; elle cherche, désormais, à instaurer une action administrative plus efficace, plus optimale voire même raisonnable.
« Raisonnable », c’est toujours, par rapport au but et objectif à atteindre [14]. Est, encore, « raisonnable » l’action administrative intervenant dans un moment adéquat [15].
De ce fait, là où le maintien de l’ordre public, tel la salubrité publique, se voit menacé, l’autorité administrative, sous peine d’engager sa responsabilité, est tenue, avant la prise de décision, d’établir « un examen particulier, sérieux et complet » [16] des circonstances du temps, de prendre les mesures nécessaires, opérantes et opportunes et d’agir, par la suite, en temps raisonnable.
S’inscrivant dans cette démarche, compte tenu de l’optique de l’instauration d’un contrôle effectif de l’action administrative, le standard du raisonnable désigne, à ce stade, un véritable sanctuaire où le juge administratif peut, d’une part, « mesurer les comportements et les situations » [17] et il impose à l’autorité administrative d’édicter les mesures de police réputées indispensables et adéquates [18] dans « le délai le plus court possible » [19] pour préserver l’ordre public contre les troubles ou encore face à « un péril grave résultant d’une situation particulièrement dangereuse » [20]. Il incombe, par conséquent, à l’Administration d’agir avec « rapidité » [21].