Contrefaçon de marque : critère d’appréciation du risque de confusion.

Par Edith Lagarde-Bellec, Avocat.

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Explorer : # risque de confusion # contrefaçon de marque # propriété intellectuelle # consommateur moyen

Par un arrêt du 25 mars 2014, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rappelle que la contrefaçon de marque s’apprécie au regard de l’impression d’ensemble donnée par le signe et l’image qu’en a gardée en mémoire le consommateur d’attention moyenne.

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Par un arrêt du 25 mars 2014, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a rappelé le principe selon lequel la contrefaçon s’apprécie par rapport aux ressemblances d’ensemble et précisé le critère d’appréciation de la contrefaçon de marque tenant au risque de confusion dans l’esprit du consommateur. (Cass. Com., 25 mars 2014, n°13-13.690)

L’affaire soumise à la Cour opposait une société, titulaire de la marque verbale « lézard graphique » et de la marque semi-figurative « lézard » accompagnée de la représentation d’un lézard de couleur verte, à une autre société, titulaire de la marque semi-figurative « studio lézard » accompagnée d’un dessin représentant un lézard stylisé, déposée postérieurement.

Il semble important ici de préciser que les lézards figurant sur chacune des marques semi-figuratives, bien que différents dans leurs représentations comme dans leurs proportions, se trouvaient dans la même position.

Par arrêt du 18 décembre 2012, la Cour d’appel de Poitiers a écarté tout risque de confusion au motif que les noms, les couleurs et les représentations du lézard différaient.

Au visa des articles L.711-4 et L.711-3 du Code de la propriété intellectuelle, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, reprochant à la Cour d’appel de s’être déterminée au seul vu des différences relevées entre les signes, sans rechercher si les ressemblances existantes n’étaient pas de nature à créer un risque de confusion pour un consommateur d’attention moyenne n’ayant pas simultanément sous les yeux les deux marques.

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle le principe d’appréciation globale du risque de confusion (1) et en précise les contours (2).

1. En matière de propriété intellectuelle, il est de principe que la contrefaçon s’apprécie par rapport aux ressemblances d’ensemble et non aux différences de détails. (Cass. Com., 4 janv. 1982, Ann. propr. ind., p.244)

Il ne suffit donc pas de modifier certains éléments, d’ajouter des détails, de changer les couleurs d’un signe déposé à titre de marque pour rendre un signe original et échapper à la contrefaçon.

Ce principe adopté par la Cour de cassation, est conforme à la position de la Cour de Justice des Communautés Européennes, qui, par trois arrêts fondamentaux, a fixé sa jurisprudence : la contrefaçon s’apprécie au regard de l’impression d’ensemble donnée par un signe. (CJCE, 11 nov. 1997, aff. C-251/95, Sabel ; 29 sept. 1998, aff. Canon ; 22 juin 1999, aff. C-342/97, Lloyd)

En effet, comme l’a souligné la Juridiction Européenne, le consommateur moyen perçoit une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails.

Décortiquer les différents éléments d’une marque ne permet donc pas d’apprécier son caractère distinctif pour le consommateur moyen et, en conséquence, conduirait à une appréciation erronée du risque de confusion.

Or, en l’espèce, la Cour d’appel de Poitiers s’était bornée à relever les différences qui, selon elle, empêchait tout risque de confusion.

Faisant application du principe établi, la Cour de cassation ne pouvait que censurer cette décision, rappelant qu’il ne suffisait pas au Juges du fond de relever des différences, encore leur fallait-il rechercher si les ressemblances existantes ne créaient pas un risque de confusion.

2. Allant plus loin, la Cour de cassation précise le critère d’appréciation du risque de confusion.

Dans son arrêt Lloyd, la Cour de Justice des Communautés Européennes considère qu’il faut apprécier les signes tels que le consommateur d’attention moyenne les perçoit et en garde l’image, de façon nécessairement imparfaite, en mémoire. (Op. cit.)

C’est bien cette position que suit la Cour de cassation en rappelant que le consommateur d’attention moyenne n’a pas simultanément les deux signes sous les yeux.

Pour la Cour de cassation, l’appréciation du risque de confusion doit donc se faire non pas par la simple comparaison des deux marques, mais en imaginant l’image d’ensemble qu’en a gardée en mémoire le consommateur d’attention moyenne.

L’arrêt du 25 mars 2014 a donc le mérite de rappeler clairement la méthode d’appréciation de la contrefaçon tenant au risque de confusion dans l’esprit du public.

Il rappelle également qu’il est indispensable de mener une recherche d’antériorité sérieuse avant d’adopter un signe distinctif, tant la méthode globale d’appréciation protège largement les titulaires de marques contre des signes d’apparence semblable.

Edith Lagarde-Bellec,

Avocat à la Cour

www.lagardebellec-avocats.fr

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