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MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 10:44
de nox
j'attends avec impatience les premières décisions relatives à la garantie de vices cachés ou de non conformité

sinon si c'est un contrat, l'officier public et le procureur (eventuellement) seraient ils des tiers au mariage ou des parties (je pense notamment à la présence nécessaire de l'OP )?

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 11:10
de Mon ego et moi
nox a écrit :j'attends avec impatience les premières décisions relatives à la garantie de vices cachés ou de non conformité


Ou d'erreur sur une qualité substantielle ? :D

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 11:23
de Tenshintai
Je ne peux qu'abonder dans le sens d'Hervé.

Le fait est que le mariage est un contrat, certes de nature particulière, mais un contrat tout de même.

Pour s'en convaincre il suffit de relire le tout premier article le concernant :

article 144 : "L'homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant 18 ans révolus".

Les articles suivants emploient d'ailleurs les même termes.

L'histoire du mariage, mais surtout ses effets sont particuliers, c'est pourquoi son formalisme est si particulier.

D'ailleurs, la vente immobilière fait également intervenir un officier public, personne n'est conteste la qualification de contrat pour autant.

=> Nox
La question de la garantie des vices cachés et de non-conformité est propre à la vente et aux contrats de prestations de service. elle n'a donc pas vocation à se poser dans le cadre du mariage.


L'application des articles 9 et 16 du Code Civil me semble hors de propos.

C'est oublier que les parties se sont délibéremment mises d'accord sur ce qui allait constitué pour elles une qualité essentielle de leur union.

Rien n'a été imposé à l'autre : ni la qualité essentielle, ni le fait de demeurer vierge (en tout cas dans le cas qui sert de support à ce débat)

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 11:45
de nox
Enfin, bon, quand on contracte la varicelle, on ne signe pas de contrat avec le virus...

sinon je suis d'accord sur votre remarque concernant le vice caché, encore que pour la non conformité, il me semble que cela s'applique aux prestations de service.

Bref, c'est un contrat tellement spécial qu'il sort du cadre de la théorie pure des contrats...

Re: Contrat et virginité

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 12:03
de Camille
Bonjour,
Cette histoire est un peu effarante...
busbecq a écrit :Peut-on faire dépendre un consentement de toute exigence quant à la personne avec laquelle on contracte?

Vous êtes en train de me dire que je n'ai pas le droit de choisir ma future compagne en fonction de la couleur de ses yeux, de ses cheveux, de son tour de taille et de poitrine, et bien d'autres détails encore que la décence m'interdit de préciser... et qu'il faudrait que je puise mes "arguments" dans une liste dûment certifiée et publiée sous la forme d'un texte de loi ?
Mieux, que je remplisse un questionnaire en cochant les cases idoines et que je le fasse valider par un juge pour vérifier que mes raisons personnelles sont bien conformes à l'esprit républicain avant de passer devant monsieur le maire ?
Ben dites donc, ça promet...
(et pourquoi pas des dossiers de candidatures anonymisés, sans photo donc, et on ouvrirait les enveloppes devant huissier avec sélection par un jury de spécialistes ?)

busbecq a écrit :Puis-je exiger que ma femme soit excisée? Je ne la force pas à se faire exciser, bien sûr, je suis un laïc convaincu et un défenseur du droit des femmes. J'avertis simplement que si je découvre lors de la nuit noce qu'elle n'est pas excisée, je cours au TGI de Lille faire annuler mon mariage.
C'est une condition absolument essentielle pour moi.
L'article 180 ne me force pas à en indiquer les raisons.

Non, vous ne pourriez pas, selon moi. Tel que vous le présentez ici, vous vous feriez "renvoyer dans vos buts" et probablement sèchement.
Sauf...
si vous aviez clairement exprimé cette exigence à votre future compagne, que vous lui aviez clairement posé la question, que vous lui aviez clairement fait comprendre l'importance que vous y attachiez ET qu'elle vous ait menti délibérément ET en toute connaissance de cause.
Ni la viriginité ni l'excision ne sont, au sens du droit français, des conditions sous-entendues pour contracter un mariage ni suffisantes si elles n'ont été exprimées qu'à une tierce personne autre. Donc, un juge ne pourra pas suivre ce genre d'argumentation.

Ici, le mari n'a pas eu gain de cause parce qu'il n'a découvert qu'après coup un point qui le chagrinait et parce que, dans son esprit, c'était une condition sine qua none, mais parce que, apparemment, ils en avaient discuté clairement au préalable et qu'il y a eu tromperie de la part de la dame. Nuance subtile qui a son importance, à mon humble avis. C'est sur le manquement à la confiance réciproque que la juge s'est appuyée, pas sur l'état de (non) virginité lui-même.
La (future) dame pouvait tout aussi bien répondre "et bien, le "hic", mon chéri, c'est que je ne suis plus vierge, alors ? Qu'est-ce qu'on fait ?"



Juste une petite question...

Si les motivations du mari avaient été aussi contraires au droit français aurait-il pu
- passer le barage de son propre avocat qui aurait pu mieux le conseiller ;
- passer le barrage de la mise en état par un magistrat qui a rendu une ordonnance de clôture ;
- passer le barrage du Ministère public, consulté par la juge, et qui a déclaré s'en remettre à la justice ;
- passer le barrage des deux avocats (si j'ai bien compris) qui ont défendu madame et qui n'ont pas contesté le bien fondé de la demande. Mieux ! Ils ont demandé l'exécution provisoire... ;
- passer le barrage, apparemment, d'un deuxième tour au Ministère public, consulté par la juge avant de rendre sa décision publique ;
- passer le barrage du procureur, qui ne vient d'interjeter appel qu'à la demande pressante de sa hiérarchie ;
- passer le barrage du procureur, qui vient seulement de déposer un référé en extrême urgence (jugement rendu le 1er avril...) pour s'opposer à l'exécution provisoire (qu'on avait un peu oubliée dans la bagarre)...


Autre question accessoire :
En prévision du questionnaire évoqué ci-dessus, plutôt que de me citer quelques exemples de motifs indéfendables, ne pourrait-on pas plutôt m'établir une liste exhaustive de motifs qui le seraient, défendables, sur les "qualités essentielles de la personne" (si on suppose qu'il doit s'agir de qualités intrinsèques et immuables et non d'une perception personnelle), sachant - si j'ai tout bien compris - qu'il faudra en éliminer tout motif d'ordre racial, religieux, homophobe, machiste, inégalitaire, portant sur le physique de la personne, sa sexualité, son état de fortune, etc., etc.,...
Inutile d'aborder le problème d'un adulte incapable puisque le cas est déjà prévu par ailleurs dans le code.

On me dit qu'il faudrait changer l'article 180. Je pressens des débats houleux au Parlement...
(et espérons qu'on n'assistera pas à des hiatus à la Robert-André Vivien, comme lors d'un débat à l'Assemblée sur le classement des films X)...
:D


Au fait, très anecdotiquement, aux dernières nouvelles, l'odieux "intégriste musulman machiste et rétrograde", qui aurait abusivement profité de l'article 180 par dévoyement machiavélique de son objet, se prénommerait François...

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 12:18
de Hervé
Tenshintaï vous m'avez coupé l'herbe sous le pied avec l'exemple immobilier sur la présence d'un OP à un contrat ;)

Je maintiens, le mariage est peut être un contrat particulier, très particulier, mais est-ce que ça lui fait perdre la qualité de contrat pour autant ??? Si on dit que le cheval est un animal doté d'une crinière et d'une longue queue, qu'on coupe la queue et la crinière du cheval, est-ce qu'il perd sa qualité intrinsèque de cheval ?? Pas gagné hein... ;)

Mais je ne vois toujours pas ce que le mariage serait s'il n'était pas un contrat. MEEM, une institution, en droit, concrètement, c'est quoi ? On revient à la question que je posais: le mariage, ce serait comme le Parlement ou la Présidence de la République ??

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 12:43
de busbecq
Camille, je mets sur le compte d'un humour débridé votre propension à caricaturer la position de vos interlocuteurs et vos insinuations de fin de message.

Une liste n'est pas a priori scandaleuse en soi. La loi précise bien que l'on ne peut faire de discrimination quant à la race, la religion, le sexe... La loi établit donc déjà des listes. Pour le reste, il est a priori permis de discriminer. Je pense qu'il n'est pas mauvais que la liberté d'appréciation du juge soit parfois encadrée. Ca évite des dérives.

A vous suivre donc, et dans la mesure où tout le monde est prévenu, je peux donc annuler le contrat de travail de ma secrétaire parce qu'elle n'est pas vierge, et que je lui avais signifié avant son embauche, et qu'elle m'avait dit qu'elle l'était ?

Je peux aussi l'annuler parce que je ne supporte que les blondes, et que j'avais dit avant de l'embaucher qu'il fallait qu'elle se teigne, chose qu'elle avait acceptée ?

Puis-je obtenir l'annulation de mon contrat de mariage parce que j'ai découvert que le deuxième prénom de ma femme est Marie, alors que j'avais dit à ma femme, qui avait acquiéscé, qu'un prénom d'une telle origine ne serait pas correct dans ma famille?

Dans les trois cas, je le peux, car il n'y a pas atteinte à l'ordre public?

Je peux donc tout exiger de mon partenaire au contrat. Et dans la mesure où il l'accepte, au moins formellement, le juge n'a plus aucun contrôle?

Vous aussi vous vivez dans le monde merveilleux du contrat dans lequel tous les partenaires contractuels sont de force égale et jouissent de la pleine liberté de contracter aux conditions et exigence qu'ils décident, dans lequel le juge n'a pour seule mission que de contrôler l'exécution du contrat tel que l'ont voulu les parties?

Alors si tel est le cas, votre position se tient. Je considère quant à moi que c'est loin d'être le cas, et que le juge doit pouvoir contrôler les conditions et exigences fixées dans le contrat ou quant à la personne, ne serait-ce que pour protéger le plus faible.

Quant à l'exigence en cause, je considère qu'elle relève du plus intime, et qu'on devrait pouvoir, sans conséquence, ne pas avoir à en justifier. Je pense que le respect de la vie privée, et de la dignité de la personne, tels que posés en principe aux articles 9 et 16, c'est aussi cela. Et que ce respect est plus fort que la liberté contractuelle.

Vous êtes libres d'avoir une opinion différente. Sans carricaturer celle des autres.

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 12:55
de Hervé
Le problème est à mon avis que la qualité essentielle doit être jugée à l'aune du contrat concerné.

Dans le cas d'un contrat de travail, le sexe (et son changement comme dans une brève d'hier sur le VJ) n'es tpas une qualité essentielle. Mais dans le mariage, il me semble que ça peut l'être ;)

Pourquoi cette différence ? Peut être parce que travailler avec quelqu'un, ce n'est pas comme vivre avec quelqu'un, avoir des enfants avec quelqu'un, s'engager intimement et profondément avec quelqu'un (comme il me semble que le mariage l'est, mais peut être suis-je un tantinet naïf... :D).

Du coup, le parallèle avec un contrat de travail me semble faussée dès le départ.

Par ailleurs, dresser une liste objective des qualités que doit réunir un mari ou une femme me semble totalement illusoire parce que personnellement, je ne pense pas avoir les mêmes attentes que Nemo, Tenshintaï, Aiki ou MEEM (pour ne citer que des hommes, mais la réciproque côté femmes me semble tout aussi vrai hein ;)).

Qu'on veuille éviter des dérives, soit. Mais ces dérives sont déjà encadrées: les bonnes moeurs et l'ordre publique. Est-ce que ces limites sont suffisantes ? Ca me semble une question plus pertinente. Mais ma réponse est trouvée (en tout cas pour le moment): oui. Pourquoi ? C'est tout simple: le mariage est un acte (allez, je ne reprends pas le terme contrat pour ne pas polluer le raisonnement, mais je maintiens par ailleurs hein) qui touche à l'intime. De ce fait, je ne souhaite pas avoir une épouse qui répondrait à des critères préformatés par des députés et des sénateurs avec qui je n'ai potentiellement rien en commun pour ce qui touche à la personne (âge, situation sociale, situation financière, ambition personnelle, ambition professionnelle etc etc).

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 13:01
de Mon ego et moi
Hervé a écrit :Mais je ne vois toujours pas ce que le mariage serait s'il n'était pas un contrat. MEEM, une institution, en droit, concrètement, c'est quoi ? On revient à la question que je posais: le mariage, ce serait comme le Parlement ou la Présidence de la République ??


Non, ce n'est pas pareil, on a d'un côté une institution de droit privé que garantit l'Etat, de l'autre les Institutions de la République, ses organes en quelque sorte. Mais pour trouver des paroles plus authentiques que celles des doctrinaires que nous avons tous plus ou moins appris à être, j'ai trouvé ceci :

Un site commun aux ministères de la Justice et de la Santé a écrit :"Le mariage est l’acte public et solennel par lequel un homme et une femme s’engagent l’un envers l’autre dans la durée, devant et envers la société, pour fonder ensemble un foyer. En se mariant, les époux font ensemble une double démarche. Ils acceptent et reconnaissent l’institution du mariage et la loi commune qui la régit, mais en retour, ils demandent à la société de reconnaître l’existence et la valeur de leur engagement mutuel et de leur assurer la protection de la loi.

Le mariage civil n’est pas une formalité administrative. Il s’agit avant tout d’un acte juridique qui suppose la réunion d’un certain nombre de conditions posées par le Code civil. Il suppose la constitution d’un dossier et l’accomplissement d’un certain nombre de formalités.

Dès lors, si le mariage est une fête, il reste avant tout un engagement qui suppose une préparation, à la fois entre les époux eux-mêmes et entre les époux et l’officier de l’état civil.

Sur le plan symbolique, le mariage signifie l’entrée dans la norme et la reconnaissance d’un statut social. Il reste aujourd’hui le seul mode d’engagement qui permet d’inscrire une relation de couple dans le temps et plus précisément, de la rattacher à une histoire familiale. Il est un projet à renforcer chaque jour, car ponctué par une série d’étapes inhérentes à la vie de couple."


Ce qui n'empêche pas cette institution de revêtir certaines caractéristiques qu'on retrouve dans le contrat, notamment quant au règles du consentement, quant à certaines obligations réciproques des époux. Mais le fin juriste que vous êtes se sera lui-même déjà interrogé sur le besoin des rédacteurs du Code Civil, jamais contredits sur ce point, de placer le mariage dans un titre propre, inclus dans le livre consacré aux personnes, et non pas dans l'un de ceux qui traitent du contrat.

MessagePosté: Mer 11 Juin 2008 13:07
de Hervé
Ben, moi, j'ai du mal à voir une différence claire avec un contrat dans le descriptif cité... Que le contrat soit érigé au rang "d'institution" et donc qu'on veuille protéger plus particulièrement ce contrat sur un certain nombre de points, je peux le comprendre. Mais qu'on exclut la qualification de contrat me semble délicat. En effet, un autre argument peut aller dans le sens de ce que j'avance.

Si les époux ne souhaitent pas être soumis au régime matrimonial par défaut, ils peuvent convenir d'un contrat de mariage déterminant leurs relations pendant la durée du mariage... :roll: