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La règlementation de la découverte d’un trésor. Par Arthur Humez.
Parution : mercredi 3 avril 2024
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La définition d’un trésor à proprement parler est déjà régi par le Code civil en tant que tel. Mais qu’en est-il de sa propriété , de sa fiscalité ainsi que de sa façon d’être découvert ?

La qualification du trésor.

Le trésor est qualifié et régi par l’article 716 du code civil. Ce dernier dispose que :

« La propriété d’un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds ; si le trésor est trouvé dans le fonds d’autrui, il appartient pour moitié à celui qui l’a découvert, et pour l’autre moitié au propriétaire du fonds.
Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard
 ».

La Cour de Cassation [1] a jugé que seules peuvent recevoir la qualification de trésor :

« les choses corporelles matériellement dissociables du fonds dans lequel elles ont été trouvées et, comme telles, susceptibles d’appropriation ».

En désignant une chose corporelle matériellement dissociable du fond, la Cour de cassation exclut donc les immeubles, pour elle, cela désigne une chose meuble, susceptible d’être déplacée.

La propriété du trésor à sa découverte.

Selon l’article 716 du Code Civil :

« La propriété d’un trésor appartient à celui qui le trouve dans son propre fonds ; si le trésor est trouvé dans le fonds d’autrui, il appartient pour moitié à celui qui l’a découvert, et pour l’autre moitié au propriétaire du fonds ».

En d’autres termes, si le trésor découvert est sur le terrain d’autrui, il appartiendra pour moitié à celui qui le trouve et pour moitié au propriétaire du terrain.

S’il y a un démembrement de la propriété en usufruit et nue-propriété, alors ce sera au nu-propriétaire de revendiquer la part du trésor, celui détenant l’usufruit ne pourra pas la revendiquer.

Si le trésor que la personne a trouvé est sur son propre terrain et que personne ne peut justifier de sa propriété, bien sûr qu’il lui appartiendra totalement.

Le Code Civil poursuit dans ce même article en son alinéa 2 :

« Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard ».

Il faut bien noter que celui qui trouve le trésor s’appelle communément "l’inventeur".

La découverte d’un trésor peut être l’œuvre de plusieurs inventeurs comme l’a jugé la Cour de Cassation si chacun a directement participé à sa mise à jour matérielle [2] :

« Lorsque la découverte du trésor procède directement d’une action collective de plusieurs personnes, chacune doit être qualifiée d’inventeur ».

Il faut aussi retenir de cet arrêt que la qualité d’employeur ne donne aucun droit sur un trésor découvert par un ouvrier.
De plus, on doit apporter la preuve que l’on a participé à la découverte du trésor pour pouvoir être qualifié de co-inventeur et prétendre à des droits sur la valeur de ce trésor. L’inventeur qui s’empare de la totalité du trésor est coupable de vol vis-à-vis du propriétaire du fonds.

Un tiers peut revendiquer la propriété d’un trésor, mais à condition qu’ils soient en mesure de justifier son droit de propriété sur l’objet d’ouvert et d’en faire la preuve de son identification.

La manière de la découverte du trésor.

L’article 716 du Code Civil alinéa 2 pose la manière dont il faut découvrir le trésor afin d’en jouir de la propriété :

« Le trésor est toute chose cachée ou enfouie sur laquelle personne ne peut justifier sa propriété, et qui est découverte par le pur effet du hasard ».

Ainsi, le trésor doit avoir été découvert par le « pur effet du hasard », ce qui voudrait dire autrement que la recherche active d’un trésor ne pourra pas conduire à une qualification de ce type, car elle n’est pas le fruit d’un pur hasard.

Le Conseil d’État [3] a déjà jugé que les découvertes réalisées au moyen d’un détecteur ne peuvent être reconnues comme fortuites, puisque les découvertes fortuites sont :

« nécessairement des découvertes involontaires nées de travaux ou d’un fait quelconque » alors que « l’utilisation d’un détecteur de métaux démontre la volonté de trouver des objets ».

Donc, selon le Conseil d’État, l’utilisation d’un détecteur de métaux exclut toute notion de hasard dans la recherche du trésor et donc on ne pourra pas le qualifier ainsi.

La déclaration du trésor et sa fiscalité.

Le Code du Patrimoine dispose que la personne qui découvre des vestiges ou objets et le propriétaire de l’immeuble où ils ont été découverts doivent en faire la déclaration immédiate au maire de la commune [4].

Cette déclaration est une déclaration de découverte à adresser au maire, avec une copie au préfet. La déclaration de découvert doit être datée et signée par les différentes parties (informateur, propriétaire du terrain et inventeur).

Le propriétaire de l’immeuble est responsable de la conservation provisoire du « trésor ».

S’il a été remis à un tiers, ce dernier assumera la même responsabilité.

L’autorité administrative peut visiter les lieux où les découvertes ont été faites ainsi que les locaux où le ou les objets ont été déposés. L’autorité administrative peut prescrire toutes les mesures utiles pour la conservation des objets trouvés.

La découverte d’un trésor n’est pas assimilable à un revenu imposable, ainsi, la personne qui a trouvé le trésor échappera à toutes impositions fiscales.

Cependant, si le trésor contient des pièces que l’inventeur souhaite vendre, il devra s’acquitter d’une taxe équivalente à 11,5 % du montant de la vente avec en plus à payer une commission de l’intermédiaire.

Dans le cadre d’une donation à un héritier, la fiscalité applicable est la même que pour une donation classique. La fiscalité sera appliquée avec des abattements modulables selon le degré de parenté de l’inventeur et du bénéficiaire.

Arthur Humez, Chargé d’études juridiques

[1Cass, civ, 1ere ch, 5 juillet 2017, n°16-19.340.

[2Cass,Civ, 1ere ch, 16 Juin 2021, n°19-21.567.

[3CE, 6eme ch, 2 Novembre 2022, n°446688.

[4Article L.531-14 du Code du Patrimoine.