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Le trafic international de stupéfiants au Maroc : livraison surveillée, extradition et transfèrement. Par Rabii Chekkouri, Avocat.
Parution : vendredi 2 février 2024
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Porte du continent africain, le Maroc constitue un point de transit de plusieurs individus de différentes nationalités. De ce fait, certains transitaires se font interpeller en raison d’un soupçon de trafic de produits stupéfiants, soit dans une situation de flagrance ou encore dans le cadre d’une recherche internationale.

Le trafic international de stupéfiants représente la majeure partie des affaires pénales à caractère international qui engorgent les juridictions nationales marocaines. Ainsi, un certain nombre de dossiers comportent quelques particularités, en l’occurrence d’ordre factuel et/ou procédural.

Comment sont interpellés les suspects en matière de trafic international de stupéfiants ?

La livraison surveillée.

Le Code de procédure pénale marocain ainsi que les conventions bilatérales de coopération judiciaire, notamment avec certains États européens, prévoient la possibilité d’une livraison surveillée.

Il s’agit, en effet, d’une livraison de produits illicites à destination d’un territoire étranger effectuée sous le contrôle des autorités compétentes (police judiciaire/douanes). Cette méthode permet l’identification de l’acheminement de ladite livraison afin de confondre les auteurs et complices impliqués.

Cette procédure fait l’objet d’une autorisation spéciale de la part du procureur général du Roi près la Cour d’appel compétente.

En dehors du cas précité, certaines interpellations peuvent intervenir dans le cadre d’une fouille douanière ou encore dans le cadre d’un mandat d’arrêt international émis par le Maroc ou par un État étranger.

Le mandat d’arrêt émis par les autorités marocaines.

Dans l’hypothèse d’une interpellation au Maroc sur le fondement d’un mandat d’arrêt décerné par les autorités judiciaires marocaines, le suspect, quelle que soit sa nationalité, sera jugé par les juridictions nationales en vertu des textes répressifs internes.

Le mandat international, dans ce cas, a donc permis l’appréhension d’un fugitif recherché par les autorités marocaines en raison d’un soupçon de commission d’au moins un acte matériel sur le territoire marocain lié au trafic international de stupéfiants. Il s’agit de l’application du principe de territorialité de la loi pénale, indépendamment de la nationalité de l’intéressé.

Le mandat d’arrêt international émis par un État étranger.

Lors du passage frontalier, une interpellation peut être effectuée dès l’apparition d’un message d’Interpol de localisation et d’arrestation (notice rouge).

En effet, l’arrestation de l’intéressé intervient dans le cadre d’une recherche internationale permettant éventuellement, selon les cas, le déclenchement d’une procédure d’extradition.

Ainsi, le Maroc ne peut en aucun cas extrader un ressortissant marocain, même binational. Par conséquent, seuls les étrangers pourront faire l’objet d’une extradition vers l’État requérant.

Partant, le suspect de nationalité marocaine pourra faire l’objet de poursuites par les autorités nationales après la réception d’une dénonciation officielle par l’État requérant.

L’intéressé serait alors jugé en vertu du Dahir portant loi relative au trafic de produits stupéfiants. Selon la législation marocaine, cette infraction est considérée comme un délit et fait l’objet de certaines dérogations procédurales, notamment pour la libération conditionnelle des personnes condamnées.

Quid du transfèrement international ?

Le mis en cause, qu’il soit étranger ou binational, pourra bénéficier d’un transfèrement international, c’est-à-dire la possibilité de purger sa peine privative de liberté dans son pays d’origine (sous réserve de l’existence d’une Convention bilatérale en la matière).

Dans le cadre du transfèrement international des personnes condamnées pour trafic de stupéfiants, certaines conditions particulières doivent être remplies, notamment concernant le contentieux douanier. En effet, dans plusieurs cas d’espèce, l’administration des douanes se constitue comme partie au procès et réclame des sommes importantes au titre d’amende douanière.

Ainsi, parmi les conditions requises par les conventions bilatérales sur le transfèrement, le règlement intégral des amendes. Sauf que dans certains cas, les amendes peuvent atteindre des millions de dirhams, ce qui peut faire éventuellement l’objet d’un dégrèvement total ou partiel en vertu d’un accord amiable avec l’administration des douanes.

Rabii Chekkouri Avocat au Barreau de Rabat www.rabiichekkouri.com