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L’audience de règlement amiable et le contentieux des baux commerciaux. Par Benoit Henry, Avocat.
Parution : mardi 28 novembre 2023
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Dans les instances introduites à compter du 1er novembre 2023 devant le tribunal judiciaire, les parties et le juge pourront utiliser deux nouveaux modes de résolution amiable des litiges : l’audience de règlement amiable (article 1 et 2 du décret) et la césure du procès (article 3 du décret).
On peut présumer que la procédure de règlement amiable, qui prévoit l’intervention d’un tiers magistrat, pourra trouver, dans ce domaine, un terrain d’élection.

Dans la présentation à la presse de son plan d’action issu des Etats généraux de la justice, le ministre de la Justice, Monsieur le Garde des Sceaux Dupond-Moretti avait affirmé vouloir lancer une véritable politique de l’amiable marquée notamment par la création de deux nouveaux modes de résolution amiable des litiges.

C’est chose faite.

Le décret n°2023-686 du 29 juillet 2023 inscrit dans le Code de procédure civile l’audience de règlement amiable et la césure du procès.

L’idée est qu’en démultipliant l’offre, les parties, leurs avocats, les juges s’en saisissent plus volontiers, non pour réguler les flux, mais pour parvenir à des décisions de qualité.

1- L’Audience de Règlement Amiable (ARA).

Pour l’audience de règlement amiable, il s’agit de permettre aux parties, à tout moment de la procédure et pour des droits dont elles ont la libre disposition, de se retrouver devant un juge pour régler amiablement tout ou partie de leur litige.

L’audience de règlement amiable, dont le champ d’application reste à préciser, ouvre la possibilité au juge à la demande des parties ou d’office mais avec l’accord de celles-ci, de désigner un juge chargé de présider l’audience de règlement amiable auquel il revient d’en définir les modalités.

Ce processus peut intervenir en procédure orale comme écrite, l’article 785 CPC est modifié et ajoute la possibilité pour le JME (Juge de la Mise en Etat) de désigner un juge pour présider l’Audience de règlement amiable conformément à l‘article 750-2 auquel il renvoie.

Les parties peuvent être assistées dans ce processus par les personnes énumérées à l’article 762 CPC dont un avocat.

Les échanges des parties durant l’audience de règlement amiable sont soumis à la confidentialité.

A l’issue de celle-ci, les parties peuvent demander au juge désigné de constater leurs accords par procès-verbal de conciliation signé des parties dont un extrait valant titre exécutoire pourra leur être délivré conformément aux articles 130 et 131, al. 1er CPC.

En cas d’échec de la mesure ou d’absence de signature d’un procès-verbal de conciliation, les parties sont renvoyées devant le juge saisi.

2- Le contentieux des baux commerciaux.

Les dispositions nouvelles sont insérées au titre Ier du livre II du Code de procédure civile traitant des dispositions particulières au tribunal judiciaire [1] et sont incluses dans le sous-titre Ier relatif aux dispositions communes.

Le règlement amiable est donc a priori applicable au tribunal judiciaire dans son ensemble puisqu’il fait partie des dispositions communes à toutes les formations juridictionnelles de ce tribunal.

Toutefois, le décret n° 2023-686 du 29 juillet 2023 prend par ailleurs soin de préciser, en modifiant les articles 785 et 803 du CPC et en créant un article 836-2 du CPC, que le juge de la mise en état, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection saisi en référé peuvent décider que les parties seront convoquées à une audience de règlement amiable, on peut se demander si ces modifications de texte excluent du champ d’application les autres fonctions spécialisées pour lesquelles aucune modification n’est faite, et notamment le président du tribunal judiciaire ou le juge qui le remplace agissant en tant que juge des loyers commerciaux, institué par l’article R145-23 du Code de commerce.

On pourrait le penser, d’autant que la procédure spécifique suivie devant ce juge spécialisé est régie par les articles R145-23 à R145-33 du Code de commerce, auxquels les parties doivent se conformer impérativement sans pouvoir les aménager ou y déroger.

On peut néanmoins avancer, compte tenu de l’insertion du règlement amiable dans le sous-titre Ier du Code de procédure civile relatif aux dispositions communes au tribunal judiciaire, il s’agit de dispositions générales dont le juge des loyers peut, lui aussi, faire usage pour tout le contentieux des baux commerciaux porté devant le tribunal judiciaire et notamment, pour toutes les questions relevant du statut des baux commerciaux et, plus encore, pour les litiges relatifs aux obligations générales des parties.

Le contentieux général portant sur les différentes obligations du bailleur et du preneur (étendue de l’assiette du bail, obligations de délivrance, réparations, charges, etc..) reste un terrain favorable à la conciliation ou à la médiation.

On peut présumer que cette procédure de règlement amiable, qui prévoit l’intervention d’un tiers magistrat, pourra trouver, dans ce domaine, un terrain d’élection.

Source.

Décr. n° 2023-686 du 29 juill. 2023, portant mesures favorisant le règlement amiable des litiges devant le tribunal judiciaire (JO 30 juill.).

Benoit Henry Avocat Spécialiste de la Procédure d'Appel [->http://www.reseau-recamier.fr/] Président du Réseau Récamier Membre de Gemme-Médiation https://www.facebook.com/ReseauRecamier/

[1CPC, art. 750 à CPC, art. 852.