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Fixation et augmentation du loyer dans le bail à usage d’habitation : que dit la loi ivoirienne ? Par Koffi Victor Brou, Juriste.
Parution : jeudi 7 septembre 2023
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Certains bailleurs ou propriétaires fixent et augmentent le montant du loyer au mépris des règles sur le bail à usage d’habitation. Voici ce que les locataires ou preneurs doivent savoir.

La relation contractuelle liant un bailleur ou un propriétaire d’immeuble ou local à un locataire ou preneur, est régie par les lois n°2018-575 du 13 juin 2018 relative au bail à usage d’habitation et n°2019-576 du 26 juin 2019 instituant Code de la construction et de l’habitat. L’article 1 de la première loi précitée dispose que :« On entend par bail à usage d’habitation ou bail, contrat qui consiste à mettre en location un immeuble ou un local servant d’habitation ».

Il ressort de cette disposition que le bail à usage d’habitation est un contrat par lequel une personne physique ou morale appelée bailleur ou propriétaire décide de mettre à la disposition d’une autre personne physique ou morale, appelée locataire ou preneur, un immeuble ou local, servant d’habitation, moyennant une contrepartie financière appelée loyer. Ce contrat est conclu intuitu personae, par écrit et fait obligatoirement l’objet d’enregistrement auprès des administrations fiscales. Il met à la charge du locataire le paiement d’une somme d’argent appelée loyer au bailleur ou propriétaire d’immeuble ou local. Le loyer représente un élément important dans le bail à usage d’habitation d’autant plus que son non-paiement, peut justifier la rupture du contrat bail à usage d’habitation. Il est donc important de préciser que le montant du loyer doit être fixé en respectant certaines règles en la matière.

Les règles gouvernant la fixation du prix du loyer.

Pour le locataire, le loyer est est un élément du passif, car il s’agit d’une somme d’argent qui sort de son patrimoine. En revanche, c’est un élément de l’actif du bailleur, en qu’il s’agit d’une somme d’argent entrant dans son patrimoine. De ce fait, le locataire a intérêt à connaître les règles relatives au loyer afin de s’opposer aux attitudes illégales du bailleur. A propos de la la fixation du prix du loyer, l’article 15 de la loi de juin 2018 sur le bail à usage d’habitation énonce que :« Le montant du loyer doit être fixé en tenant compte de la valeur du marché de l’immeuble ou du local ». Cette disposition met en évidence l’élément essentiel dans la fixation du loyer. Il s’agit de la valeur de l’immeuble ou du local.

En fixant le prix du loyer, le bailleur en compte de ce que vaut le local. Autrement dit la qualité interne et externe de la maison. Cependant, dans la pratique, il est déplorable de constater que certains bailleurs fixent le montant du loyer sans respecter les dispositions sur le bail à usage d’habitation, encore moins celles du Code de la construction et de l’habitat. Cette situation alarmante doit cesser car le du loyer doit être proportionnel à la valeur du local pour une logique contractuelle. Bien que la réalité de l’offre et la demande pourrait être un frein à cet équilibre entre le prix du loyer et la valeur du local, il faut nécessairement que cette situation change. En effet, il y a peu de locaux disponibles, mais assez de personnes à la recherche de maisons. Cela joue énormément en faveur des bailleurs à qui plusieurs personnes demandent la conclusion de bail à usage d’habitation.

Pour trouver une solution satisfaisante à déséquilibre contractuel, il est important que s’impliquent les autorités compétentes, qui disposent des moyens appropriés pour effectuer des contrôles afin de régulariser la pratiques illégales dans la relation contractuelle liant le bailleur au preneur. Aussi, devons-nous souligner que les parties au contrat doivent enregistrer le bail à usage d’habitation auprès des autorités compétentes à cet effet pour que celles puissent intervenir convenablement. Il en est de même pour la révision du loyer.

Les règles relatives à la révision du loyer.

Réviser le loyer, c’est soit l’augmenter soit le diminuer. Le premier cas est le plus fréquent.Le législateur désigne l’opération qui consiste à augmenter ou à diminuer le prix du loyer par l’expression "Révision du loyer". Cette révision peut être en "hausse" ou en "baisse" à des conditions bien déterminées. Le bailleur doit mettre au moins un délai de trois (3) ans entre les différentes augmentation. Est révélateur l’article 17 de la loi de juin 2018 sur le bail à usage d’habitation :« Le loyer peut être révisé à la hausse ou à la baisse, tous les trois ans ». Cette même disposition est textuellement reprise par l’article 423 du Code de la construction et de l’habitat. De même, au sens de l’article 455 du même Code, une augmentation qui intervient moins de trois (3) mois après la conclusion ou après le renouvellement du bail de ce bail est considérée comme n’étant jamais intervenue.

Par ailleurs, le projet de la révision du loyer ne doit pas surprendre le locataire. La loi demande au bailleur d’en informer le locataire au moins trois (3) mois avant la date d’effet de ladite augmentation. C’est que indique l’article 18 de la loi sur le bail à usage d’habitation :« La partie qui sollicite une augmentation ou une réduction du loyer doit préalablement notifier son intention à l’autre partie par tout moyen, au moins trois (3) mois avant la date d’effet de ladite augmentation ». Force est de constater que la réalité pratique s’éloigne des textes. Les montants des loyers sont augmentés çà et là en violation des règles. Il est grand temps que ces pratiques cessent, et que les preneurs ou locataires, fassent prévaloir leurs droits devant les juridictions compétentes, tel que recommandé par l’article 17 alinéa 2 de la loi sur le bail à usage d’habitation. Nombreux sont des locataires qui se retrouvent dans cette situation. Ignorant donc leurs droits, ils subissent les augmentations excessives et illégales qui sont souvent des raisons de loyers impayés, permettant ainsi au bailleur d’avoir des créances envers des locataires en position de faiblesse. Une faiblesse, souvent financière. Une faiblesse, souvent due à l’ignorance de leurs droits.

Un homme sans habitation est exposé à d’énormes dangers. Bien que la recherche de profits pécuniaires soit le but principal du bailleur, les règles gouvernant le bail à usage d’habitation doivent être respectées pour un équilibre contractuel et social.

Victor Koffi BROU, Juriste broukovic22@gmail.com victorkoffibrou93@gmail.com
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