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Catastrophe naturelle et relogement d’urgence. Par Charles Merlen, Avocat.
Parution : mardi 28 février 2023
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La loi n°2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles a instauré le principe d’un droit au relogement d’urgence. Ce relogement d’urgence sera indemnisé au titre de la garantie catastrophes naturelles incluse notamment dans les contrats d’assurance habitation.
Un décret et un arrêté du 30 décembre 2022 sont venus fixer les modalités de mise en œuvre de ce droit.

La loi du 13 juillet 1982 a imposé l’insertion d’une garantie catastrophes naturelles dans les contrats multirisque-habitation. Cette garantie prémunit toute personne des conséquences d’un évènement naturel exceptionnel (sécheresse, inondation, cyclone, tremblement de terre…) endommageant son bien.

Face aux conséquences du changement climatique, il est apparu nécessaire de faire évoluer le régime d’indemnisation des catastrophes naturelles

« dont les faiblesses provoquent des situations humaines dramatiques avec des sinistrés qui ne parviennent pas à obtenir l’indemnisation à laquelle ils ont droit » [1].

Sur proposition du Sénat, la loi La loi n°2021-1837 du 28 décembre 2021 relative à l’indemnisation des catastrophes naturelles est venue remodeler le régime de reconnaissance et d’indemnisation des catastrophes naturelles

Pour assurer une prise en charge optimale des sinistrés cette loi a notamment créé un droit au relogement d’urgence garantit par les contrats d’assurance multirisque-habitation

L’article L125-1 du Code des assurances dispose désormais en son alinéa 4 :

« Sont également considérés comme les effets des catastrophes naturelles, au sens du présent chapitre, et pris en charge par le régime de garantie associé les frais de relogement d’urgence des personnes sinistrées dont la résidence principale est rendue impropre à l’habitation pour des raisons de sécurité, de salubrité ou d’hygiène qui résultent de ces dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel. Les modalités de prise en charge de ces frais sont fixées par décret ».

Les modalités de mise en œuvre de ce droit ont été fixées par un décret et un arrêté du 30 décembre 2022 dont nous vous proposons l’étude ci-après. A noter que ces dispositions entreront en vigueur le 1er janvier 2024.

Les conditions de prise en charge des frais de relogement d’urgence.

Les propriétaires occupants, les usufruitiers, les locataires, les sous-locataires et les occupants de bonne foi peuvent bénéficier de la garantie relogement d’urgence. Il faut pour cela que leur résidence principale soit assurée et qu’elle subisse les conséquences d’une catastrophe naturelle [2].

La résidence principale désigne toute habitation qualifiée ainsi par le contrat d’assurance.

Les sinistrés peuvent bénéficier de la garantie relogement d’urgence dans plusieurs hypothèses.

La garantie relogement d’urgence est due lorsque :

- Le logement est rendu impropre à l’habitation pour des raisons de sécurité, de salubrité ou d’hygiène [3] ;

- Des travaux de réparation des dommages causés par une catastrophe naturelle rendent le bien inhabitable [4] ;

- L’habitation est rendue inaccessible de telle sorte que l’assureur ne peut constater les dommages subis [5] Cette situation se rencontre notamment lorsque des personnes évacuées de leur logement ne peuvent dans un premier temps regagner celui-ci.

Concernant les modalités de prise en charge, l’indemnité ne sera versée qu’après transmission par l’assuré des justificatifs prouvant l’existence et le montant des dépenses engagées [6]. Les personnes ayant été relogées suite à une catastrophe naturelle doivent donc faire l’avance des frais de relogement et ne sont remboursées qu’après transmission à leur assureur des justificatifs (note d’hôtel, facture ou quittance).

Néanmoins le contrat d’assurance peut prévoir une prise en charge des frais de relogement d’urgence sans avance de la part de la personne sinistrée [7]. Le Code des assurances laisse ainsi la possibilité aux compagnies d’assurance d’inclure dans leur contrat une garantie supplémentaire assurant un relogement sans avance de frais.

L’évaluation des frais de relogement d’urgence.

L’évaluation des frais de relogement d’urgence se fait différemment selon deux périodes.

Dans un premier temps la prise en charge des frais de logement repose sur un forfait. Le montant minimum de ce forfait est de 80 euros par jour et par personne [8].

Ce montant de 80 euros n’est qu’un minimum s’imposant aux compagnies d’assurance. Chaque contrat d’assurance multirisque habitation peut prévoir une garantie supplémentaire et aller au-delà de ce seuil.

Dans un second temps, et si les conséquences de la catastrophe naturelle rendent nécessaire un relogement au-delà d’une période de 5 jours, le montant pris en charge dépendra du bien sinistré [9].

Pour les propriétaires et les personnes logées gratuitement la prise en charge du relogement correspond à la valeur locative de l’habitation sinistrée. Si la personne sinistrée et son assureur ne tombent pas d’accord sur le montant de cette valeur locative, celle-ci peut être déterminée par un expert.

Concernant les locataires la prise en charge du relogement est égale au montant des loyers payés.

L’indemnité de frais de relogement est versée pendant l’indisponibilité du bien et dans une limite de 6 mois à compter du premier jour du relogement.

Si le bien occupé par un locataire est détruit par la catastrophe naturelle, le contrat de bail prend automatiquement fin. Dans ces circonstances l’assurance doit prendre en charge le surcout engendré par le relogement dans une limite de trois mois de loyers.

Il convient de relever que les frais de relogement d’urgence correspondent aux seuls frais relatifs à l’hébergement des sinistrés et ne couvrent pas les frais indirects [10].

En toute logique une personne sinistrée ne peut cumuler le bénéfice de la garantie relogement d’urgence avec une aide financière accordée par l’Etat pour permettre un relogement [11].

Charles Merlen, Avocat Barreau de Lille www.charles-merlen-avocat.fr

[1Exposé des motifs de la proposition de loi n°3688.

[2Article D125-4 du Code des Assurances.

[3Article L125-1 alinéa 3 du Code des Assurances.

[4Article D125-4-1 Code des assurances.

[5Article D125-4-1 Code des assurances.

[6Article D125-4-3 du Code des Assurances.

[7Article D125-4-3 alinéa 2 du Code des assurances.

[8Article A 125-5 du Code des Assurances.

[9Article A 125-2 du Code des Assurances.

[10Article D125-4 du Code des assurances.

[11Article D125-4-4 du Code des Assurances.