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Licenciement économique et CSP : l’information individuelle du salarié est requise. Par Xavier Berjot, Avocat.
Parution : lundi 9 janvier 2023
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En cas de licenciement économique, lorsque l’employeur est tenu de proposer le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) au salarié, celui-ci doit avoir connaissance du motif du licenciement avant d’adhérer au CSP.
Cette information doit être individuelle, rappelle la Cour de cassation dans deux arrêts.
Cass. soc. 23-11-2022 n° 21-17.483 et n° 21-17.486.

1. Rappels sur le dispositif du CSP.

Dans les entreprises de moins de 1 000 salariés n’appartenant pas à un groupe d’au moins 1 000 salariés, l’employeur est tenu de proposer un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) aux salariés visés par un licenciement économique.

L’adhésion du salarié au CSP, qui doit intervenir dans un délai de 21 jours, emporte rupture du contrat de travail « du commun accord des parties » [1].

Cette rupture du contrat de travail ouvre droit à l’indemnité de licenciement.

S’agissant du préavis, seuls les salariés qui ont moins d’un an d’ancienneté perçoivent la totalité de leur indemnité de préavis.

Les salariés ayant plus d’un an d’ancienneté ne la perçoivent pas si elle est inférieure à 3 mois de salaire.

Si l’indemnité de préavis est supérieure à 3 mois de salaire, ils en perçoivent seulement la partie dépassant les 3 mois.

En effet, les 3 premiers mois d’indemnité de préavis non perçus par le salarié justifiant de plus d’un an d’ancienneté sont versés à Pôle emploi par l’employeur, afin de financer le dispositif du CSP.

En dépit de la rupture du contrat de travail « d’un commun accord », résultant de l’adhésion au CSP, l’employeur doit nécessairement motiver la mesure de licenciement économique.

La Cour de cassation juge que l’employeur doit en énoncer le motif économique [2] :
- soit dans le document écrit d’information sur le CSP remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement,
- soit dans la lettre qu’il est tenu d’adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d’envoi de la lettre de licenciement,
- soit encore, lorsqu’il n’est pas possible à l’employeur d’envoyer cette lettre avant l’acceptation par le salarié du CSP, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation.

2. Exigences liées à l’information du salarié.

Dans les arrêts du 23 novembre 2022, la Cour de cassation rappelle que le document écrit énonçant le motif économique de la rupture du contrat de travail que l’employeur doit adresser au salarié adhérant à un CSP doit lui être remis personnellement.

A défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En l’espèce, les salariés avaient été informés du motif économique par affichage, dans l’entreprise, de la note économique sur le projet de licenciement collectif qui précisait les raisons de la réorganisation et les postes supprimés.

Pour la Cour de cassation, cette information n’est pas satisfaisante dans la mesure où elle ne présente pas un caractère individuel.

A l’inverse, la Cour de cassation a pu juger que l’employeur remplit son obligation d’informer le salarié, avant son adhésion au CSP, du motif économique de la rupture du contrat de travail, dès lors que ce dernier a été destinataire d’un e-mail, comportant le compte-rendu d’une réunion avec le délégué du personnel relative au licenciement pour motif économique envisagé [3].

L’employeur doit cependant faire preuve de prudence et il est recommandé d’exposer le motif économique de la rupture dans la lettre de convocation à l’entretien préalable à l’éventuel licenciement.

Dans les procédures de licenciement imposant la tenue d’un entretien préalable, cette solution permet d’assurer une information individuelle du salarié avant son adhésion au CSP.

Certains employeurs préfèrent remettre au salarié, lors de l’entretien préalable, un document contenant l’ensemble de la motivation de la rupture.

Toutefois, cette solution n’est pas suffisamment sécurisante.

En effet, il se peut que le salarié refuse de recevoir le document en mains propres contre décharge.

Or, la Cour de cassation [4] considère que, sauf fraude, le seul refus du salarié auquel il est proposé d’accepter un CSP de se faire remettre en mains propres le document de notification du motif économique de la rupture du contrat de travail ne permet pas de considérer que l’employeur a satisfait à son obligation de notifier ces motifs avant toute acceptation par le salarié du CSP.

Xavier Berjot Avocat Associé Sancy Avocats [->xberjot@sancy-avocats.com] [->https://bit.ly/sancy-avocats] Twitter: https://twitter.com/XBerjot Facebook: https://www.facebook.com/SancyAvocats LinkedIn: https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

[1C. trav. art. L1233-67.

[2Cass. soc. 22-9-2015 n° 14-16.218.

[3Cass. soc. 13-6-2018 n° 16-17.865.

[4Cass. soc. 31-5-2017 n° 16-11.096.