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La prise en compte du contrat d’insertion dans les critères d’ordre de licenciement. Par Myriam Adjerad et Clara Galdeano, Avocats.
Parution : lundi 29 août 2022
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Lorsque l’employeur procède à un licenciement individuel pour motif économique, il prend notamment en compte, dans le choix du salarié concerné par cette mesure, le critère tenant à la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés, ce qui inclut le contrat d’insertion (revenu minimum d’activité en l’espèce) [1].

Un salarié avait été engagé par contrat d’insertion revenu minimum d’activité. Ce dispositif n’existe plus à l’heure actuelle, mais a été remplacé par des équivalents (ex : contrat unique d’insertion).

Il a été licencié pour motif économique et contestait notamment le respect des règles relatives à l’ordre de licenciements. Il sollicitait des dommages et intérêts pour inobservation de ces règles et a été débouté par la Cour d’appel aux motifs que l’employeur n’était pas tenu de prendre en compte le fait qu’il ait été engagé dans le cadre d’un contrat d’insertion revenu minimum d’activité, « qui ne correspond pas à une situation de handicap » [2].

Cet arrêt a été cassé et annulé par la Cour de cassation sur ce point.

« Lorsque l’employeur procède à un licenciement collectif pour motif économique et en l’absence de convention ou accord collectif de travail applicable, il définit les critères retenus pour fixer l’ordre des licenciements, après consultation du comité social et économique ».

Ces critères prennent notamment en compte :

« La situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile, notamment celle des personnes handicapées et des salariés âgés » [3].

Alors que le contrat d’insertion revenu minimum d’activité est un « dispositif ayant pour objet de faciliter l’insertion sociale et professionnelle des personnes rencontrant des difficultés particulières d’accès à l’emploi », l’employeur a considéré qu’il ne s’agissait pas d’une situation de handicap et que cette donnée n’avait pas à être prise en compte dans l’application des critères d’ordre.

Contrat d’insertion ne signifie pas situation de handicap. Pourtant, l’employeur aurait dû tenir compte du contrat d’insertion lors de l’application des critères d’ordre de licenciement.

Ce dispositif entre purement et simplement dans la définition du critère d’ordre de la situation des salariés qui présentent des caractéristiques sociales rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. L’adverbe « notamment  » qui vise les personnes en situation de handicap et les salariés âgés n’en fait que des exemples et ne constitue pas une liste limitative.

Pour appliquer ou écarter le critère d’ordre de réinsertion difficile, l’employeur doit élargir son champ d’appréciation et tenir compte de toutes les situations dans lesquelles les salariés sont amenés à rencontrer des difficultés d’accès à l’emploi : le contrat d’insertion en fait partie.

La Cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée, devra en l’espèce statuer à nouveau sur la situation de l’intéressé et prendre en compte son embauche sous contrat d’insertion pour rendre sa décision.

Myriam Adjerad Clara Galdeano Adjerad avocats, Avocats au Barreau de Lyon [->contact@adjeradavocats.fr] https://fr.linkedin.com/in/myriam-adjerad-473903121

[1Cass. soc., 12 juil. 2022, n° 20-23.651.

[2CA Aix-en-Provence, 14 juin 2019, n° 17/02993.

[3Art. L1233-5 c. trav.