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Dirigeants d’entreprise : quelle garantie en cas de perte d’emploi ? GSC ou Unedic ? Par Florence Monteille et Jennifer Kieffer, Avocates.
Parution : jeudi 16 décembre 2021
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De nos jours, nombreux sont les dirigeants d’entreprise (mandataires sociaux, travailleurs salariés ou non-salariés, entrepreneurs individuels, créateurs et repreneurs d’entreprise) qui souhaitent anticiper les risques en cas de perte d’emploi.

Et pour cause, les dirigeants d’entreprise ne sont que rarement pris en charge par l’Unedic (Union Nationale interprofessionnelle pour l’Emploi Dans l’Industrie et le Commerce) et perdre leur situation peut ainsi avoir pour eux des conséquences considérables.

Ces derniers ont alors tout intérêt à vérifier en amont, leur situation au regard de l’Unedic et le cas échéant, à protéger leurs revenus en souscrivant une assurance volontaire, appelée assurance « garantie sociale du chef d’entreprise » (GSC) qui leur permettra de disposer de revenus en cas de perte involontaire d’emploi.

Toutefois, il peut arriver qu’un dirigeant d’entreprise ait à choisir entre l’Unedic, dans le cas où il remplirait les conditions pour en bénéficier et la GSC à laquelle il aurait souscrit par mesure de précaution.

Le présent article a donc pour objectif de vous rappeler :
- D’une part, les conditions à remplir pour bénéficier d’indemnités journalières de la GSC ou de l’Unedic,
- D’autre part, les différences principales en termes de garantie de chacun de ces deux dispositifs.

I. Quelles sont les conditions pour prétendre au versement d’indemnités journalières versées par la GSC ou l’Unedic ?

La GSC.

La GSC est destinée à tous les chefs d’entreprise et dirigeants qui n’ont pas droit au régime d’assurance chômage du Pôle Emploi. En pratique, il s’agit des dirigeants qui n’ont pas de contrat de travail selon les critères d’appréciation du Pôle Emploi (absence de lien de subordination).

Pour pouvoir bénéficier d’indemnités journalières GCS en cas de perte d’emploi, le dirigeant d’entreprise doit remplir les conditions cumulatives suivantes :
- Être affilié à la GSC : l’entreprise qui souscrit au régime GSC doit être adhérente à un syndicat patronal signataire de la convention qui gère la garantie sociale du chef d’entreprise (MEDEF, CGPME, UPA). Par ailleurs, concernant le dirigeant celui-ci ne doit pas pouvoir prétendre avant au moins 5 ans, au moment de l’affiliation à la GSC, à la liquidation de la retraite de base de sécurité sociale à taux plein ;
- Justifier d’une perte involontaire d’emploi ;
- Justifier être à la recherche d’un emploi (inscription au Pôle emploi) ;
- Ne pas percevoir d’indemnisation de la part de l’Unedic.

L’Unedic.

Du côté de l’Unedic, pour pouvoir prétendre à une indemnisation, il convient de remplir également un certain nombre de conditions, elles aussi cumulatives, à savoir :
- Justifier d’une perte d’emploi (telles qu’un licenciement (quel que soit le motif), une fin de CDD, une rupture conventionnelle, une démission considérée comme légitime ;
- Être inscrit au Pôle emploi ;
- Ne pas avoir atteint l’âge légal de la retraite ;
- Habiter en France (Métropole et DOM) ;
- Avoir travaillé au moins 4 mois au cours des 24 derniers mois pour les plus de 53 ans ou 6 mois au cours des 24 derniers mois pour les moins de 53 ans. Ces 4 ou 6 mois ne sont pas nécessairement continus et peuvent avoir été réalisés chez plusieurs employeurs ;
- Être dans un lien de subordination juridique à l’égard de son ancien employeur (existence d’un contrat de travail).

La dernière condition relative à l’existence du lien de subordination juridique, est parfois la plus difficile à remplir notamment pour les dirigeants d’entreprise qui cumulent en plus de leur mandat social, un contrat de travail. Ces-derniers peuvent bénéficier de l’Unedic à la condition que le contrat de travail ait été réellement exercé dans un lien de subordination à l’égard de l’entreprise.

L’analyse de l’existence ou non du lien de subordination relève du cas par cas, et s’avère souvent assez technique. C’est la raison pour laquelle, en cas de doute sur la situation professionnelle, il est recommandé de prendre attache avec un avocat spécialisé en droit du travail, qui pourra analyser les critères d’appréciation et vérifier la recevabilité de la demande d’indemnisation Unedic. Ce dernier est également en mesure d’interroger l’administration, à savoir le Pôle emploi, par le biais de ce que l’on appelle un « rescrit » (interrogation) afin de pouvoir faire reconnaître officiellement votre situation.

II. Quelles sont les principales différences de garanties entre la GSC et l’Unedic ?

Ces deux dispositifs possèdent de nombreuses différences. Seules les plus importantes seront évoquées ici.

Sur la durée de cotisations :

Dans le cadre de la GSC, une franchise de 12 mois est appliquée à compter de la signature du bulletin d’adhésion. En d’autres termes, il convient de cotiser pendant 12 mois avant de pouvoir percevoir l’indemnité journalière de la GSC.

Dans le cadre de l’Unedic, et depuis la réforme de 2021, il faut avoir travaillé 130 jours ou 910 heures (soit environ 6 mois) sur une période de 24 mois (ou 36 mois pour les 53 ans et plus) pour pouvoir ouvrir ou recharger des droits à l’assurance chômage. Cette durée s’applique aux personnes perdant un emploi à compter du 1er décembre 2021.

Sur la formule de calcul de l’indemnité journalière :

Dans le cadre de la GSC, le revenu de référence correspond au revenu annuel professionnel net fiscal mentionné dans le certificat d’affiliation adressé au dirigeant et qui est revu chaque année civile. C’est donc à partir de ce revenu de référence que sera réalisé le calcul de l’indemnité journalière.

La base de calcul est ensuite la suivante = 70% sur les tranches A et B, et 55% sur la tranche C, plafonnés à 329.088 € (soit 8 fois le PASS). Ex : pour un revenu annuel professionnel de 42.00 0€ brut ( tranche A), le montant de l’indemnité est de : 42.000 € * 70%, soit 29.000 €.

Dans le cadre de l’Unedic, et depuis la réforme de 2021, le salaire de référence correspond à la rémunération moyenne brute sur 24 mois pour les moins de 53 ans / à la rémunération moyenne brute sur 36 mois pour les plus de 53 ans (incluant les primes, avantages en nature, gratifications). La formule de calcul de l’ARE (allocation de retour à l’emploi) est ensuite la suivante : 57% du salaire de référence.

Attention, depuis la réforme de 2021, tous les jours sont pris en compte au cours de cette période de 24 mois ( ou 36 mois) même les jours non travaillés entre les contrats de travail, ce qui peut avoir pour conséquence un abaissement de l’assiette de calcul de l’indemnité. Cependant, certains événements particuliers (congé maternité, arrêt maladie de plus de 15 jours hors contrat, etc.) sont retirés de la durée.

En cas de licenciement pour motif économique, le salarié a la possibilité d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle (CSP) pendant 12 mois, ce qui lui donne le droit à une allocation plus élevée égale à 75% du salaire de référence au lieu des 57% classique.

Sur la durée de versement de l’indemnité journalière :

Pour la GSC, l’indemnité journalière est versée durant 12 mois. Il est toutefois possible d’opter pour une durée de 18 ou 24 mois à l’issue de la 1ère année. Cette option est mentionnée dans le certificat d’affiliation.

S’agissant de l’Unedic, la durée d’indemnisation est de 24 mois pour les salariés âgés de moins de 53 ans, 30 mois pour ceux âgés de 53 ou 54 ans, 36 mois pour ceux âgés de 55 ans ou plus.

Sur la variation du montant de l’indemnité :

Pour la GSC, le montant de l’indemnité reste constant, contrairement au dispositif de l’UNEDIC, ce qui constitue un atout non négligeable, pour les personnes ayant un salaire de référence élevé.

En effet, depuis la réforme de l’assurance chômage, il existe dorénavant une dégressivité de l’indemnité journalière avec un coefficient de dégressivité (égal à 0,7 points avec un maximum de 30%), à partir du 7ème mois d’indemnisation, pour les demandeurs d’emploi ayant moins de 57 ans et dont le salaire de référence mensuel est égal ou supérieur à 4.500 € brut.

Sur la franchise / la carence :

Dans le cadre de la GSC, une franchise de 30 jours est appliquée, à compter de l’état de perte d’activité (perte involontaire du mandat ou cession/liquidation judiciaire par exemple).

Dans le cadre de l’Unedic, les délais de carence sont plus nombreux puisqu’il existe :
- Un délai de carence « spécifique » afférent aux indemnités de rupture perçues dans le cadre de la rupture du contrat de travail, pour la part qui excède le minimum prévu par la loi (avec un plafond fixé à 150 jours et à 75 jours en cas de rupture du contrat pour motif économique) ;
- Un délai de carence qui est fonction du nombre de congés payés ;
- Un délai d’attente incompressible de 7 jours (sauf si celui-ci a déjà été appliqué dans les 12 derniers mois).

III. En conclusion :

Le régime de la GSC et celui de l’Unedic sont donc bien différents l’un de l’autre. Si chacun de ces dispositifs contient à la fois des avantages et des inconvénients, seule une analyse au cas par cas de la situation du dirigeant peut permettre d’opter de manière opportune pour l’un ou pour l’autre, lorsque qu’un choix peut être opéré.

D’autres spécificités propres à chacun de ces organismes existent, et nous vous invitons à vous rapprocher d’un avocat spécialisé en droit du travail, afin d’être conseiller au mieux sur ce sujet particulièrement important et qui devient de plus en plus technique au fil des nombreuses réformes.

Florence Monteille et Jennifer Kieffer LM Avocats