Village de la Justice www.village-justice.com

Burn-out, harcèlement, mal-être au travail : comment gérer sa sortie de l’entreprise ? Par Xavier Berjot, Avocat.
Parution : mardi 8 septembre 2020
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/burn-out-harcelement-mal-etre-travail-comment-gerer-sortie-entreprise,36459.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Lorsque la relation de travail se détériore entre l’employeur et le salarié, il n’est parfois plus possible, pour ce dernier, de reprendre son poste. Son état de santé psychologique et/ou physique est si dégradé que la perspective de retourner dans l’entreprise lui devient insupportable. Quelles sont ses solutions de sortie ?

1/ la prise d’acte de la rupture du contrat de travail.

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail est l’acte selon lequel le salarié met fin au contrat en cas de manquements suffisamment graves de l’employeur qui empêchent la poursuite de la relation contractuelle [1].

Le plus souvent, la prise d’acte est matérialisée par une lettre recommandée avec AR, que le salarié adresse à l’employeur et qui mentionne les motifs sur lesquels elle s’appuie.

La prise d’acte a pour effet de rompre immédiatement le contrat de travail, sans préavis.

Ce mode de rupture présente toutefois un inconvénient majeur.

En effet, la prise d’acte n’ouvre pas droit à l’assurance-chômage, sauf si le salarié parvient à la faire requalifier en licenciement sans cause réelle et sérieuse devant le Conseil de prud’hommes.

Or, s’il perd son procès, la prise d’acte est requalifiée en démission.

Le salarié ne bénéficie donc d’aucune indemnisation, sauf éventuellement à l’issue de 2 ou 3 ans de procédure, et s’il gagne le litige...

Pour cette raison, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail est une solution généralement déconseillée par les praticiens du droit du travail.

2/ La résiliation judiciaire du contrat de travail.

La résiliation judiciaire peut être définie comme l’action par laquelle le salarié demande au Conseil de prud’hommes de prononcer la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur pour des motifs graves empêchant la poursuite de la relation de travail [2].

En cas de résiliation judiciaire du contrat de travail, la date d’effet de la résiliation ne peut être fixée qu’au jour de la décision qui la prononce (il faut compter parfois, ici encore, 2 à 3 ans de procédure…).

De la même manière que la prise d’acte, la résiliation judiciaire est un pari très risqué.

En effet, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si le juge adopte les arguments du salarié.

En revanche, si le juge estime que les manquements reprochés à l’employeur ne justifient pas la rupture du contrat de travail, il doit débouter le salarié de sa demande, ce qui implique la poursuite du contrat de travail.

Par ailleurs, le salarié est contraint de rester à son poste jusqu’à l’issue de la procédure, ce qui est souvent intenable psychologiquement.

3/ L’abandon de poste.

Certains salariés, lorsqu’ils se sentent désespérés, abandonnent purement et simplement leur poste en espérant faire l’objet d’un licenciement qui leur permettra de bénéficier de l’assurance-chômage.

Dans une telle situation, l’employeur peut en effet procéder au licenciement pour faute grave du salarié, ce qui permet à ce dernier de s’inscrire à Pôle Emploi.

Cependant, il convient de préciser que le licenciement pour faute grave prive le salarié de son indemnité de licenciement et de son indemnité de préavis.

La faute grave peut donc être très pénalisante pour le salarié, surtout si son ancienneté est importante.

Par ailleurs, en présence d’un abandon de poste, l’employeur n’a aucune obligation de licencier le salarié.

Il peut, en effet, se contenter de suspendre le versement de son salaire, et ce sans limite de temps.

Le salarié se retrouve donc dans une véritable impasse car il devient prisonnier de son contrat de travail sans percevoir aucun salaire.

4/ Le licenciement pour inaptitude.

L’inaptitude médicale peut être prononcée par le médecin du travail, dès lors qu’il constate que l’état de santé du salarié est devenu incompatible avec le poste qu’il occupe et qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail n’est possible.

En présence d’un avis d’inaptitude, l’employeur a l’obligation de rechercher un poste de reclassement conforme aux préconisations du médecin du travail.

Si ce dernier a expressément mentionné sur l’avis d’inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que son état de santé fait obstacle à tout reclassement dans un emploi, l’employeur n’est pas tenu de rechercher une solution de reclassement [3].

Le licenciement du salarié est donc possible.

L’inaptitude présente cependant plusieurs inconvénients.

Tout d’abord, le salarié n’a aucune garantie que le médecin du travail prononcera à son sujet un avis d’inaptitude, ce qui peut conduire à une situation de blocage.

Par ailleurs, en matière d’inaptitude, le salarié perd son indemnité de préavis.

C’est uniquement si l’inaptitude du salarié est liée à une maladie professionnelle ou à un accident du travail que celui-ci perçoit une indemnité équivalente au préavis [4].

3/ Le départ négocié.

Les mots « départ négocié » désignent l’accord selon lequel l’employeur et le salarié règlent les conséquences de la rupture du contrat de travail, dans un contexte pré-litigieux.

Sur le plan pratique, en contrepartie d’une indemnité, le salarié renonce à engager une action devant le Conseil de prud’hommes.

Le départ négocié peut prendre différentes formes : rupture conventionnelle suivie ou non d’une transaction, licenciement suivi d’une transaction, licenciement indemnisé au moyen d’une indemnité forfaitaire de conciliation, dommages-intérêts distincts, etc.

Tous ces dispositifs permettent à la fois de rompre le contrat de travail et de bénéficier d’une indemnisation.

Pour un salarié en souffrance, quelle qu’en soit la raison (burn-out, harcèlement, mise au placard, modification du contrat de travail, etc.), le départ négocié est l’option la plus intéressante.

Grâce à l’intervention d’un avocat en droit du travail, le salarié met toutes les chances de son côté pour bénéficier d’une indemnisation maximale.

En effet, un avocat en droit du travail expérimenté sait identifier tous les leviers de négociation nécessaires (surcharge de travail, amplitude horaire majeure, convention de forfait-jours illicite, violation du contrat de travail, etc.).

L’objectif est de bénéficier d’une multitude d’atouts face à l’employeur.

En outre, l’intervention d’un avocat en droit du travail offre au salarié un accompagnement complet : relecture de projets d’emails, validation d’un entretien annuel d’évaluation, conseils sur l’attitude à adopter face à une remarque de l’employeur, etc.

L’employeur est finalement poussé à recourir à son avocat et des négociations peuvent alors s’engager dans un cadre apaisé.

Xavier Berjot Avocat Associé SANCY Avocats [->xberjot@sancy-avocats.com] [->https://bit.ly/sancy-avocats] Twitter : https://twitter.com/XBerjot Facebook : https://www.facebook.com/SancyAvocats LinkedIn : https://fr.linkedin.com/in/xavier-berjot-a254283b

[1Cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-23634.

[2Cass. soc. 26 mars 2014, n° 12-21372 et n° 12-35040.

[3C. trav. art. L.1226-2-1.

[4C. trav. art. L.1226-14.

Comentaires: