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Etat d’urgence sanitaire : que recouvre l’avance sur AJ ouverte aux avocats et comment peuvent-ils en bénéficier ? Par Patrick Lingibé, Avocat.
Parution : jeudi 20 août 2020
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Le décret n° 2020-653 du 29 mai 2020 portant diverses mesures liées à l’état d’urgence sanitaire en matière d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat a réalisé une petite révolution pourtant passée inaperçue.

En effet, ce texte met en place un mécanisme exceptionnel d’avance de prestations d’aide juridictionnelle qui peut être une aide d’appoint pour les avocats intervenant beaucoup dans le secteur dit assisté face à une crise à l’origine épidémique mais qui se mute en crise financière profonde.

Ce décret vient d’être modifié par le décret n° 2020-1001 du 7 août 2020 portant adaptation de la procédure exceptionnelle de demande d’avance en matière d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat et modifiant le décret n° 2020-653 du 29 mai 2020 portant diverses mesures liées à l’état d’urgence sanitaire en matière d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat Ce dernier décret a prorogé les dates d’application de ce dispositif exceptionnel. Le présent article a pour objet d’expliciter cette mécanique que les avocats intéressés pourront utiliser de manière efficiente.

I - Comment soutenir les avocats pour faire face aux conséquences de l’épidémie covid-19 ?

La raison de ce dispositif figure dans l’article 1er du décret qui dispose qu’afin de faire face aux conséquences de la propagation de l’épidémie de covid-19, le versement d’une avance exceptionnelle en matière d’aide juridictionnelle et d’aide à l’intervention de l’avocat peut être effectué selon les modalités prévues par le décret précité. 
 
Cependant, il faut savoir que ce texte trouve sa source dans le travail accompli par les institutions représentatives de la profession d’avocat. En effet, c’est de la profession qu’a germé ce dispositif exceptionnel d’aide financière aux avocats, la chancellerie n’ayant fait que valider le dispositif proposé.

Il y a eu convergence synergique des réflexions des institutions politiques et techniques de la Profession.

Tout d’abord avec Christiane Feral Schuhl, présidente du Conseil national des barreaux, établissement d’utilité publique doté de la personnalité morale chargé de représenter la profession d’avocat auprès des pouvoirs public Elle a demandé à tous le présidents de commission de cet organisme de travailler sur l’impact de la covid-19 sur les travaux. Pour la commission Accès au Droit présidée par Madame le Bâtonnier Bénédicte Mast le projet est devenu « L’impact du Covid 19 sur l’AJ ».

Ensuite, Hélène Fontaine, présidente de la Conférence des bâtonniers et vice-présidente de droit du Conseil national des barreaux, a impliqué fortement l’institution ordinale représentative de province dans les travaux de ce groupe, afin d’apporter des réponses aux barreaux et aux bâtonniers au regard des remontées des difficultés par ces derniers en intégrant l’aspect territorial. La voie de la Conférence a été portée par Madame le bâtonnier Réjane Chaumont, vice-présidente de la Conférence des bâtonniers et présidente de la commission accès au droit et à la justice de la Conférence ainsi que Madame le bâtonnier Zohra Primard, membre du bureau et vice-présidente de la commission accès au droit et à la justice de la Conférence des bâtonniers.

De même, le barreau de Paris n’a pas été en reste dans son implication sous l’impulsion du bâtonnier de Paris Olivier Cousi et de la vice-bâtonnière de Paris Nathalie Roret avec les apports de Marianne Lagrue et Yannick Sala, membres du conseil de l’ordre.

Enfin, l’Union nationale des CARPA (UNCA) présidée par Arnaud de la Brunière, a apporté une aide inestimable sur le plan technique avec son directeur Karim Benamor.

Le travail du groupe de travail interinstitutionnel a commencé le 20 mars 2020.

Après plus de 60 heures de réunions en visioconférence, il en est résulté un travail partagé pertinent commun aux quatre institutions, le travail collectif ayant abouti à une dispositif ingénieux exceptionnel au profit des avocats ainsi que l’indiquait la présidente de la commission accès au droit du Conseil national des barreaux dans son intervention introductive de la réforme opérée lors du webinaire du 19 juin 2020 : « ce dispositif exceptionnel est le fruit de la réflexion d’un groupe de travail resserré, uni efficace, à l’image de ce que sont dorénavant notre profession et nos représentants ».

Comme on le voit donc ce dispositif a été imaginé par la profession d’avocat à travers ses institutions avec la nécessité de trouver des solutions alternatives d’aide financière pour anticiper les conséquences économiques de la crise de Covid-19 qui n’en était à l’époque qu’à ces tous débuts.

C’est l’occasion de constater donc le rôle joué par les institutions professionnelles qui ne sont jamais aussi fortes que lorsqu’elles mènent des travaux communs et partagés et parlent d’une seule voix. Ce dispositif est donc la démonstration effective de l’efficience de l’alchimie des différentes instances politique et technique de notre profession.

II - Créer une alternative au système de provisions déjà prévues ?

Le groupe de travail avait examiné l’option des provisions telles que prévues par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique modifiée. Cependant, ce système a été écarté car il ne répondait pas totalement à la problématique posée.

En premier lieu, les provisions ne fonctionnent que dans l’hypothèse d’une aide juridictionnelle totale. Ce qui veut dire que cela exclut les gardes à vue et autres aides.

En deuxième lieu, les provisions nécessitent une décision préalable d’aide juridictionnelle. Or au regard de la crise sanitaire, il était évident que les décisions ne suivraient pas.

En troisième lieu, les provisions comportent un risque inhérent à la structuration du dispositif qui invalide ce dernier, à avoir :
- Le suivi des provisions se fait mission par mission et donc exigeant un important volume d’écritures ;
- Le risque existe si l’avocat disparaît ou quitte la profession ou encore s’il se voit déchargé de son mandat et remplacé par un avocat qui ne sollicite pas l’aide juridictionnelle ;
Les délais permettaient d’appréhender que le dysfonctionnement opéré par la crise sanitaire liée à la Covid-19 allait être extrêmement long, engendrant un allongement de la durée de la procédure et des délais d’encombrement des juridictions.

Le groupe a donc bon droit refusé de s’orienter vers l’option de la provision et élaboré ainsi le dispositif exceptionnel d’avance d’aide juridictionnelle que nous commentons dans le présent article.

III - La voie incontournable du Bâtonnier : Accord ou avis ?

Il convient de rappeler que la profession d’avocat est organisée par barreau auprès d’un tribunal judiciaire conformément aux dispositions de l’article 15 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

L’article 2 du décret du 29 mai 2020 modifié dispose que ce n’est qu’après l’accord express du bâtonnier, que l’avocat qui souhaite bénéficier de l’avance exceptionnelle formule sa demande auprès de la caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) dont il relève, par tout moyen permettant d’accuser date certaine.

Cependant, au-delà de cette rédaction, il faut analyser cette partie de l’article dans le sens de l’efficience et de l’efficacité du dispositif. En clair, si l’avocat est tenu de respecter scrupuleusement les délais imposés par le décret, l’accord du bâtonnier peut parfaitement être postérieur à la demande formulée par l’avocat. En effet, l’accord du bâtonnier n’est indispensable qu’à la signature de la convention avec la CARPA.

Concrètement, cette lecture efficiente permet ainsi au bâtonnier de statuer au fil de l’eau et en tout état de cause après le 30 septembre 2020, cette date étant la date limite de demande adressée à la CARPA (entre le 8 août 2020 et le 30 septembre 2020).

Il s’agit bien d’un accord express et non d’un avis. Si le Bâtonnier refuse de donner son accord, la demande d’avance formulée par l’avocat ne peut se poursuivre.

Le Bâtonnier est donc la première étape obligée sans laquelle la procédure ne peut pas se poursuivre.

La raison vient du fait que le Bâtonnier est le mieux à même d’apprécier le sérieux du confrère qui sollicite l’avance. Sa mission en l’espèce est bien de s’assurer que les avocats bénéficiaires restent bien dans la sphère de l’aide juridictionnelle.

De plus, il faut préciser qu’en cas de non-paiement, c’est la CARPA, voire dans une certaine mesure le cas échéant l’Ordre, qui devra assurer le remboursement des avances accordées à l’avocat auprès de l’Etat, étant rappelé qu’il s’agit en l’espèce de fonds publics et que les sommes non remboursées ne sont pas opposables à l’Etat.

IV - Quels sont les avocats éligibles au dispositif ?

Le même article 2 précité déploie que le bénéfice de l’avance est ouvert aux avocats à partir d’un critère général auquel se greffent trois exceptions.

Le critère général posé.

Tous les avocat ayant prêté serment avant le 1er janvier 2019 peuvent bénéficier de l’avance à la condition que son cabinet ait réalisé a minima un chiffre d’affaires au titre de la seule activité Aide Juridictionnelle de 6é000 euros hors taxes. Ce chiffre est calculé sur la moyenne des exercices 2018 et 2019.

Les exceptions différenciées en fonction de la date de prestation de serment.

Le décret prévoit trois exceptions au critère général précité en introduisant une variable qui est la date de prestation de serment de l’avocat formulant la demande d’aide.

1ère exception : cas de l’avocat ayant prêté serment entre le 1er janvier 2019 et le 31 mai 2019.

Cet avocat pourra bénéficier du dispositif d’avance à la condition que son cabinet ait réalisé a minima un chiffre d’affaires au titre de la seule activité Aide Juridictionnelle de 3 000 euros hors taxes en 2019.

2ème exception : cas de l’avocat ayant prêté serment entre le 1er juin 2019 et le 23 mars 2020.

Cet avocat pourra bénéficier du dispositif d’avance à la condition que son cabinet ait accompli a minima deux missions au titre de la seule activité Aide Juridictionnelle ou des aides à l’intervention en 2019 et 2020.

Nous pouvons voir dans ce deuxième cas que le critère du chiffre d’affaires laisse la place à une formalité souple, destinée à ouvrir le dispositif d’aide au plus grand nombre de confrères, y compris ceux qui ont effectué peu de missions d’aide juridictionnelle.

3ème exception qui est un cas d’exclusion du dispositif : cas de l’avocat ayant prêté serment après le 23 mars 2020.

Cet avocat ne pourra pas bénéficier du dispositif d’avance.

Tous les avocats ayant prêté serment après le 23 mars 2020 sont totalement exclus du système exception d’avances au titre de l’aide juridictionnelle.

L’excellent tableau réalisé par l’UNCA et reproduit ci-dessous récapitule les conditions d’éligibilité au dispositif de l’avance exceptionnelle AJ :

V - Quel plafonnement pour ce dispositif exceptionnel ?

L’article 2 prévoit un double critère de plafonnement :

D’une part, en fixant un seuil objectif : le montant de l’avance exceptionnelle est plafonné à 10 000 euros par avocat.

D’autre part, en imposant un seuil au regard du chiffres d’affaires propre au cabinet demandant l’aide : le montant de l’avance exceptionnelle ne peut ainsi excéder 25% du montant annuel moyen des rétributions versées à l’avocat concerné au cours des exercices 2018 et 2019 par la CARPA au titre de l’aide juridictionnelle et de l’aide à l’intervention de l’avocat.

Ainsi, un avocat qui exerce par exemple depuis le 1er janvier 2017 et qui a perçu au titre de ses activités dans le domaine de l’aide juridictionnelle et des aides à l’intervention de l’avocat en 2018 45 000 euros et 2019 50 000 euros, aurait un chiffre d’affaires moyen de 47 700 euros hors taxes.

Au regard du deuxième critère précité, il aurait droit théoriquement à une avance maximale autorisée de 11 875 euros, équivalent à 25% de son chiffre d’affaires moyen de 47 700 euros.

Cependant, le premier critère de seuil financier objectif ramènera l’avance maximale dont il peut bénéficier à 10 000 euros,

Cet avocat bénéficiera in fine d’une avance de 10 000 euros.

A noter que s’il a bénéficié de provisions antérieures sur l’Aide Juridictionnelle, celle-ci sera automatiquement déduite de l’avance à laquelle il peut prétendre. Ainsi, si cet avocat a bénéficié du versement d’une provision de 1 000 euros, il ne pourra lui être alloué qu’une aide de 9 000 euros, déduction faite de ladite provision.

VI - Quels sont les modalités et les critères de calcul de l’avance exceptionnelle ?

L’article 2 du décret fixe les modalités et critères de calcul de l’avance exceptionnelle, lesquels sont fondés sur un critère général assortis d’exceptions.

Le cas général posé.

Tous les avocats qui ont prêté serment avant le 1er janvier 2019 ont droit à un avance maximale autorisée correspondant à 25% du chiffre d’affaires hors taxes annuel moyen des rétributions d’aide juridique sur les exercices 2018 et 2019. Ce chiffre d’affaires hors taxes consacré aux activités d’Aide Juridictionnelle doit être a minima de 6 000 euros hors taxes.

En dessous de ce seuil de chiffre d’affaires, aucun dispositif n’est ouvert à l’avocat demandeur. Ce qui est logique car le dispositif ne vise à aider que les avocats consacrant un minimum d’activités au secteur assisté et aux justiciables les plus démunis.

Les trois exceptions différenciées.

1ère situation : l’avocat ayant prêté serment entre le 1er janvier 2019 et le 31 mai 2019.
 
L’article 2 dispose que l’avocat qui se trouve dans ce cas peut bénéficier de l’avance à la condition que son cabinet ait réalisé au moins 3 000 euros hors taxe d’activité au titre de l’aide juridictionnelle et de l’aide à l’intervention de l’avocat en 2019.

A cela se greffe une double condition de seuil.

D’une part, le montant de l’avance exceptionnelle est plafonné à 5 000 euros par avocat.

D’autre part, ce montant ne peut excéder en aucun cas excéder 50% du montant des rétributions versées à l’avocat concerné au cours de l’exercice 2019 par la CARPA au titre de l’aide juridictionnelle et de l’aide à l’intervention de l’avocat.

Ainsi, une avocate qui a prêté serment le 3 mars 2019 et exerce depuis le 1er avril 2019 et qui présente en 2019 un chiffres d’affaires de 40 000 euros pour des rétributions perçus au titre des seules activités liées à l’aide juridictionnelle et à l’aide à l’intervention, aurait droit à une avance maximale autorisée théorique sur le critère du seul pourcentage de 10 000 euros.

Cependant cette somme théorique devrait être ramenée à celle de 5 000 euros, correspondant au critère de plafond fixé par le décret pour l’avocat qui a prêté serment entre le 1er janvier 2019 et le 31 mai 2019.

2ème situation : l’avocat ayant prêté serment entre le 1er juin 2019 et le 23 mars 2020.
 
L’article 2 dispose que l’avocat qui se trouve dans ce cas peut bénéficier de l’avance à la condition que son cabinet ait réalisé au moins deux missions au titre de l’aide juridictionnelle et de l’aide à l’intervention de l’avocat en 2019 ou 2020.

A cela se greffe une condition de seuil : le montant de l’avance exceptionnelle est plafonné à 1 500 euros par avocat.

Ainsi un avocat qui a prêté serment le 1er novembre 2019 et qui exerce depuis le 16 novembre 2019 a perçu uniquement pour l’année 2019 une somme totale de 400 euros au titre de deux interventions en matière de garde à vue, a droit à une avance maximale de 1 500 euros.

Indépendamment du chiffre d’affaires, le dispositif de soutien financier de 1 500 euros s’applique dès lors que l’avocat a effectué deux missions au titre de l’aide juridictionnelle.

3ème situation : l’avocat ayant prêté serment après le 23 mars 2020.
 
Le décret exclu tous les avocats se trouvant dans cette situation et donc aucune avance ne peut être versée pour les raisons déjà indiquées.

L’excellent tableau réalisé par l’UNCA et reproduit ci-dessous récapitule les modalités de calcul de l’avance exceptionnelle AJ :

VII - Quelle est la situation des avocats exerçant en groupement ?

Le décret prévoit que lorsque les avocats exercent dans le cadre d’un groupement, d’une association ou d’une société et que les rétributions au titre de l’aide juridictionnelle ou de l’aide à l’intervention de l’avocat sont versées sur un compte unique ouvert par le groupement, l’association ou la société, l’avance est versée au profit de la structure d’exercice.

Dans cette hypothèse, le versement de l’avance est conditionné à la conclusion d’une convention avec la CARPA, signée par l’ensemble des avocats associés ou membres de la structure d’exercice, prévoyant les modalités de remboursement les engageant solidairement.
 
Le cas de chaque avocat est préalablement analysé et chaque avance est cumulée, le total étant versé sur le compte ouvert pour la structure collective ou associative.

Nous prendrons pour cela l’exemple de trois avocats qui sont associés au sein d’une SELARL.

Me AA a prêté serment en 2000, Me BB le 2 février 2019, Me CC le 2 juillet 2019. Me AA a un eu un chiffre d’affaires lié à ses seules activités d’aide juridictionnelle et à l’intervention d’avocat de 40 000 euros hors taxes pour 2018 et 50 000 euros pour 2019. Me BB a un eu un chiffre d’affaires lié à ses seules activités d’aide juridictionnelle et à l’intervention d’avocat de 3 000 euros hors taxes pour 2019. Me CC a un eu un chiffre d’affaires lié à ses seules activités d’aide juridictionnelle et à l’intervention d’avocat de 1 000 pour 2019.

L’opération consiste à cumuler le chiffre d’affaire réalisé par cabinet afin de déterminer le chiffre d’affaires du cabinet commun, soit :

Pour l’année 2018, le seul chiffre d’affaires de Me AA pour 40 000 euros, étant le seul à avoir effectué des missions au titre de l’aide juridictionnelle en 2018.

Pour l’année 2019, les chiffres d’affaires de Me AA pour 50 000, Me BB pour 3 000 euros et Me CC pour 1 000 euros.

Ce qui donne un chiffre d’affaires moyen du cabinet commun de 93 500 euros (40 000 + 50 000 + 3 000 + 1 000 = 94 000 / 2 = 47 000 euros.

Pour déterminer la chiffre d’affaires moyen par avocat, il convient de diviser le chiffre d’affaires moyen du cabinet commun par le nombre d’avocats associés, 47 000 euros / 3 = 15 666,66 euros.

Ce qui donne une avance maximale autorisée

Pour Me AA la somme de 3 916 euros (15 666,66 euros X 25% seuil butoir)

Pour Me BB la somme de 7 833,33 euros (15 666,66 X 50% seuil butoir) ramenée à la somme limite de 5 000 euros.

Pour Me CC la somme de 1 500 euros, seuil maximal au regard de la situation de l’avocat.

L’avance totale qui sera versée à la SELARL est de 10 416 euros (3 916 + 7 833,33 + 1 500), ramenée à la somme limite de 10 000 euros.

VIII - Quelles sont les modalités du paiement de l’avance ?

Le montant des provisions versées conformément aux dispositions des articles 28 à 34 du règlement type annexé au décret n° 96-887 du 10 octobre 1996 portant règlement type relatif aux règles de gestion financière et comptable des fonds versés par l’Etat aux caisses des règlements pécuniaires des avocats pour les missions d’aide juridictionnelle et pour l’aide à l’intervention de l’avocat prévue par les dispositions de la troisième partie de la loi du 10 juillet 1991, antérieurement à la demande d’une avance exceptionnelle par l’avocat, doit s’imputer sur le montant auquel l’avocat a doit au titre de l’avance exceptionnelle.

Aucune provision supplémentaire ne peut être versée avant le remboursement de l’avance exceptionnelle.
 
L’avance exceptionnelle est versée avant le 30 novembre 2020

Le décret modificatif du 7 août 2020 a reporté la date limite de paiement initial fixée au 30 septembre 2020 au 30 novembre 2020.

 IX - Quelle est la date de remboursement de l’avance reçue ?

L’article 3 du décret prévoit que l’avance exceptionnelle doit être remboursée intégralement avant le 31 décembre 2022.
 
A compter de la date du versement de l’avance exceptionnelle, chaque mission d’aide juridictionnelle ou d’aide à l’intervention de l’avocat donne lieu à une rétribution à hauteur de 75% du montant dû.

La part non versée à l’avocat, soit 25%, est affectée au remboursement de l’avance exceptionnelle.
 
À tout moment, l’avocat peut rembourser par tout moyen le solde restant dû de l’avance exceptionnelle.
 
En cas de démission, de radiation ou omission du barreau, l’avocat doit rembourser avant son départ l’avance exceptionnelle versée.

A noter pour les groupements, à défaut, lorsque l’avance exceptionnelle a été perçue par la structure d’exercice dont l’avocat est membre ou associé, cette avance est remboursée selon les modalités fixées par la convention prévue à l’article 2 du présent décret (les liens des modèles d’actes sont à la fin du présent article). 
 

X - Quelle est la modification à apporter au règlement intérieur du barreau ?

L’article 4 du décret prévoit que chaque barreau doit introduire dans son règlement intérieur un titre particulier sur les règles de gestion financière et comptable de cette avance exceptionnelle.

Ces dispositions arrêtées par le conseil de l’ordre du barreau doivent être conformes aux articles 2 à 5 du présent décret. En clair, l’opération consistera pour le conseil de l’ordre de retranscrits dans la délibération prise le contenu in extenso des articles 2 à 5 du décret n° 2020-653 du 29 mai 2020.
 

XI - Quelle vérification peut être faite par le Bâtonnier ?

Sur saisine de la caisse des règlements pécuniaires des avocats, le bâtonnier peut demander à tout avocat bénéficiaire d’une avance exceptionnelle de lui faire connaître l’état des procédures en cours pour lesquelles il intervient au titre de l’aide juridictionnelle ou de l’aide à l’intervention de l’avocat.
 
Le bâtonnier est saisi de tout litige ou de toute contestation dans les formes prévues à l’article 21 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques.

XII - Quelles sont les modalités techniques du versement de l’avance ?

L’article 5 du décret fixe les modalités techniques du dispositif qui relève de chaque CARPA et de l’UNCA.
 
Le rôle de la CARPA.

Une fois déterminé le montant total à verser aux avocats du barreau au titre du dispositif d’avance exceptionnelle, la CARPA doit transférer les sommes nécessaires à partir du compte spécial prévu au a du 1° de l’article 2 du règlement type annexé au décret du 10 octobre 1996 susvisé, vers un compte annexe spécifique intitulé « Avances - Etat d’urgence sanitaire 2020 » ouvert par chaque CARPA.

En effet, pour rendre transparent et efficient le dispositif, chaque CARPA doit ouvrir un nouveau compte bancaire dédié et intitulé « Avances - Etat d’urgence sanitaire 2020 » auprès de la banque dans laquelle ont été ouverts les comptes de gestion de l’Aide Juridictionnelle.

Le rôle de centralisation de l’UNCA.
 
Chaque CARPA doit transmettre à l’UNCA les informations relatives au montant total versé au titre du dispositif d’avance exceptionnelle, à sa répartition avocat par avocat, ainsi que, mensuellement, à la situation du compte bancaire annexe spécifique précisant le montant des remboursements effectués.
 
L’UNCA doit transmettre au ministère de la justice, plus précisément au service de l’accès au droit et à la justice et de l’aide aux victimes (SADJAV), selon des modalités fixées par convention, les informations relatives au montant total versé au titre du dispositif d’avance exceptionnelle, barreau par barreau, à sa répartition avocat par avocat, ainsi que, mensuellement, à la situation des comptes bancaires annexes spécifiques aux avances exceptionnelles précisant le montant des remboursements effectués. 
 

XIII - Quelle est la date limite pour demander l’avance AJ ?

Le décret modificatif du 7 août 2020 a modifié la date butoir de dépôt de la demande au 30 juin 2020.

Désormais la demande d’avance peut être déposée depuis la date de publication du décret modificatif, soit le 8 août 2020, et ce jusqu’au 30 septembre 2020.

Il ne reste plus qu’aux avocats éligibles à utiliser ce dispositif exceptionnel d’avance pour les aider à faire face aux difficultés économiques causées par la crise sanitaire liée à la Covid-19.

La Conférence des Bâtonniers a mis sur son site en première page un dossier complet dans lequel on trouve les formulaires de demande d’avance sur les indemnités d’AJ, de convention avocat-CARPA d’avance sur AJ et le projet de délibération du dispositif avances AJ [1].

Patrick Lingibé Membre du Conseil National des barreaux Ancien vice-président de la Conférence des bâtonniers de France Avocat associé Cabinet Jurisguyane Spécialiste en droit public Diplômé en droit routier Médiateur Professionnel Membre de l’Association des Juristes en Droit des Outre-Mer (AJDOM) www.jurisguyane.com

[1« Avances exceptionnelles sur l’AJ » : prolongation jusqu’au 30 septembre https://www.conferencedesbatonniers.com