Village de la Justice www.village-justice.com

Le maintien de la fermeture des discothèques. Par Olivier Grunenwald, Juriste.
Parution : lundi 17 août 2020
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/maintien-fermeture-des-discotheques,36323.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Alors que l’état d’urgence sanitaire a pris fin, que les restaurants, salons de thé, brasseries ont rouvert, les discothèques resteront fermées.
Article vérifié par l’auteur en septembre 2023.

Le Conseil d’Etat vient de se positionner le 13 juillet 2020 sur la légalité du décret du gouvernement interdisant aux discothèques de rouvrir, en raison de la crise sanitaire. Le juge devait trancher l’épineuse question de savoir si l’interdiction d’ouvrir à nouveau ces établissements, interdiction prévue par les décrets n°2020-759 du 21 juin 2020 et n°202-860 du 10 juillet 2020 constituait une « atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale », critère prévu par l’article L521-2 du CJA.

Le requérant, le syndicat national des discothèques et lieux de loisirs et autres estimait que cette restriction était contraire à la liberté d’entreprendre, à la liberté du commerce et de l’industrie, à la liberté d’exercer une activité économique, à la liberté du travail, au droit de propriété, à la liberté contractuelle, à la libre concurrence et au principe d’égalité devant la loi. Il convient au regard de ces éléments de s’interroger sur la position adoptée par chacune de ces deux parties eu égard au contexte particulier lié au coronavirus.

D’une part, qu’en est-il de cette requête émanant entre autres du syndicat représentant les discothèques en France. Sa demande paraît légitime. En effet, depuis la déclaration de l’état de crise sanitaire sur le fondement de l’article L3131-1 du code de la santé publique et de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19, les discothèques étaient fermées. Le décret du 31 mai 2020 a mis fin à l’état d’urgence sanitaire.

Cependant au terme du I de l’article 45 du décret du 31 mai 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les établissements de type « P », les discothèques devaient rester fermées.

Le requérant invoquait alors une violation de nombreuses libertés, à savoir entre autres la liberté d’entreprendre, liberté qui, rappelons le, permet le libre exercice de toute activité économique, (constitutionnalisée depuis la décision Cons const 16 janv 1982, Loi de nationalisation, n°81-132), la liberté du commerce et de l’industrie, la liberté d’exercer une activité économique, la liberté du travail, le droit de propriété, la liberté contractuelle et la liberté de concurrence.

Le requérant estime qu’aujourd’hui cette atteinte à sa liberté est disproportionnée puisque la mise en place des mesures barrières, selon lui, est possible et permettrait ainsi d’éviter toute propagation de l’épidémie dans ces établissements. De plus, cette restriction menace directement cette activité à moyen terme.

D’autre part, le ministre chargé de la santé publique estime quant à lui, à l‘inverse, que cette atteinte est proportionnée. Pour lui les gestes barrières ne peuvent pas être assurés et entre autres, la distanciation sociale d’un mètre entre les personnes.

Pour garantir la santé publique il est nécessaire de garder ces établissements fermés et c’est cette raison qui justifie le décret prolongeant cette interdiction. Le ministre préfère ainsi prendre toutes les précautions pour éviter une seconde vague de l’épidémie, pour ne pas que des reproches lui soient formulés a posteriori.

Le juge des référés du Conseil d’Etat se positionne en faveur de la protection de la santé publique et estime qu’aucun manquement grave et manifestement illégal à la liberté fondamentale invoquée par le requérant ne s’est produit.

Cette décision bien que critiquable face à la réouverture d’autres lieux publics tels que les restaurants, les casinos, les bars ; est tout de même louable et reste une solution prudente du juge des référés au vu du contexte actuel et d’une potentielle résurgence de l’épidémie.

Olivier Grunenwald Juriste en droit public des affaires