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Le droit de la propriété intellectuelle autorise-t-il les parodies ? Par Charlotte Galichet, Avocat.
Parution : mardi 16 juin 2020
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Qui n’a pas visionné une parodie de film ou eu envie d’acheter un tee-shirt parodiant une marque ? L’exception de parodie qui existe en droit d’auteur est très strictement encadrée alors qu’elle n’existe pas, ou de manière très limitée en droit des marques.

De nombreuses sociétés détournent des œuvres ou marques connues pour leur propre communication.

Il serait aisé de croire que ces détournements sont autorisés tellement ils sont présents dans la vie courante et sur les réseaux sociaux.

Mais si la parodie peut être licite en matière de droit d’auteur (I), elle n’apparaît absolument pas comme une exception autorisée en droit des marques (II). Elle pourrait par ailleurs être sanctionnée sur le terrain de la concurrence déloyale et/ou du parasitisme (III).

I. L’exception de parodie en droit d’auteur.

Le droit d’auteur a vocation à protéger les créations de l’esprit, à condition qu’elles soient originales. Toute exploitation d’une œuvre de l’esprit, sans l’autorisation de l’auteur ou de ses ayants droits, est constitutive du délit de contrefaçon sanctionné par le Code de la propriété intellectuelle.

Cela étant, le droit français vise à l’article L122-5 du Code de la propriété intellectuelle un certain nombre d’exceptions au monopole des auteurs. Parmi ces exceptions, nous retrouvons « la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ».

En conséquence, dès lors que l’œuvre est utilisée dans un sens dérivé relevant de la parodie, du pastiche ou de la caricature, l’auteur ne peut en principe l’interdire.

Cette exception est une illustration du droit à la liberté d’expression de chaque individu consacré par l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 (DDHC). Néanmoins, la liberté, à l’instar de toutes libertés, et dès lors qu’elle s’oppose au droit de la propriété, ne peut s’exercer que dans certaines limites.

Ainsi, le 27 juillet 2006, le Conseil constitutionnel, dans une Décision n° 2006-540 DC, a reconnu que le droit d’auteur faisait partie intégrante du droit de propriété qui, rappelons-le, figure au nombre des droits de l’Homme consacrés par les articles 2 et 17 de la DDHC, qui elle-même fait partie intégrante du bloc de constitutionnalité.

C’est pourquoi, les exceptions au droit d’auteur sont limitées, interprétées strictement, et surtout encadrées. Pour ce faire, les tribunaux font la balance entre les intérêts en présence en vérifiant que l’atteinte prodiguée au droit d’auteur entre bien dans les critères de la liberté d’expression. Ainsi, trois conditions doivent être réunies : la parodie, la caricature ou le pastiche doivent être humoristiques (1), ils ne doivent pas être faits avec l’intention de nuire (2) et ne doivent pas pouvoir être confondus avec l’œuvre première.

1. La recherche de l’humour.

La parodie, la caricature ou le pastiche doit avoir pour but de faire rire. « Le propos parodique doit être perçu sans difficulté ce qui suppose à la fois une référence non équivoque à l’œuvre parodiée et une distanciation recherchée qui vise à travestir ou à subvertir l’œuvre dans une forme humoristique, avec le dessein de moquer, de tourner en dérision pour faire rire ou sourire » [1].

Mais tout le monde n’a pas le même humour et la notion est donc assez subjective. Par exemple, la Cour d’Appel de Paris a admis la parodie s’agissant d’un pastiche du texte de Prévert « les feuilles mortes » dont l’objet était de rendre hommage à Yves Montant. Les juges ont considéré que le caricaturiste Jacques Faizant avait complètement « retourné » le sens de la chanson « pour en faire de manière humoristique un hommage à la mémoire de son interprète » [2].

Il convient par ailleurs de noter que la jurisprudence a tendance, depuis un certain temps déjà, à atténuer cette exigence ou à étendre cette condition de l’humour pour y faire entrer la critique.

Ainsi, la notion de pastiche a été utilisée par la Cour d’Appel de Versailles afin de valider un détournement des publicités Marlboro : « parfaitement compatible avec une intention de fond étrangère à tout humour » [3].

En 2007, la 3ème Chambre du TGI de Paris indiquait que la parodie est un travestissement de l’œuvre première à des fins d’humour, d’hommage ou de critique. En l’espèce, elle avait jugé que l’apposition de tatouages sur une affiche Chanel et plus précisément « sur le corps du mannequin photographié (…) apparaît comme une marque du style de l’auteur (…) et non comme l’expression d’un humour, d’un hommage ou d’une critique ». L’exception de parodie avait donc ici été rejetée [4].

Très récemment, la Cour de cassation s’est prononcée par un arrêt du 22 mai 2019 dans une affaire où il était reproché au journal Le Point d’avoir repris en couverture un buste de Marianne sans autorisation des ayant-droits de l’auteur sous le titre « Corporatistes intouchables, tueurs de réforme, lepéno-cégétistes... Les naufrageurs - La France coule, ce n’est pas leur problème » [5]. La Cour de cassation a retenu l’exception de parodie sur le fondement de la critique aux motifs que : « la reproduction partielle de celle-ci, figurant le buste de Marianne, immergé, constituait une métaphore humoristique du naufrage prétendu de la République, destiné à illustrer le propos de l’article, peu important le caractère sérieux de celui-ci ; qu’elle a pu en déduire que la reproduction litigieuse caractérisait un usage parodique qui ne portait pas une atteinte disproportionnée aux intérêts légitimes de l’auteur et de son ayant droit ».

Le périmètre de la parodie est donc restreint à l’humour, l’hommage ou la critique. La comparaison commerciale ou l’argument marketing sont évidemment exclus.

2. L’absence d’intention de nuire.

La parodie doit être exempte de nuisance, c’est-à-dire ne pas dénigrer, ne pas discriminer, ne pas révéler des informations propres à la vie privée.
Par exemple, il a été jugé que le site internet « Onetel fuck » contrefaisait le site internet www.onetel.net. La parodie n’a pas été retenue aux motifs que si le site internet se présentait effectivement comme un site parodique, les propos qui étaient tenus démontraient clairement de la part des éditeurs une intention de nuire : « Si le site « OneTelFuck.fr » affiche sur sa page d’accueil être une parodie, le tribunal relève à l’examen de son contenu que l’exception de l’article L122-5 du code de la propriété intellectuelle ne peut lui être appliquée car son contenu établit une nette intention de nuire à la société Onetel en dénigrant ses services » [6].

A contrario, la Cour d’appel de Paris n’a pas décelé d’intention de nuire dans une parodie du magazine Le Monde. En l’espèce, il s’agissait d’une société qui publiait un magazine intitulé « Le Monte » reproduisant les caractéristiques essentielles de la présentation du journal Le Monde. La société Éditrice du Monde soutenait que la volonté de nuire à son journal était caractérisée (i) par le fait de tourner en ridicule le nom du fondateur et celui du directeur, par un article qui affirmait : « Au Monte on ne fait pas de journalisme, ça coûte cher et ça sert à rien », ainsi que (ii) par l’insinuation selon laquelle les journalistes du Monde auraient perdu leur indépendance au moment de l’entrée du Groupe Lagardère dans le capital.

La Cour d’appel de Paris n’a pas estimé que la parodie avait été effectuée avec intention de nuire dans la mesure où « la déformation du nom des fondateurs et directeur du Monde relèvent tout au plus du calembour ; Que, pour le reste, l’affirmation de l’inutilité et du coût superflu de travail d’enquête du journaliste est évidemment à prendre au second degré et que l’allusion à une influence occulte prêtée à « Arnaud L. » sur les rédacteurs relève manifestement de la satire ».

3. L’exclusion du risque de confusion.

Dans l’affaire précitée de la Marianne, la Cour de Cassation a rappelé que « Pour être qualifiée de parodie, l’oeuvre seconde doit (…) éviter tout risque de confusion avec l’oeuvre parodiée ».

Cette condition implique que l’œuvre originelle ne soit pas exactement copiée.

Dans l’affaire de l’hommage rendu à Yves Montand, la Cour d’appel de Paris a rejeté les prétentions de la société de production en précisant : « constitue une parodie autorisée par l’ article 41 § 4 de la loi du 11 mars 1957 le texte transposant une chanson interprétée par un chanteur et comprenant en surimpression le dessin de la silhouette du chanteur, dès lors que tout en permettant l’identification de l’œuvre parodiée le dessinateur en retourne le sens pour faire un hommage humoristique à la mémoire de l’interprète écartant ainsi tout risque de confusion ».

Nous noterons également qu’il n’est pas nécessaire que l’œuvre seconde cite l’œuvre originelle, ni même que l’œuvre seconde soit originale.

II. L’exception de parodie et le droit des marques.

De manière constante, les tribunaux rappellent que l’exception de parodie n’existe pas en droit des marques [7].

Nous verrons néanmoins que certains arrêts sont venus consacrer une sorte d’exception de parodie à condition que l’usage de la marque soit totalement étranger à la « vie des affaires ».

La Cour de cassation [8] est venue délimiter cette exception dans une affaire qui opposait le Comité national contre les maladies respiratoires et la tuberculose (CNMRT) et la société Japan tobbaco titulaire de la marque Camel : « Qu’en statuant ainsi, alors qu’en utilisant des éléments du décor des paquets de cigarettes de marque "Camel", à titre d’illustration, sur un mode humoristique, dans des affiches et des timbres diffusés à l’occasion d’une campagne générale de prévention à destination des adolescents, dénonçant les dangers de la consommation du tabac, produit nocif pour la santé, le CNMRT, agissant, conformément à son objet, dans un but de santé publique, par des moyens proportionnés à ce but, n’avait pas abusé de son droit de libre expression, la cour d’appel a violé les textes susvisés » ;

Ainsi, « l’exception de parodie » pourra être acceptée à condition que :
- l’organisme agisse conformément à son objet social ;
- dans un but légitime ;
- par des moyens proportionnés au but poursuivi.

Pour une application de cette jurisprudence, nous pouvons citer l’affaire Areva c/ Greenpeace [9]. Selon la Cour, Greenpeace a agi « conformément à son objet, dans un but d’intérêt général et de santé publique par des moyens proportionnés à cette fin » et n’a donc pas abusé de son droit de libre expression. « Que les adjonctions apportées aux marques montrent clairement l’intention des associations Greenpeace de dénoncer la politique nucléaire de la société Spcea et le risque pour l’environnement sans induire en erreur le public quant à l’identité des auteurs de la communication ».

Il convient de noter que ces deux arrêts sont tous deux rendus au visa de l’ancien article 1382 du Code civil et de l’article 10 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Tout simplement parce que dans la mesure où la contrefaçon de marque devait être écartée, se posait la question de savoir si le CNMRT et Greenpeace avaient abusé de leur droit à la liberté d’expression. S’il est admis que tout à chacun peut user librement de son droit à la critique, cette critique ne doit pas dégénérer en abus. Cet abus étant sanctionné par l’article 1382 (aujourd’hui 1240) du Code civil.

Il ressort de ce qui précède que la reprise d’une marque enregistrée par un individu n’agissant ni dans un but d’intérêt général ni à des fins polémiques mais dans un intérêt individuel ou commercial, peut être sanctionnée au titre de la contrefaçon de marque. Et c’est en ce sens que la jurisprudence récente s’est prononcée :
Cour d’appel de Rennes, 27 avril 2010, n° 09/00413, Petit navire c/ Petit Chavire : en l’espèce une société commercialisait des t-shirts reproduisant la forme et l’aspect de la boîte de conserve de thon de la société Paulet, titulaire de la marque Petit Navire, pour en déformer certains éléments (’Petit chavire’ pour ’Petit navire  ; ’Le Mauvais Goût du Large’ pour ’Le bon Goût du Large’ etc). La Cour d’appel de Rennes a rejeté l’exception de parodie en rappelant que l’exception de parodie n’existait pas en droit des marques. Elle a également ajouté : « si le principe à valeur constitutionnelle de la liberté d’expression doit permettre, dans un contexte polémique et dans certaines limites, de faire usage d’éléments détournés d’une marque renommée pour exprimer sous une forme parodique des critiques des produits désignés par cette marque ou de l’activité de l’entreprise titulaire des droits sur cette marque, l’usage d’une telle marque par un opérateur économique dans la vie des affaires, à la seule fin de tirer partie de sa notoriété pour commercialiser ses propres produits, constitue bien une atteinte à la renommée de la marque ».

Dans une affaire un peu plus ancienne, une personne avait utilisé la marque RICARD dans un nom de domaine ainsi que sur son site internet. Pour tenter d’échapper aux griefs de contrefaçon, le défendeur invoquait d’une part sa bonne foi et l’absence de toute intention commerciale ou malveillante et d’autre part l’exception de parodie, son site ayant une vocation humoristique autour du pastis de la société Ricard.

Tout d’abord, le Tribunal de grande instance de Paris a rappelé que la bonne foi est inopérante en matière de contrefaçon de marque. La gratuité du site et l’absence de profit réalisé ne sont pas davantage des éléments de nature à échapper au grief de contrefaçon. Le Tribunal rappelle ensuite que l’exception de parodie n’est pas prévue en matière de marque par le Code de la propriété intellectuelle.

Enfin, le Tribunal a jugé que : « il est constant que la liberté d’expression ne saurait s’effectuer au détriment des droits d’autrui et particulièrement des droits de marque et que si dans la presse, on cite des marques pour rendre compte d’événements dans lesquels sont impliquées les entreprises les exploitant, il ne s’agit que d’une tolérance strictement limitée à une utilisation incontournable, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Dans ces conditions le tribunal considère que le grief de contrefaçon de marques est fondé » [10].

Pour la même marque, la Cour d’Appel de Chambery en 2007 a condamné la société Undergroove qui commercialisait des tee-shirts imitant le signe "Ricard" (transformée en "Smicard") considérant qu’il s’agissait d’une imitation à caractère parodique ou humoristique de la marque : « attendu que la seule reproduction de la marque d’autrui est, en droit strict, constitutive de contrefaçon, indépendamment de toute autre considération tenant à la bonne ou mauvaise foi du contrefacteur, à l’existence ou non d’un risque de confusion dans l’esprit du public ou de la finalité de la reproduction » [11].

III. L’exception de parodie, la concurrence déloyale et le parasitisme.

1. Le dénigrement de la personne morale ou de ses activités.

Tel que nous l’évoquions précédemment, la parodie ne doit pas être accomplie dans l’intention de nuire.

La jurisprudence attache une attention particulière à la manière dont le message est formulé afin de vérifier qu’il ne dépasse jamais les limites de l’humour, étant précisé que le dénigrement est une forme de concurrence déloyale, sanctionné par les tribunaux.

Par exemple, dans l’affaire Greenpeace C/ Areva précitée, il avait été soutenu le caractère dénigrant du spot publicitaire effectuée par Greenpeace : les associations Greenpeace France et Greenpeace Nouvelle Zélande avait reproduit sur leurs sites internet la lettre A stylisée de la marque Areva et la dénomination A Areva en les associant toutes deux à une tête de mort et au slogan "Stop plutonium-l’arrêt va de soi" dont les lettres A reprenaient le logo et en plaçant la lettre A sur le corps d’un poisson mort ou mal en point.

Sur le terrain du dénigrement, la Cour d’Appel de Paris avait jugé que : « la présentation des marques, de la société Spcea, associées à une tête de mort et à un poisson au caractère maladif (…) conduit à penser que tout produit ou service diffusé sous ce sigle est mortel ; que de ce fait, les associations Greenpeace vont, en raison de la généralisation qu’elles induisent sur l’ensemble des activités de la société intimée, au-delà de la liberté d’expression permise, puisqu’elles incluent des activités qui ne sont pas concernées par le but que les associations Greenpeace poursuivent en l’espèce, c’est-à-dire la lutte contre les déchets nucléaires ; qu’elles ont par cette généralisation, abusé du droit à la liberté d’expression, portant un discrédit sur l’ensemble des produits et services de la société Spcea et ont ainsi commis des actes fautifs dont elles doivent réparation » [12].

Mais la Cour de cassation ne fut pas de cet avis : « Qu’en statuant ainsi, alors que ces associations agissant conformément à leur objet, dans un but d’intérêt général et de santé publique par des moyens proportionnés à cette fin, n’avaient pas abusé de leur droit de libre expression, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

En revanche, elle a approuvé la Cour d’appel de Paris en ce qu’elle avait décidé que « les actes reprochés aux associations par l’utilisation litigieuse de ses marques ne visaient pas la société mais les marques déposées par elle et en conséquence les produits ou services qu’elles servent à distinguer, de sorte qu’il était porté atteinte à ses activités et services et non à l’honneur ou à la considération de la personne morale  » [13].

2. Le risque de confusion et le parasitisme.

Nous l’avons évoqué également, il ne doit pas résulter de la parodie un risque de confusion entre l’œuvre parodiée et la parodie.

Ainsi, dans un arrêt du 21 septembre 2012, n°10/11630, la Cour d’appel de Paris s’est prononcée sur la question de la parodie et du parasitisme. L’affaire concernait la publication d’un magazine parodique nommé Fientrevue. La société Editrice du magazine Entrevue (SA Société de Conception de Presse et d’Edition - « SCPE ») a assigné la société éditrice du magazine parodique sur le fondement du droit d’auteur et de la concurrence déloyale et parasitaire.

Il était question également de la publication d’un hors-série, Entrecul, par la société SCPE et de la publication d’un titre similaire, Fientrecul par les sociétés éditrices de la revue Fientrevue.

Concernant le parasitisme, la société SCPE reprochait aux sociétés Jalons et Cogenor, éditrices du magazine Fientrevue, de s’être livrées à une campagne d’affichage entièrement calquée sur celle du magazine Entrevue, d’avoir placé le magazine Fientrevue dans les kiosques aux mêmes emplacements que ses revues Entrevue et Entrecul et d’avoir commercialisé leur revue au même prix que le leur.

La diffusion du magazine Fientrecul devait par ailleurs intervenir à la même date que Entrecul, outre le fait qu’il présentait une couverture, des codes graphiques, des titres, des rubriques, des illustrations, des paginations, des sujets polémiques tous identiques au hors-série Entrecul.

Néanmoins, la Cour d’appel de Paris a soulevé dans son arrêt que la société SCPE ne démontrait pas en quoi l’ensemble de ces agissements étaient fautifs. Pour les juges, il est naturel que dans le cadre d’une parodie consistant à imiter un sujet dans le but de le détourner de ses intentions initiales afin de produire un effet comique d’adopter les éléments caractéristiques du sujet en grossissant ses traits.

S’agissant de l’emplacement dans les kiosques des revues Entrevue, Fientrevue et Entrecul, la Cour a considéré que cette disposition côte à côte ne saurait être reprochée aux sociétés Jalons Editions et Cogenor étant observé que les publications de même nature sont généralement proposées à la vente aux mêmes emplacements chez le kiosquier.

En conséquence, la Cour d’appel a rejeté l’action de la société SCPE sur le terrain du parasitisme.

A contrario, dès lors qu’un risque de confusion ou une volonté de s’immiscer dans le sillage du concurrent apparaît, alors le parasitisme et la concurrence déloyale pourront être retenue.

Par ailleurs, la parodie pourra également avoir tendance à révéler des actes de dénigrements.

Par exemple, dans une décision du 23 août 2007, le Tribunal de grande instance de Paris a relevé au sujet d’une publicité mettant en scène un tournevis qu’ « en mettant en scène le tournevis dans des conditions de nature à jeter un discrédit sur le modèle, alors qu’il est justifié par les pièces produites au débat que la société Kaysersberg tenait à avoir sur l’affiche ce tournevis et non un autre et ainsi bénéficier de ses qualités, la société Kaysersberg a commis des actes de parasitisme, la parodie ne pouvant être retenue en la présente espèce et des actes de discrédit dont elle doit réparation ».

ll n’est pas toujours aisé de délimiter ce qui relève de la parodie ou de la contrefaçon et/ou de la concurrence déloyale. Si la jurisprudence a dégagé certains critères, il n’en demeure pas moins que le pouvoir d’appréciation des juridictions est très fort dans cette matière.

Charlotte Galichet Avocat au Barreau de Paris [->c.galichet@avocatspi.com] www.avocatspi.com

[1CA Paris, 18 février 2011, n° 09/19272.

[2CA Paris, 11 mai 1993, Société Sebdo et Jacques Faizant c/ Editions Enoch, RIDA 1993, n°157, p.340.

[3CA Versailles, 1ère Ch., 17 mars 1994, RIDA 2/1995, p.350.

[4Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 31 octobre 2007, 06/00430.

[5Civ. 1ère, 22 mai 2019, 18-12718.

[6Cf. les citations suivantes : « et si tu payes pas on t’envoie les huissiers », « cette offre est soumise à condition d’une souscription au service de sodomie One.tel.fuck (et oui, donne nous tes sous quand tu téléphones) », « introduction à teub, cette arnaque est conclue entre OneTelFuck ( » One.Tel.Fick » ou » pognon « ) et vous ( » pigeon « ) », « la sodomie chère pigeonne, cher pigeon » (…)  » (TGI Paris, 29 mai 2001).

[7TGI Paris, 29 mai 2001, précité.

[8Civ. 2ème, 19 oct. 2006, n° 05-13.489.

[9Civ.1ère, 8 avril 2008, n°07-11251.

[10Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 8 janvier 2002, Ricard c/ M.x.

[11CA Chambery, 23 janvier 2007 RG : 06/00449.

[12CA Paris, 17 novembre 2006.

[13Civ. 1ère, 8 avril 2008, 07-11251.

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