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Bail commercial : une clause d’indexation peut être réputée "partiellement" non écrite. Par Bruno Houssier, Avocat.
Parution : lundi 25 mai 2020
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En matière de clause d’indexation, la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée écoulée depuis la prise d’effet du bail est prohibée, mais pour la Cour de Cassation seule la stipulation qui crée la distorsion doit être réputée non écrite.

La Cour de Cassation a confirmé, dans un arrêt rendu le 06 février 2020 [1] sa jurisprudence antérieure du 29 novembre 2018 [2] : une clause d’indexation n’est pas nécessairement réputée non écrite en totalité lorsqu’elle comporte une stipulation contraire aux exigences de l’article L112-1 du Code monétaire et financier.

En l’espèce, selon l’arrêt attaqué [3], la SCI FDL1 avait donné à bail commercial à la société Speedy France, le 16 avril 2007, un bâtiment à usage de bureaux à compter du 15 janvier 2008, pour une durée de neuf années, moyennant un loyer annuel de 220 000 euros hors taxes.

Ce bail contenait une clause d’indexation qui comportait une disposition prévoyant, lors de la première révision, une distorsion entre l’intervalle de variation indiciaire (2 ans) et celui séparant la prise d’effet du bail de la première révision (1 an).

La société locataire avait saisi le juge afin de voir déclarer cette clause réputée non écrite et condamner la bailleresse à lui restituer des sommes qu’elle avait versées au titre de l’indexation, en se prévalant du caractère illicite de la clause d’indexation insérée au bail, étant rappelé qu’aux termes de l’article L112-1 du Code monétaire et financier, est réputée non écrite « la clause d’indexation d’un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d’une période de variation de l’indice supérieure à la durée s’écoulant entre chaque révision ».

La Cour d’appel de Versailles a effectivement jugé en appel que cette clause d’indexation était « réputée non écrite », ayant relevé que la clause du bail prévoyait une indexation « pour la première fois le 15 janvier 2009 par variation de l’indice INSEE du 4ème trimestre 2006 à l’indice INSEE du 4ème trimestre 2008 », créant ainsi une distorsion entre l’intervalle de variation indiciaire (deux ans) et celui séparant la prise d’effet du bail de la première révision (un an).

La Cour de Cassation censure cette décision : la Cour d’appel n’aurait pas dû déclarer la clause d’indexation non écrite dans son entier, alors même que l’arrêt d’appel retenait que la disposition contraire aux dispositions d’ordre public de l’article L112-1 du Code monétaire et financier n’était applicable qu’à la première révision.

En d’autres termes, seule la stipulation qui créait la distorsion prohibée devait être réputée non écrite : si le premier ajustement est illicite, en revanche le mécanisme d’indexation pour les années suivantes du bail est conforme aux termes de l’article L112-1 du Code monétaire et financier, les périodes de référence ayant la même durée.

Arrêt du 06 février 2020, n°18-24599 - Cour de Cassation - 3ème Chambre civile

Bruno Houssier Avocat, spécialiste certifié en Droit commercial, des affaires et de la concurrence, et certifié en Droit des sociétés

[1N°18-24599, 3ème Chambre civile.

[2N°17-23058, 3ème Chambre civile.

[3Versailles, 30 octobre 2018.