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Baux commerciaux : le Conseil constitutionnel déclare un article de la loi Pinel conforme à la Constitution. Par Asif Arif, Avocat.
Parution : vendredi 15 mai 2020
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Assez rare pour être souligné, le Conseil constitutionnel a statué sur une question de bail commercial. Dans une décision n°2020-837, le Conseil constitutionnel a estimé le 7 mai 2020 suite à une question prioritaire de constitutionalité que la limitation du montant permettant de déplafonner les loyers commerciaux ne porte pas atteinte à la Constitution et plus particulière au droit de propriété du bailleur.

Rappelons d’abord que le droit de propriété est reconnu comme droit fondamental en raison des articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Il a ainsi fallu attendre « le coup d’état constitutionnel » du Conseil de 1971 à travers sa décision Bloc de constitutionnalité pour que le droit de propriété puisse être reçu parmi les normes fondamentales dont le Conseil constitutionnel pouvait contrôler la violation.

Aussi, le Conseil constitutionnel est amené régulièrement a apprécié la question du droit de propriété. Toutefois, dans le dossier ayant donné lieu à la décision du Conseil constitutionnel le 7 mai 2020, les faits concernait la propriété commerciale. Rappelons d’abord la règle. Au titre de L145-33 du Code de commerce, « en cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 145-33 ou s’il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d’une clause du contrat relative à la durée du bail, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente ».

En somme, cette disposition limite l’augmentation des loyers commerciaux à 10% du montant des loyers acquittés l’année précédente par le locataire. Cette disposition découle de la loi Pinel et sa constitutionnalité était soumise à l’appréciation du Conseil.

Le Bailleur estimait que cet article était inconstitutionnel et violait de plein fouet le droit de propriété. Notons que le Bailleur appuyait son argumentation sur l’intérêt de l’interdiction d’augmenter les loyers à la valeur réelle ; il estimait ainsi que cette interdiction n’était fondée sur aucun élément d’intérêt général. Il s’est ensuite appuyé sur un argument tenant à l’économie du contrat ; il soutenait en effet qu’une interdiction de déplafonner le loyer pouvait contraindre le Bailleur à maintenir des loyers ne représentant pas la valeur locative réelle et faisant ainsi porter le cout de la perte financière sur les comptes du Bailleur.

Le Conseil constitutionnel rejette d’un revers de la main la QPC intentée par le Bailleur en estimant :

-  d’une part, que le lissage du déplafonnement du loyer va permettre aux bailleurs d’accroitre leurs revenus locatifs de 10 % et, à terme, à renfort d’augmentations successives atteindre la valeur locative,

-  d’autre part, que le mécanisme de rétroactivité prévu par la loi Pinel n’est pas non plus contraire à la Constitution.

Plus d’espoirs pour les Bailleurs qui devront se contenter de respecter les termes de cet article du Code de commerce.

Asif Arif Avocat au Barreau de Paris