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Prêt relais : anticiper les difficultés en suspendant le paiement de l’échéance finale. Par Florian Desbos, Avocat.
Parution : vendredi 17 avril 2020
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Il est très probable que dans les mois qui viennent un certain nombre de prêts relais arrivent à échéance, sans que l’échéance principale ait pu être remboursée.

Il parait dans ces conditions essentielle d’anticiper les difficultés.

Le crédit relais immobilier est défini comme il suit à l’article L. 311-1 16° du Code de la consommation

« Crédit relais, un crédit d’une durée limitée destiné à faire l’avance partielle ou totale, et temporaire du produit de la vente d’un bien immobilier pour en acquérir un autre avant la vente du premier bien ».

Plus simplement, il s’agit d’un crédit par lequel la Banque avance une partie du prix de vente du bien immobilier pour permettre d’acquérir un nouveau bien immobilier. Une fois le bien vendu, il est procédé au remboursement du crédit relais, et ce par une seule et unique échéance.

Le montant du crédit relais varie en fonction de la valeur du bien à vendre et après déduction du capital restant dû s’il était financé par un crédit : entre 50 et 80% en moyenne.

La durée du crédit varie quant à elle généralement entre 1 an et 2 ans voire parfois 3 ans.

Le remboursement doit ainsi intervenir au moment de la vente ou au plus tard au terme du crédit relais.

Il est possible d’opter soit pour une franchise partielle avec remboursement pendant la durée du prêt des seuls intérêts et cotisations d’assurance ou pour une franchise totale avec paiement des seules cotisations d’assurance.

En cas d’option pour la franchise totale, la Banque peut prévoir au contrat une capitalisation des intérêts autrement dit les intérêts pourront eux-mêmes produire des intérêts au bout d’un an.

Le nombre de ventes risque sans doute d’être assez faible dans les prochains mois, ce qui risque d’entrainer une absence de remboursement de l’échéance due au titre du crédit relais avant le terme du contrat.

Une solution peut être trouvée dans l’article L314-20 du code de la consommation. Cet article dispose que :

« L’exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, suspendue par ordonnance du juge des contentieux de la protection dans les conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil. L’ordonnance peut décider que, durant le délai de grâce, les sommes dues ne produiront point intérêt.

En outre, le juge peut déterminer dans son ordonnance les modalités de paiement des sommes qui seront exigibles au terme du délai de suspension, sans que le dernier versement puisse excéder de plus de deux ans le terme initialement prévu pour le remboursement du prêt ; il peut cependant surseoir à statuer sur ces modalités jusqu’au terme du délai de suspension. »

Ce texte cite en exemple le cas d’un licenciement. Cependant, plus largement, il englobe tout évènement dont les effets sont temporaires, et ayant vocation à disparaître à l’issue d’une période déterminée.

C’est ainsi que j’ai pu obtenir la suspension d’échéances de prêts en cas de maladie, de difficulté avec un locataire, pour un gérant de société de la mise en liquidation judiciaire de sa société…

La crise sanitaire actuelle me parait rentrer dans la définition de l’événement implicitement visé par l’article L314-20 du code de la consommation.

Il m’apparait ainsi possible de demander la suspension du paiement de l’échéance finale, le temps que le marché de l’immobilier reparte, et ce afin de pouvoir vendre son bien immobilier dans les meilleures conditions.

Par ailleurs le texte prévoit la possibilité de suspendre le paiement des intérêts pendant cette période, ce qui est un atout non négligeable.

Cela permettra d’éviter la déchéance du terme aux conséquences catastrophiques : fichage au FICP, ce qui empêche de conclure un autre prêt pour rembourser, indemnité de remboursement anticipée, intérêts majorés, vente aux enchères du bien ce qui entraîne de nombreux frais ….

Il est rappelé qu’il convient de faire cette demande en assignant en référé le prêteur devant le Tribunal judiciaire du domicile de l’emprunteur.

Florian DESBOS Avocat au Barreau de LYON www.avocats-desbosbarou.fr