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Les indicateurs de détermination des prix des produits agricoles dans les contrats de vente. Par Louis Chochoy, Avocat.
Parution : jeudi 9 janvier 2020
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Loi 2018-938 dite Égalim du 30 octobre 2018 et l’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 relative à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées ont modifié les règles de contractualisation entre fournisseurs et distributeurs de produits agricoles et de produits contenant des produits agricoles. Si quelques changements sont à répertorier, comme l’obligation de contractualisation entre le producteur de certains produits (lait, fruits et légumes) et le premier acheteur, ou encore de nouvelles clauses obligatoires au sein des conventions écrites entres les parties, la principale nouveauté concerne l’établissement de critères et de modalités de détermination du prix des produits agricoles vendus.

I – Les indicateurs de fixation, de détermination et de révision des prix des produits agricoles : article L. 631-24 du Code rural et de la pêche maritime.

Conformément aux nouvelles dispositions de l’article L. 631-24 du Code rural et de la pêche maritime, tout contrat de vente de produits agricoles (et de produits alimentaires contenant des produits agricoles, transformés ou non) livrés sur le territoire français, dès lors qu’il est conclu sous forme écrite doit comporter plusieurs indicateurs permettant de déterminer le prix des produits agricoles vendus (article L. 631-24, III, 7° alinéa 2).

Ne sont cependant pas concernés :
- les ventes directes aux consommateurs,
- les ventes au profit d’associations caritatives pour la préparation des repas destinés aux personnes défavorisées,
- les ventes à prix ferme sur les carreaux affectés aux producteurs situés au sein des marchés d’intérêt national ou sur d’autres marchés physiques de gros de produits agricoles,
- les contrats conclus avec les entreprises sucrières par les producteurs de betteraves ou de cannes à sucre,
- les relations entre les coopératives agricoles et leurs associés coopérateurs ni les relations entre les producteurs et les organisations de producteurs (OP) ou les associations d’organisations de producteurs (AOP).

Ainsi, le contrat doit préciser un ou plusieurs indicateurs relatifs :
- aux coûts pertinents de production en agriculture et à l’évolution de ces coûts,
- aux prix des produits agricoles et alimentaires constatés sur le ou les marchés sur lesquels opère l’acheteur et à l’évolution de ces prix,
- aux quantités, à la composition, à la qualité, à l’origine et à la traçabilité des produits ou au respect d’un cahier des charges.

L’établissement et la diffusion de ces indicateurs revient aux organisations interprofessionnelles. Pour cette mission, ces dernières peuvent notamment s’appuyer sur l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires ou encore sur l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer).

Si certaines filières ont aujourd’hui mis en place et publié ces indicateurs, nombreuses sont celles qui n’ont à ce jour pas encore finalisé ce travail. Cependant, certains organismes comme la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) mettent à disposition un tableau de bord détaillant ces informations, et l’état d’avancement des négociations concernant les indicateurs à prendre en compte dans l’élaboration des prix des produits agricoles, et donc, dans les mentions à insérer dans les contrats de vente.

Enfin, même si des indicateurs ne sont pas encore définis pour de nombreuses filières agricoles, il est judicieux (et logique) de choisir des critères de détermination des prix de manière pragmatique : doivent ainsi être pris en compte les informations fiables faisant référence dans le domaine en question.

C’est par exemple le cas de la filière brassicole pour laquelle des indicateurs propres aux différents produits utilisés pour le brassage de la bière n’ont pas encore été définis. En l’état actuel des choses, il est préférable de retenir certains critères comme les indices des prix d’achat des moyens de production agricole (IPAMPA) publiés par l’AGRESTE (service de la statistique et de la prospective du Ministère en charge de l’agriculture), les cotations EURONEXT (principales références utilisées par les marchés céréaliers), ou encore les indicateurs retenus par Intercéréales (interprofession représentative des céréales) pour certains produits.

II – La référence auxdits indicateurs dans tous les contrats.

Hormis certaines conventions précisées au premier alinéa de l’article L. 631-24 I. du Code rural et de la pêche maritime qui ne sont pas visées par cette obligation, le texte précise que cette modalité vise « tout contrat de vente » (ou tout contrat de revente, article L. 631-24-1 du même code).

Qu’il s’agisse du premier contrat d’achat/vente de produits agricoles (le contrat « premier acheteur »), de la contractualisation d’une relation commerciale longue (régime de la convention unique), ou encore d’un quelconque contrat de revente des produits (qu’ils soient transformés ou non), tous doivent faire référence à ces indicateurs.

Doit-on alors systématiquement établir un contrat écrit pour chaque vente de produits agricoles ? La réponse est bien entendu négative. Cela dit, et afin d’éviter toute sanction (amende maximum de 75.000 euros pour une personne physique et 350.000 euros pour une personne morale), il est préférable d’annexer à chaque bon de commande et facture les conditions générales de l’entreprise vendeuse, à conditions que la mention des indicateurs de prix soit précisée.

Louis Chochoy Avocat au barreau de Lille (59) http://www.chochoylouis-avocat.fr/