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Associations Loi 1901 : devez-vous payer des impôts ? Par Anthony Berger, Avocat.
Parution : vendredi 20 septembre 2019
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L’exemption de tous impôts commerciaux est l’une des caractéristiques principales des associations dites à but non lucratif. En d’autres termes, dès lors que votre organisme associatif répond à certains critères de non lucrativité, il ne sera pas soumis aux impôts commerciaux : Impôt sur les Sociétés, Taxe sur la Valeur Ajoutée et Contribution Économique Territoriale (ex Taxe Professionnelle).
Ainsi, une association peut réaliser une activité économique sans que celle-ci ne soit considérée comme lucrative, et donc échapper aux impôts commerciaux.
Encore faut-il donc respecter les fameux critères de non lucrativité et s’assurer que l’administration fiscale valide votre schéma associatif dans le cadre d’un rescrit.

1 - Les caractéristiques d’une association à but non lucratif.

En principe, les associations relevant de la loi du 1er juillet 1901, et plus généralement les organismes sans but lucratif, ne sont pas soumises aux impôts commerciaux.

Ainsi, par exemple, la documentation administrative fiscale précise que :
« Les organismes privés autres que les sociétés ne sont placés sous le régime du 1 de l’article 206 du CGI que lorsqu’ils se livrent à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif ».

Tout l’enjeu pour une association est donc de déterminer si son activité est lucrative ou non, afin de savoir si elle se trouve dans le champ des impôts commerciaux.

1.1 - Analyse de la lucrativité d’une association.

L’instruction administrative 4H-5-98 du 15 septembre 1998 complétée par l’instruction 4H-5-06 du 18 décembre 2006 décrit une méthode d’analyse, en trois étapes, qui permet de déterminer la situation fiscale de l’association.

L’intérêt de cette méthode est qu’elle est valable pour l’ensemble des impôts commerciaux. Ainsi, si l’association n’es pas soumise à l’Impôt sur les Sociétés parce qu’elle est non lucrative, elle ne sera pas non plus soumise à la TVA et à la Contribution Economique Territoriale.

L’analyse se déroule donc en trois étapes :

Etape 1 - La gestion de l’association est-elle désintéressée ?

Afin d’être caractérisée comme non lucrative, une association doit être gérée de façon désintéressée. Cela implique le respect de trois conditions :
- l’association est gérée de façon bénévole par des personnes n’ayant aucun intérêt direct ou indirect dans les résultats de l’exploitation ;
- l’association ne procède à aucune distribution directe ou indirecte de bénéfice ;
- les membres de l’association ne sont attributaire d’aucune part quelconques de l’actif (à l’exception du droit de reprise des apports.

La gestion bénévole de l’association signifie, non pas que les dirigeants de l’association ne peuvent pas être rémunérés, mais qu’ils peuvent l’être sous certaines limites. Ainsi, le Président de l’association peut être rémunéré à hauteur, maximum, des 3/4 du SMIC. Si l’association génère un chiffre d’affaires important, il est possible de déroger à cette règle des 3/4 du SMIC, sous conditions.

L’association peut réaliser des profits sans que cela ne remettre en cause son caractère non lucratif. Toutefois, ces profits doivent exclusivement être affectés à l’exécution de ses activités. Ils ne peuvent, en aucun cas, être distribués aux dirigeants, aux membres ou encore à des tiers.

Etape 2 - L’association concurrence-t-elle une entreprise commerciale ?

Si l’association a bien une gestion désintéressée, sa non lucrativité sera reconnue dès lors qu’elle ne fait pas concurrence à une entreprise commerciale ou un organisme du secteur lucratif. La situation de l’association à ce titre s’apprécie par rapport à des sociétés exerçant la même activités dans des conditions similaire et dans le même secteur.

Si la réponse à la question est négative, l’association est non lucrative. Par contre, si la réponse est positive, il faut réaliser la 3e étape d’analyse.

Etape 3 - L’association exerce-t-elle son activité dans des conditions différentes que celles d’une entreprise (règle des 4P).

L’activité de l’association peut entrer en concurrence avec l’activité d’une entreprise mais ne pas être considérée comme lucrative. Pour cela, quatre éléments doivent être examinés, c’est ce que l’on appelle la règle des « 4P » :
- le produit proposé par l’association ;
- le public qu’elle vise ;
- les prix pratiqués ;
- la publicité à laquelle l’association a recours pour exercer son activité.

Une attention particulière est attachée par l’administration aux deux premiers critères.

Produit : l’activité est considérée d’utilité sociale si elle répond à un besoin peu, voir pas pris en compte par le marché, quel que soit le domaine concerné : loisirs, social, culture, sport,…

Public : revêtent un caractère d’utilité sociale les actes réalisés en direction d’un public « défavorisé », n’ayant pas accès facilement ou habituellement aux activités proposées.

Prix : l’association met-elle en œuvre des efforts particuliers pour faciliter l’accès du public et pour se distinguer de ceux accomplis par les entreprises du secteur lucratif, notamment par un prix nettement inférieur pour des services de nature similaire.

Publicité : rien n’interdit à une association de procéder à des opérations de communication sans que sa non-lucrativité soit remise en cause. Toutefois, ces informations ne doivent pas s’apparenter à de la publicité commerciale destinée à capter un public identique à celui des entreprises du secteur concurrentiel.

1.2 - Conséquence de la non lucrativité d’une association.

Au terme de l’analyse en 3 étapes, si la non lucrativité de l’association est reconnue, celle-ci ne sera donc pas soumise aux impôts commerciaux. Attention, l’association restera soumise aux autres impôts : droits d’enregistrement, taxe d’habitation, taxe foncière, etc.

Il n’y a pas de formalités particulières à effectuer. Ce n’est qu’en cas de contrôle fiscal qu’il sera vérifié que l’association remplit ces conditions.

La non-lucrativité permet, en outre, de réaliser une activité lucrative marginale, en bénéficiant de deux types d’exonérations spécifiques :
l’association non lucrative peut réaliser des activités lucratives dans le cadre de 6 manifestations exceptionnelles par an ;

l’association peut percevoir, par an, des recettes d’activités lucratives, dans la limite d’une franchise fixée à 63.509 euros par an, dès lors que la gestion de l’association est désintéressée et que l’activité non lucrative reste non prépondérante.

2 - Le rescrit fiscal pour anticiper le contrôle de l’administration.

Il est possible pour l’association qui souhaite s’assurer de son caractère non lucratif de faire une demande à l’administration de se prononcer en ce sens, dans le cadre d’une procédure dite de rescrit.

Le rescrit, c’est en fait décrire précisément son activité à l’administration fiscale. Cette dernière adressera à l’association son point de vue sur le caractère lucratif ou non des activités. L’intérêt, c’est que la position de l’administration fiscale lui est opposable. En d’autres termes, si l’administration fiscale estime que l’association est non lucrative, en cas de contrôle, et dès lors que la situation n’a pas changé, l’association sera tranquillisée.

La demande de rescrit doit être écrite et contenir une description très détaillée de l’association et de ses activités. L’administration fiscale a publié des formulaires types pour réaliser la demande de rescrit.

La réponse de l’administration doit intervenir sous trois mois et ne vaut que pour la situation décrite dans la demande et sans limitation de durée.

Il est préférable d’être accompagné par un professionnel pour effectuer cette demande de rescrit afin que la position de l’administration fiscale soit la plus sécurisée possible.

Maître Anthony BERGER, Avocat au Barreau de Lyon
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