Village de la Justice www.village-justice.com

Rappel à la Loi et affaires familiales, attention danger ! Par Brigitte Bogucki, Avocat.
Parution : jeudi 21 mars 2019
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/rappel-loi-affaires-familiales-attention-danger,31020.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Le rappel à la Loi est une alternative aux poursuites pénales qui peut apparaître dans d’autres situations comme une solution simple, rapide et de peu de conséquences est au contraire dans les affaires familiales très dangereux.

L’article 41-1 du code de procédure pénale prévoit le rappel à la Loi, solution alternative aux poursuites pénales, présentée comme favorable au contrevenant et permettant de lui donner une chance de ne pas réitérer l’infraction ainsi la circulaire du 16 mars 2004 relative à la politique pénale en matière de réponses alternatives aux poursuites précise qu’il consiste "dans le cadre d’un entretien solennel, à signifier à l’auteur la règle de droit, la peine prévue et les risques de sanction encourus en cas de réitération des faits. Il doit favoriser une prise de conscience chez l’auteur des conséquences de son acte, pour la société, la victime et pour lui-même sans se réduire à de simples considérations morales"

Légalement la conséquence du rappel à la Loi est le classement sans suite de la plainte, sans aucune inscription au casier judiciaire.

Il ne peut avoir lieu que s’il est accepté par la personne poursuivie.

Le rappel à la loi est une reconnaissance des faits, qui ne peut faire l’objet d’aucune contestation ultérieure ni d’aucun recours.

C’est le Procureur ou son délégué, et souvent un officier de police judiciaire au sein même du commissariat ou de la gendarmerie (sur ordre du Procureur) qui propose ce rappel à la Loi.

Par principe le rappel à la Loi prévoit que sont rappelés à l’auteur des faits à la fois l’infraction et les conséquences pénales que la Loi y attache donc les risques potentiels en cas de procédure devant le tribunal correctionnel.

En pratique, ce sont souvent des primo-délinquants, qui n’ont absolument pas l’habitude de commettre des infractions et qui, souvent dans les affaires familiales nient les faits qui leurs sont reprochés.

Cette mesure a les faveurs des Procureurs car elle désengorge les tribunaux de très nombreuses "petites" infractions. De ce fait, la pression morale mise sur le justiciable pour qu’il accepte de signer le rappel à la Loi est forte et l’explication qui lui en est donnée est pour le moins parcellaire car il n’en saisit pas toujours les implications.

Il est en effet fréquent que la proposition soit faite ex-abrupto, sans que la personne concernée ait pu se concerter avec son avocat.

Selon ce que me racontent mes clients de façon récurrente, la chose est souvent présentée de façon simpliste en indiquant que les faits semblent établis, que si l’affaire va devant le tribunal il va y avoir condamnation donc casier judiciaire et risque de telle et telle peine, que c’est un gros risque alors qu’en signant le rappel à la Loi, tout est terminé et l’affaire sera classée...

Face à une telle présentation, le justiciable peu habitué a tendance à accepter de signer pour éviter tout risque... mal lui en prend car en droit de la famille tout particulièrement les conséquences peuvent être très lourdes.

En effet le rappel à la Loi est une reconnaissance de culpabilité. Autrement dit, en signant ce document l’auteur présumé devient auteur des faits et ce définitivement.

Prenons un cas malheureusement classique de violences conjugales dans une période de séparation du couple ou les relations sont particulièrement tendues. Les conjoints se disputent, le ton monte, une bousculade s’ensuit. L’un des deux file au commissariat, porte plainte, fait faire un certificat médical. L’autre non, ce qui est très courant. La police le convoque, il reconnait les faits mais explique que c’était réciproque. Peu importe, les faits étant reconnus, on lui propose un rappel à la Loi. Il accepte trouvant cela assez logique.

Sauf que...

En faisant cela il reconnaît avoir été un conjoint violent, l’autre s’en empare et toutes les procédures concernant la résidence, le divorce (s’ils sont mariés) et les enfants, va tourner autour de cette violence reconnue. Notre conjoint pourra toujours pleurer que c’était réciproque, il n’aura aucune preuve et ne sera pas entendu.
Cela peut aller très loin, il peut dans le cadre d’une ordonnance de protection être obligé de quitter son logement, son lien aux enfants peut être limité, un divorce aux torts peut être prononcé... et pendant des années cela peut le suivre...
Malheureusement lorsqu’il a signé le rappel à la Loi notre conjoint n’était absolument pas conscient de cela et il ne peut plus rien faire...

Voilà pourquoi il convient d’être particulièrement attentif avant d’accepter un quelconque rappel à la Loi et qu’il est préférable de demander à consulter son avocat avant de donner une réponse.

Me Brigitte BOGUCKI, spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, Professionnel collaboratif Avocat à Paris et Lille http://www.adr-avocats.com
Comentaires: