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Le secret médical entre médecins. Par Aurélie Viandier Lefèvre, Avocat.
Parution : lundi 28 avril 2025
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Un litige est né entre deux chirurgiens associées en Société civile de moyens (SCM), en raison (notamment) de l’intrusion sans autorisation, de l’un des praticiens aux dossiers médicaux des patients de son associée en y apportant des modifications de cotation d’actes.
Chambre Disciplinaire de première instance des Médecins de Nouvelle Aquitaine, Audience n°23-536 du 28 janvier 2025 (Décision rendue publique par affichage le 20 février 2025).

Le praticien mis en cause a reconnu les faits, lesquels étaient objectivés par un constat d’huissier. Il a tenté de les justifier par une volonté d’éviter des difficultés économiques à sa consœur, qui selon lui ne facturait pas les actes pratiqués à leur juste valeur. De plus, le praticien mis en cause soutenait avoir été tacitement autorisé à accéder aux dossiers via le logiciel de gestion du cabinet commun aux 2 praticiens.

Il soutenait enfin que dans le cadre de la continuité des soins souhaité par le cabinet, il était amené à prendre en charge certains patients de sa consœur de même spécialité dans le cadre du planning d’astreinte mis en place.

La plaignante contestait lesdites explications au regard des modifications constatées par l’huissier de justice. En effet, les patients concernés n’avaient jamais été suivis par son confrère et les rectifications de cotations nécessitaient que le praticien soit rentré dans le dossier patient en violation du secret médical. Elle précisait avoir découvert les faits suite aux plaintes des patients concernés dont les facturations ne correspondait pas au devis initial.

En l’absence de conciliation, la plainte était transmise à la Chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des médecins, le Conseil de l’Ordre s’étant associé à la procédure.

La plainte reposait sur la violation directe des principes énoncés dans le Code de déontologie médicale. Il était ainsi reproché au praticien d’avoir accédé sans autorisation aux dossiers médicaux de patients, et de les avoir modifiés, portant ainsi atteinte aux articles R4127-4 (secret professionnel), R4127-31 (déconsidération de la profession) et L1110-4 du Code de la santé publique.

Dans une décision rendue en début d’année 2025, la Chambre Disciplinaire de première instance des Médecins de Nouvelle Aquitaine a sanctionné le praticien par une interdiction d’exercer la médecine pendant trois mois, dont deux mois avec sursis.

La Chambre rappelle que toute manipulation unilatérale d’un devis ou toute consultation non autorisée de données médicales constitue une faute disciplinaire majeure. Elle souligne la gravité des faits dénoncés et leur répétition ainsi que les conséquences négatives que ces modifications ont eu sur la relation entre le médecin plaignant et ses patients.

La juridiction a ainsi relevé les violations multiples du Code de déontologie médicale et a rappelé les principes suivants :

La juridiction souligne qu’appartenir à une même structure (type SCM ou SEL) ne dispense en rien de respecter les droits des patients ni la frontière professionnelle entre praticiens.

Le raisonnement est limpide : l’intention subjective (aider un confrère financièrement) ne peut justifier un manquement aux obligations fondamentales du médecin. La loyauté professionnelle, la transparence, et le respect des données médicales s’imposent en toutes circonstances.

Aurélie Viandier Lefèvre Avocat au Barreau de Bordeaux Avl Avocats [->avl@avl-avocats.fr]

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