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Le nouveau régime légal de l’instruction en famille : peut-on saisir le médiateur académique en cas de refus ? Par Salomé Mabilon, Avocate.
Parution : mercredi 29 janvier 2025
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Tous les ans, la médiatrice de l’Éducation Nationale et de l’Enseignement supérieur publie un rapport annuel concernant le bilan des saisines de cette institution. Le dernier rapport, publié en 2024 fait la synthèse de toutes les saisines des médiateurs académiques et propose des recommandations. Il consacre une annexe entière aux saisines liées aux réclamations concernant l’instruction en famille. Que dire de l’évolution de ces saisines ?

I. Un nouveau régime juridique pour l’instruction en famille en France.

L’instruction est obligatoire en France depuis la loi Ferry du 28 mars 1882. Le principe de l’obligation scolaire exige que tous les enfants âgés de trois ans à seize ans, présents sur le territoire français, bénéficient d’une instruction qui peut être suivie, au choix des personnes responsables de l’enfant soit dans un établissement d’enseignement scolaire public ou privé ; soit dans la famille.

La loi confortant le respect des principes de la République (loi n° 2021 – 1109 du 24 août 2021) a considérablement modifié le paysage existant en matière d’instruction en famille en substituant au principe de l’instruction obligatoire celui de la scolarisation obligatoire. Le Conseil d’État avait émis un avis 3 décembre 2020 précisant et justifiant la réforme en concluant que la restriction projetée alors est compatible avec la Constitution, dans la mesure où elle répond à des exigences de l’ordre public.

Si jusqu’à la rentrée 2022, l’instruction dans la famille était soumise à un simple régime de déclaration, la logique a été désormais inversée : au régime de la déclaration s’est substitué le régime de l’autorisation préalable d’instruction en famille [1]. Avec le passage de la déclaration préalable à l’autorisation, de nombreuses familles se sont vues alors refuser l’autorisation d’instruire leur enfant en famille.

Précisons à titre liminaire pour quels motifs peut-on solliciter l’instruction dans la famille ? L’instruction obligatoire pour tous les enfants de 3 ans à 16 ans est généralement dispensée dans un établissement scolaire (Public ou Privé). Un enfant peut aussi, sous conditions, recevoir cette instruction dans la famille.

Depuis la rentrée scolaire 2022 et conformément au Décret n° 2022-182 du 15 février 2022 relatif aux modalités de délivrance de l’autorisation d’instruction dans la famille, la possibilité de recevoir une instruction à domicile est soumise à l’obtention d’une autorisation si les parents veulent que leur enfant suive son instruction dans sa famille.
Cette autorisation est accordée selon les motifs suivants :

En cas de refus, la famille peut contester la décision (voir à ce sujet l’article "Instruction en famille : quels recours contre un refus d’autorisation ?")

II. L’évolution des saisines « instruction en famille » : une flambée des réclamations en 2023.

Selon le rapport de la Médiatrice en 2023, le nombre de saisines relatives à l’instruction en famille (IEF) a été multiplié par 10 par rapport à l’année précédente. Plus de la moitié de ces demandes concernent les situations de refus d’IEF par l’administration.
Dès 2020, la médiation avait été saisie par des associations et des collectifs de parents d’enfants, en instruction en famille après l’allocution du président de la République sur le thème de la lutte contre les séparatismes indiquant la limitation potentielle de l’instruction en famille aux impératifs de santé. L’appui de la médiation était alors souhaité pour que le droit à l’IEF ne se réduisent pas à cet impératif.

Une fois la loi promulguée, la médiation a reçu de nombreuses saisines, notamment de parents annonçant leur volonté de la désobéissance civile. En 2022, une trentaine de saisines relatives à l’IEF pouvaient être dénombrées, notamment concernant le 4e motif de dérogation introduit par la loi « l’existence d’une situation propre à l’enfant motivant le projet éducatif ».
En 2023, plus de 300 saisines ont pu être dénombrées.

Les principaux motifs de saisine des médiateurs par les familles sur l’année 2023 concerne les trois points suivants :

III. Les stratégies des familles selon le rapport de la Médiatrice.

Le rapport précise ces stratégies.

IV. Les pistes d’amélioration selon le rapport.

Le rapport propose quelques pistes de réflexion face à ces difficultés.

Nul doute que le prochain rapport 2024 fera état de demandes de saisine accrues concernant l’instruction en famille dont les modalités d’acceptation demeurent hétérogènes. La période dérogatoire -qui permettait aux parents pratiquant déjà régulièrement l’IEF de continuer pendant 2 ans- est en effet terminée. Les familles qui mettaient déjà en place l’IEF avant la promulgation de la loi bénéficiaient d’un régime dérogatoire permettant si les contrôles s’étaient avérés positifs de continuer sans avoir à demander l’autorisation annuelle pendant 2 ans.

Le rapport de la médiatrice se conclu par les observations du défenseur des droits.

Dans un rappel à la loi du 12 avril 2024 relatif aux modalités de mise en œuvre du régime d’autorisation de l’élève, le défenseur des droits a adressé des observations au ministère de l’Éducation nationale sur 3 points :

Salomé Mabilon, Avocate Barreau de Carpentras www.mabilonavocat.com

[1Nouvel article L131-2 du Code de l’éducation.

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