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[Point de vue] Garde partagée des enfants et grandes vacances : avoir l’esprit de médiation. Par Francine Summa, Avocate.
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Parution : samedi 10 juin 2023
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Les vacances d’été arrivent.
Cette période tant attendue peut se transformer en une épreuve très pénible pour les parents séparés, divorcés.
Les vacances sont une mise en situation de personnes qui sont provisoirement détachées de leurs rôles, de leurs places, de leur quotidien pour un moment de vie libérée : plus d’horaires, plus de vêtements imposés, soleil, air, espace.
Mais cet état euphorique risque de se heurter aux autres qui sont eux aussi dans la même exaltation ou au contraire n’ont pas changé et emmènent avec eux, leurs problèmes et leurs angoisses.
Cette situation se retrouve dans les relations de parents séparés où la coexistence relativement pacifique ou pacifiée peut exploser et redevenir frontale à l’occasion du partage des vacances d’été, juillet et août.
Quelques conseils pour gérer ou éviter les drames.
Il y a toujours un parent qui se sent lésé dans la répartition des mois d’été, soit par quinzaine, soit par mois, année paire, année impaire.
Dans ces situations, non exceptionnelles, les relations restent tendues, le ressentiment, la méfiance sont encore présents.
L’incompréhension surtout :
Il n’y aura pas d’accord pour modifier.
Donc, même si cela semble absurde à l’un des parents, c’est écrit. Il faut donc s’y conformer, avec bonne humeur sans maugréer contre l’autre parent. Les enfants ont des oreilles et aussi une perception. Ce sont leurs vacances.
Un autre écueil : partir loin, à l’étranger, Europe ou plus, USA,... Projet fabuleux, cher mais le programme du tour de l’agence de voyage, devant laquelle le père/la mère passe tous les jours en se rendant à son travail, ou du comité d’entreprise est bien tentant : les enfants sont ravis.
Oui mais. L’autre parent n’est pas de cet avis. C’est trop cher, lui/elle qui a du mal à joindre les deux bouts, c’est du gaspillage. Le rêve est fini, il a beau protester, c’est une occasion très intéressante, pour une fois. Niet.
La fin du rêve, les enfants sont très déçus.
Que faire ?
Partir quand même ?
Si le parent n’a pas les passeports des enfants, ce ne sera pas possible.
Faire une procédure devant la JAF ?
Il n’y a pas d’interdiction de sortie du territoire certes, et chaque parent a la maîtrise de sa période de vacances et de partir où bon lui semble, mais il faut en informer l’autre parent voir le lien suivant : www.demarches.intérieur.gouv.fr.
Une procédure sera mal vécue et est une source de dépenses, pas forcément satisfaisante.
En toute situation complexe, il faut rester de bonne foi, ce qui veut dire :
Ce n’est que pour quelques jours, qu’ils téléphoneront au moins deux fois par semaine.
Proposer une médiation familiale est la meilleure façon d’aborder ce problème où le parent qui refuse devra expliquer pourquoi il estime ce voyage contraire à l’intérêt des enfants. Il faudra lui démontrer que son angoisse n’est pas justifiée.
Ne pas oublier de lui rapporter des souvenirs.
Il ne faut donc pas partir sans avertir.
Avec les enfants, sur place, contrôler avec bienveillance mais fermeté la conduite des enfants.
Être le parent gardien de la santé et de la sécurité des enfants est une responsabilité plus sensible pour les couples séparés. Car l’autre parent - souvent la mère - n’est pas tranquille. Les enfants sont heureusement là et rassurent par leurs communications avec elle.
Il y aura des tensions sinon, ce qui est à éviter.
Il ne s’agit pas de téléphoner tous les jours, quoique des sms courts avec une photo soient appréciés.
La sécurité est essentielle, les accidents en période estivale sont trop nombreux : le soleil, la piscine, la plage, l’activité sportive. Il faut donc être vigilant sur ce que font les enfants.
Et si un accident se produit, il faut bien entendu, en informer l’autre parent et faire face ensemble aux soins médicaux. Il n’est pas nécessaire d’accabler le/la fautif/fautive, et pourtant c’est ce qui arrive.
Pour les adolescents, se pose le problème des copains qu’ils se font. Situation risquée si le père/la mère ne les connaît pas. Quitte à passer pour un/une rabat-joie, il faudra ne pas accorder de permission de sortie nocturne. En justifiant sa position de parent gardien, comptable de la sécurité.
L’explication ne sera peut-être pas comprise. Il faudra proposer une autre sortie ensemble pour redonner le sourire et garder l’esprit de vacances.
Cet exemple vient d’une situation gérée en médiation où l’adolescente était sortie à la fête n’ayant prévenu que sa petite sœur, laquelle inquiète de ne pas la voir à l’heure prévue, avait réveillé son père. Rentrée vers trois heures du matin, elle eût la surprise de voir son père, très en colère.
Cette scène fut l’occasion de faire, à la rentrée, une médiation demandée par les parents où l’adolescente participa également. Le débat : confiance envers leur fille/ responsabilité parentale a permis de voir les différences d’appréciation dans l’analyse de la situation et de mettre à plat les points non éclaircis.
En conclusion, les vacances d’été sont des moments privilégiés pour les parents séparés.
Mais ces séjours peuvent être aussi générateurs de problèmes de communication, de blocage et même de conflit.
Rester zen, garder l’esprit de médiation en toute hypothèse ne peut que permettre de passer de belles vacances.
Francine Summa, Avocate au barreau de ParisCet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion, plus d'infos dans nos mentions légales ( https://www.village-justice.com/articles/Mentions-legales,16300.html#droits ).