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Frais de scolarité : attention aux clauses abusives ! Par Camille Cimenta, Elève-Avocat.
Parution : jeudi 17 avril 2014
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Nombreux sont les étudiants qui sont scolarisés dans les écoles privées que ce soit dans le secondaire ou en post bac. En intégrant l’école, l’étudiant doit alors signer un contrat de scolarisation avec l’établissement et s’acquitter des frais de scolarités qui peuvent parfois être très importants. La plupart du temps, l’établissement permet alors de s’acquitter immédiatement de l’intégralité des droits d’inscription ou d’en échelonner le paiement. Toutefois, dans le second cas, il est très fréquent que l’établissement insère une clause contractuelle qui stipule que le prix total de la scolarité est un forfait intégralement acquis à l’école dès la signature du contrat. Ainsi, l’élève devra s’acquitter de la totalité de la somme même s’il arrête en cours d’année.

Ce type de clause a fait l’objet d’un contrôle attentif par la Cour de cassation.

Ainsi une telle clause est considérée comme abusive si elle ne prévoit pas une faculté de résiliation avec dispense de payer le forfait pour un cas de force majeure.

Mais depuis quelques mois, cela ne suffit plus. En effet, la Cour de cassation est venue préciser dans un arrêt du 13 décembre 2012 (pourvoi n°11-27766) que pour être licite, une telle clause devait non seulement prévoir une résiliation avec dispense de payer le prix en cas de force majeure, mais aussi pour un motif légitime et impérieux.

Dans cette affaire, il s’agissait d’une élève qui s’était inscrite dans une école privée mais qui avait arrêté en cours d’année car l’enseignement ne correspondait pas à ses attentes. Elle faisait notamment valoir que l’établissement n’avait pas satisfait à son obligation pré-contractuelle d’information quant à l’enseignement proposé. Elle voit sa demande rejetée par les juges du fond. En effet, ils font prévaloir les intérêts de l’établissement d’enseignement en jugeant que "l’école entend légitimement se prémunir contre les ruptures intempestives de contrat, qui pourraient compromettre, outre son devenir au plan financier, son organisation quant aux effectifs d’élèves en préjudiciant à ceux qui n’auraient pu obtenir une inscription du fait du quota atteint". Pour les juges du premier degré, l’élève ne rapportait pas suffisamment la preuve de l’absence d’information quant à l’enseignement proposé.

Le jugement est donc cassé par la Cour de cassation.

D’une part, elle juge au visa des articles L. 111-1 du Code de la consommation et 1315 du Code civil que " tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit, avant la conclusion du contrat, mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service et que celui qui se prétend libéré d’une obligation doit justifier le fait qui a produit l’extinction de celle-ci ". Elle rappelle donc que les établissements d’enseignement doivent faire connaitre aux élèves les caractéristiques de l’enseignement proposé. La charge de la preuve de cette obligation incombe aux établissement et non à l’élève.

D’autre part, elle juge au visa de l’article L. 132-1 du Code de la consommation qui prohibe les clauses abusives entre un professionnel et un non professionnel, que la clause qui ne prévoit aucune faculté de résiliation avec dispense du paiement de forfait intégral pour motif légitime et impérieux doit être considérée comme abusive. Ainsi elle considère comme motif légitime et impérieux le fait que l’enseignement ne correspond pas aux attentes de l’élève. Charge alors à l’établissement d’apporter la preuve qu’il avait bien informé l’élève sur l’enseignement proposé.

La Cour de cassation, contrairement au juge du fond, préfère favoriser les intérêts de l’élève sur ceux de l’établissement d’enseignement privé. Une solution qui doit être approuvée car la plus part du temps, il s’agit de frais de scolarité très élevés et il n’est pas rare que l’élève ait dû contracter un prêt pour pouvoir s’inscrire. En retenant les sommes, cela empêche l’élève de suivre un autre enseignement qui serait plus adapté à ses besoins. Enfin cette solution est cohérente avec la politique jurisprudentielle de la Cour de cassation qui continue d’élargir le champs des clauses abusives.

Camille Cimenta |Avocat Associé WeRise Avocats https://werise-avocats.fr/ contact@werise-avocats.fr

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