1) La mise en place progressive du CSE
L’article 9 de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 organise une mise en place progressive du CSE, en fonction de la situation de l’entreprise, avec comme date butoir le 31 décembre 2019.
Ainsi, au 1er janvier 2020, toutes les entreprises de plus de 11 salariés devront disposer d’un CSE. On doit distinguer 5 cas.
1.1) Cas n° 1 : La mise en place du CSE dans les entreprises dépourvues d’Institutions Représentatives du Personnel (IRP) au 23 septembre 2017
Conformément à l’article 9 de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017, les dispositions relatives au CSE s’appliquent à compter du 30 décembre 2017, date d’entrée en vigueur du décret n°2017-1819 du 29 décembre 2017 pris en application de l’ordonnance.
Aussi, les entreprises dépourvues d’IRP au 30 décembre 2017 sont tenues de mettre en place le CSE.
En pratique, de nombreuses entreprises, et principalement les petites entreprises dépourvues de DP, vont devoir rapidement lancer un processus préélectoral.
1.2) Cas n°2 : La mise en place du CSE dans les entreprises ayant conclu un protocole d’accord préélectoral avant le 23 septembre 2017
L’article 9, II, 1° de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 met en place des dispositions particulières pour les entreprises ayant conclu un protocole d’accord préélectoral avant le 23 septembre 2017.
Ainsi, l’ordonnance prévoit que les élections devront être organisées conformément au protocole et aux dispositions en vigueur avant la publication de l’ordonnance.
Des élections de DP ou du CE peuvent donc encore intervenir postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance et du décret pris pour son application.
Cependant, dans une telle hypothèse, le CSE devra être mis en place au plus tard à compter du 1er janvier 2020.
Un accord collectif, ou une décision de l’employeur, prise après consultation du CE ou à défaut des DP, pourra néanmoins fixer une date antérieure.
1.3) Cas n°3 : La mise en place du CSE lorsque les mandats des IRP arrivent à échéance entre le 23 septembre 2017 et le 31 décembre 2017
L’article 9, II, 2° de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 organise la prorogation des mandats arrivant à échéance entre le 23 septembre 2017 et le 31 décembre 2017.
Ainsi, les mandats sont automatiquement prorogés jusqu’au 31 décembre 2017 ; au-delà de cette date, un accord collectif, ou une décision de l’employeur prise après consultation du CE (ou à défaut des DP), peut proroger les mandats, au plus d’un an.
Cependant, la question se pose de savoir si cette prorogation « au plus d’un an », court à compter de l’expiration des mandats, ou à compter du 1er janvier 2018.
A défaut de précision, il semblerait que ce délai court à compter de l’expiration des mandats.
Néanmoins, le texte reste flou sur ce point de départ et les juridictions auront à trancher la question.
1.4) Cas n°4 : La mise en place du CSE lorsque les mandats des IRP arrivent à échéance entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018
L’article 9, II, 3° de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 prévoit enfin que, pour les mandats arrivant à expiration entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018, les entreprises pourront réduire ou proroger les mandats, au plus d’un an, par accord collectif ou décision de l’employeur prise après consultation du CE (ou à défaut des DP).
1.5) Cas n°5 : La mise en place du CSE lorsque les mandats expirent à partir du 1er janvier 2019
L’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 ne précise pas le sort réservé aux mandats arrivant à échéance entre le 1er janvier 2019 et le 31 décembre 2019.
A défaut de précision, le CSE devra être mis en place à la date de fin de mandat des anciennes institutions.
Si les mandats arrivent à échéance après le 31 décembre 2019, les mandats cesseront automatiquement.
Les entreprises doivent donc organiser des élections en 2019 afin de s’assurer que le CSE soit en place dès le 1er janvier 2020.
2) La survie des anciennes IRP dans l’attente de la mise en place du CSE
Dès lors que l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 instaure une mise en place progressive du CSE jusqu’au 1er janvier 2020, certaines IRP seront, dans l’attente, amener à survivre.
Aussi, un régime transitoire a dû être organisé afin de pallier d’éventuelles difficultés d’application des dispositions de l’ordonnance.
En l’occurrence, l’article 9, V de l’ordonnance n°2017-1386 prévoit que les dispositions relatives au CE, aux DP, au CHSCT ou encore à la DUP restent applicables pendant la durée des mandats en cours.
En outre, et dans l’attente de la mise en place du CSE, le CE, les DP ou le CHSCT sont compétents pour l’application des dispositions relevant de la compétence du CSE.
3) Les nouveaux calculs des seuils d’effectif déterminant l’obligation de mise en place du CSE
3.1) Un seuil d’effectif qui s’apprécie sur 12 mois consécutifs et qui est donc plus difficile à atteindre
L’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 a modifié les règles de calcul des seuils déclenchant l’obligation de mettre en place des IRP.
D’une part, le CSE devra désormais être mis en place dans les entreprises d’au moins 11 salariés (contre 50 salariés avant les ordonnances, pour le CE et le CHSCT).
D’autre part, le seuil d’effectif s’appréciera désormais sur 12 mois consécutifs, et non plus sur 12 mois, consécutifs ou non, au cours des 3 ans précédant l’élection.
Or, un tel calcul est, selon nous, regrettable dès lors qu’il entrainera nécessairement une diminution du nombre d’entreprises tenues de mettre en place des élections professionnelles, et donc réduira le nombre d’entreprise disposant de représentation du personnel.
Exemple :
Une entreprise emploie, durant 11 mois, 12 salariés.
Son effectif diminue ensuite, durant 10 mois, à 9 salariés.
Elle emploie ensuite, durant 11 mois, 13 salariés, puis de nouveau durant 6 mois 10 salariés.
Auparavant, l’entreprise ayant eu un effectif de 11 salariés et plus, durant 12 mois non consécutifs sur une période de 3 ans, elle était tenue d’organiser des élections de délégués du personnel.
Désormais, cette entreprise ne sera plus tenue d’organiser des élections, ne dépassant pas l’effectif de 11 salariés durant 12 mois consécutifs.
3.2) Un seuil d’effectif déterminant les attributions du CSE
Au-delà de la détermination de la mise en place ou non du CSE, les effectifs vont également être pris en considération pour déterminer les attributions du CSE.
Pour les entreprises comprises entre 11 et 49 salariés, le CSE disposera des pouvoirs des anciens délégués du personnel.
Pour les entreprises comptant 50 salariés et plus, le CSE exercera les anciennes attributions des DP, du CE et du CHSCT.
4) La délégation du personnel, représentants élus du personnel
Le CSE est composé par l’employeur, la délégation du personnel et un représentant syndical.
4.1) Composition de la délégation du personnel
Le nombre de membres de la délégation du personnel est fixé par l’article R.2314-1 du Code du travail, en fonction du nombre de salariés dans l’entreprise.
Le nombre de membres élus peut cependant être augmenté dans le cadre du protocole d’accord préélectoral.
En pratique, et en l’absence d’accord contraire, le nombre de représentants du personnel va se trouver considérablement réduit.
Prenons pour exemple une entreprise ayant un effectif de 700 salariés.
Avant les ordonnances, l’entreprise disposait de 20 représentants du personnel décomposés comme suit :
8 délégués du personnel ;
6 élus au CE ;
6 représentants au CHSCT.
Désormais, cette entreprise disposera de 14 membres de la délégation du personnel.
4.2) Les heures de délégation des membres de la délégation du personnel
L’article R.2314-1 du Code du travail fixe le nombre d’heures de délégation mensuel qui varie en fonction de l’effectif de l’entreprise.
Il est néanmoins possible d’augmenter le nombre d’heures de délégation par voie d’accord collectif, d’usage ou au sein du protocole d’accord préélectoral.
Le décret n°2017-1819 du 29 décembre 2017 a précisé les modalités selon lesquelles ces heures de délégation pourront être reportées sur une durée supérieure au mois, et dans la limite de 12 mois.
Ainsi, les membres de la délégation du personnel pourront cumuler leurs heures de délégation sans pour autant que cela n’aboutisse à faire bénéficier un membre de la délégation d’un nombre d’heures supérieur à une fois et demi son crédit d’heures dans le mois.
En outre, l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 met un terme au caractère individuel des heures de délégation qui avait été consacré par la jurisprudence pour les DP et les élus du CE.
En effet, la chambre criminelle (Crim. 20 juin 1985, n°84-90.910) suivie par la chambre sociale de la Cour de cassation (Soc. 20 octobre 1994, n°93-41.856) avaient considéré illicite le partage d’heures de délégation car revêtant un caractère strictement individuel.
Désormais, les membres de la délégation du personnel pourront répartir, entre eux et chaque mois les heures de délégation.
En outre, les heures de délégation pourront être réparties entre les membres titulaires et les membres suppléants de la délégation du personnel.
Cette répartition est cependant limitée et ne peut avoir pour effet de faire bénéficier un membre de la délégation de plus d’une fois et demi le crédit d’heures dont il dispose dans le mois.
Exemple :
La délégation du personnel du CSE d’une entreprise de 700 salariés doit bénéficier de 336 heures de délégation mensuelles, pour 14 membres (soit 24 heures par membre).
Au plus, un membre de la délégation pourra disposer de 36 heures sur un même mois, que ces heures aient été obtenues par cumul ou par mutualisation.
4.3) La durée des mandats des membres de la délégation du personnel
L’article L2314-33 du Code du travail instauré par l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 prévoit que la durée des mandats des membres de la délégation du personnel du CSE est fixée à 4 ans.
L’article L.2314-34 prévoit quant à lui la possibilité de fixer une durée de mandats entre 2 et 4 ans, par accord de branche, de groupe ou d’entreprise.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 7 décembre 2016 (n°15-60.227) concernant les mandats des DP et des élus du CE a précisé que l’accord dérogeant à la durée légale des mandats devait être conclu aux conditions de droit commun.
A notre sens, cet arrêt doit être transposé au CSE.
Dès lors, pour réduire la durée des mandats des membres du CSE, un accord devra être conclu entre l’employeur et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives ayant recueilli plus de 50% des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections professionnelles.
4.4) La limitation à 3 du nombre de mandats successifs des membres du CSE
L’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 instaure une nouveauté en limitant à 3 le nombre de mandats successifs des membres de la délégation du personnel, sauf pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Le protocole d’accord préélectoral pourra néanmoins en décidé autrement.
A cet égard, et au regard du texte de l’ordonnance et de l’article L.2314-33 du Code du travail, le protocole d’accord préélectoral pourra décider que les mandats seront renouvelables sans limitation.
Discussions en cours :
Bonjour,
Merci pour votre article très clair. Cependant, j’ai une question.
Dans votre article, vous écrivez : "Cas n°5 : La mise en place du CSE lorsque les mandats expirent à partir du 1er janvier 2019 (...)
"Si les mandats arrivent à échéance après le 31 décembre 2019, les mandats cesseront automatiquement.
Les entreprises doivent donc organiser des élections en 2019 afin de s’assurer que le CSE soit en place dès le 1er janvier 2020."
Soit l’hypothèse d’un mandat arrivant à échéance en juin 2020. peut-on considérer, par une interprétation souple, qu’il est possible (les mandats expirant par l’effet de la Loi, au 31/12/2019), d’en réduire la durée à un an maximum en application de l’article 9, II, 4° de l’Ordonnance, c’est-à-dire via un accord collectif ou une décision unilatérale ? De la sorte, cela permettrait d’organiser les élections à une période plus propice pour nombre de sociétés, par exemple avant les congés estivaux ou à la rentrée. Il s’agirait a priori d’une interprétation extensive au regard de l’Ordonnance et du question-réponses du Ministère du Travail sur le CSE. Savez vous ci ce point a fait l’objet d’un arbitrage au niveau national ? Après quelques recherches, nous avons remarqué que cette interprétation était évoquée par des auteurs . Ex : « La phase transitoire de mise en place d’un CSE », JCP / LA SEMAINE JURIDIQUE – ÉDITION SOCIALE N° 8-9. 27 FÉVRIER 2018 Arnaud Teissier, Docteur en droit http://lefilcapstan.fr/wp-content/uploads/2018/03/La_phase_transitoire_de_mise_en_place_CSE2.pdf
Et « Mise en place du CSE : « le sort des mandats 2019 », Article paru dans LEXPLICITE du 2/01/2019, Béatrice Taillardat Pietri, adjoint du Responsable de la doctrine sociales et Louis Paoli, avocat, droit social http://www.lexplicite.fr/mise-en-place-du-cse-le-sort-des-mandats-2019/
Selon vous, une élection anticipée est elle possible via réduction de mandat par DUE dans une entreprise de moins de 20 salariés ? Quels sont les risques pour l’employeur en terme de contestation ? Un DP actuel pourrait il invoqué un délit d’entrave ? Une sanction serait elle possible ?
Connaissez vous des doctrines récentes qui militent pour l’extension de la réduction des mandats même si les mandats terminent en théorie après 2020. Il va être très compliqué pour les entreprises d’organiser en pratique les élections entre le 15 et le 31/12/2020
Merci pour votre avis
Articles compréhensible
Bonjour,
dans les textes dans la Composition de la délégation élue au CSEC,
Pouvez vous me préciser que les membres suppléants élu pour le CSEC sont présent en réunion comme le défini l’article ci-dessous.
Article L2316-4
• Créé par Ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 - art. 1
Le comité social et économique central est composé :
1° De l’employeur ou de son représentant ;
2° D’un nombre égal de délégués titulaires et de suppléants, élus, pour chaque établissement, par le comité social et économique d’établissement parmi ses membres. Ce nombre est déterminé par décret en Conseil d’Etat. Le nombre total des membres ne peut excéder un maximum également déterminé par décret en Conseil d’Etat ;
3° Des personnes suivantes, à titre consultatif, lorsque les réunions du comité portent sur la santé, la sécurité et les conditions de travail : médecin du travail, agent de contrôle de l’inspection du travail mentionné à l’article L. 8112-1, agent des services de prévention de l’organisme de sécurité sociale et, le cas échéant, agent de l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics et responsable du service de sécurité et des conditions de travail ou, à défaut, agent chargé de la sécurité et des conditions de travail.
Ces personnes sont celles de l’établissement du siège de l’entreprise.
Seules les personnes mentionnées aux 1° et 2° ont voix délibérative.
NOTA :
Conformément à l’article 9 I de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017, les présentes dispositions entrent en vigueur à la date d’entrée en vigueur des décrets pris pour leur application, et au plus tard le 1er janvier 2018.
Dans votre article vous insinuez que le nombre de mandats successifs peut être modifié par accord dans toutes les entreprises.
Or, l’article L2314-33 limite cette disposition car les entreprises (ou établissements) de plus de 300 salariés ne pourront pas déroger à cette règle de 3 mandats maximum successifs.
Cher Monsieur,
Lors de la rédaction de l’article le 22 février 2018, l’article L.2314-33 du Code du travail, le nombre de mandats successifs était limité à 3, excepté pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Le protocole d’accord préélectoral pouvait cependant en disposer autrement et les entreprises de plus de 300 salariés pouvaient déroger aux trois mandats successifs.
Depuis le 1er avril 2018, l’article L.2314-33 du Code du travail a été modifié.
Désormais, la possibilité de déroger aux trois mandats successifs par le biais du protocole d’accord préélectoral n’est plus ouverte aux entreprises de plus de 300 salariés.
Bien à vous,
Frédéric CHHUM / Camille BONHOURE
Bonjour,
Vous évoquez la mise en place du CSE lorsque les mandats des IRP arrivent à échéance entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018 :
"L’article 9, II, 3° de l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 prévoit enfin que, pour les mandats arrivant à expiration entre le 1er janvier 2018 et le 31 décembre 2018, les entreprises pourront réduire ou proroger les mandats, au plus d’un an, par accord collectif ou décision de l’employeur prise après consultation du CE (ou à défaut des DP)."
Mais qu’advient-il si l’ (unique) délégué du personnel renonce à son mandat courant 2018 ?
L’employeur doit-il prévoir des élections partielles jusqu’à la fin théorique du mandat du DP démissionnaire ou doit il organiser la mise en place du CSE sans attendre ?
Merci
Si un mandat prend fin sans que l’employeur n’ai mis en en place une nouvelle election : le mandat est toujours valable ou pas.