Un accident ou une agression physique peuvent avoir des conséquences sur la capacité d’une personne à exercer son activité professionnelle.
C’est ainsi que les pertes de revenus subies par une victime sont indemnisées au titre de la perte de gains professionnels actuels et de la perte de gains professionnels futurs.
La perte de gains professionnels actuels indemnise « les pertes de gains liées à l’incapacité provisoire de travail (…) « elle » compense une invalidité temporaire spécifique qui concerne uniquement les répercussions du dommage sur la sphère professionnelle de la victime jusqu’à sa consolidation » [1].
La perte de gains professionnels actuels quant à elle vise à « indemniser la victime de la perte ou de la diminution de ses revenus consécutive à l’incapacité permanente à laquelle elle est désormais confrontée (…). Il s’agit d’indemniser une invalidité spécifique partielle ou totale qui entraîne une perte ou une diminution directe de ses revenus professionnels futurs à compter de la date de consolidation. Cette perte ou diminution des gains professionnels peut provenir soit de la perte de son emploi par la victime, soit à l’obligation pour celle-ci d’exercer un emploi à temps partiel à la suite du dommage consolidé » [2].
En somme, les pertes de gains professionnels actuels indemnisent la victime pour les pertes de revenus subies entre le jour du dommage et le jour de la consolidation alors que les pertes de gains professionnels futurs indemnisent la victime à compter du jour de la consolidation.
En cas d’atteinte physique grave ou d’une période de convalescence longue, le montant de la perte de gains professionnels peut être élevé, la question de l’incidence fiscale sur le calcul de ces préjudices est donc essentielle. Elle est au cœur de deux arrêts rendus récemment par la Cour de Cassation.
Dans un arrêt en date du 5 mars 2020 un chirurgien avait été victime d’un accident de la circulation [3].
Cet accident l’ayant empêché d’exercer son art, le médecin avait sollicité la condamnation de l’assureur du véhicule impliqué au paiement d’une certaine somme au titre de la perte de gains professionnels actuels.
Il avait été fait droit à la demande du chirurgien, seulement la Cour d’Appel avait évalué la perte de gains professionnels actuels en appliquant, à la perte d’honoraires qui auraient dû être perçus, un abattement de charges et impôts qui auraient dû être payés.
Dans un seconde affaire en date du 17 mars 2020, une personne avait été victime d’un accident de la circulation. Cet accident avait donné lieux à des poursuites pénales. Le tiers payeur, qui avait pris en charge les pertes de salaires de la victime, sollicitait la condamnation de l’auteur de l’accident au remboursement des sommes versées [4].
Le tiers payeurs avait pour partie obtenu gain de cause, cependant l’auteur de l’accident avait été condamné à verser une somme correspondant au montant des salaires après impôts.
Une question identique se posait à la Cour de Cassation dans ces deux affaires : l’indemnité perçue par la victime au titre des pertes de gains professionnels doit-elle être amputée des impôts qu’aurait dû payer la victime ?
Consacrant sa jurisprudence [5], la Cour de Cassation a répondu que les dispositions relatives aux impôts sur le revenu sont sans incidence sur les obligations du responsable d’un dommage corporel et sur le droit à réparation de la victime.
Ainsi lors du calcul de la perte de gains professionnels, les impôts qu’aurait eu à payer la victime ne doivent pas être déduits du montant des demandes.