Le logiciel "Keylogger" : dispositif de cybersurveillance excessivement intrusif jugé par la CNIL.
Le logiciel "Keylogger" est un dispositif de cybersurveillance, qui permet à l’employeur d’enregistrer avec un horodatage, toutes les frappes saisies sur le clavier du poste informatique mis à disposition par l’entreprise et les écrans consultés par les salariés sans qu’ils ne s’aperçoivent.
Dans un article en date du 20 mars 2013, la CNIL a précisé que le logiciel "Keylogger" permet une "surveillance constante et permanente sur l’activité professionnelle du salarié mais également sur leur activité personnelle effectuée à partir de leur poste informatique".
A l’issue de plaintes de salariés, la CNIL a estimé que le dispositif de cybersurveillance via le logiciel "Keylogger" mis en place à l’insu des salariés, porte une atteinte excessive à la vie privée des salariés.
La CNIL a ainsi mis en demeure la société de cesser le traitement des données avec le logiciel en cause.
En somme, ce logiciel ne peut être utilisé dans un contexte professionnel, à l’exception "d’impératifs forts de sécurité et d’une information spécifiques des personnes concernées". (site de la CNIL)
La cybersurveillance : les autres moyens accordés à l’employeur
le contrôle autorisé à l’employeur du disque dur de l’ordinateur du salarié, à son insu, afin de vérifier les téléchargements effectués par celui-ci.
Dans un arrêt de la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 9 juillet 2008, il a été jugé que les connexions établies par un salarié sur des sites internet pendant son temps de travail grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l’exécution de son travail sont présumées avoir un caractère professionnel de sorte que l’employeur peut les rechercher aux fins de les identifier, hors de sa présence. (Ch. soc. 9 juillet 2008, n°06-45800)
le contrôle autorisé à l’employeur de la liste des favoris.
La Cour de cassation, dans un autre arrêt, tout en rappelant que "les connexions établies par un salarié sur des sites internet pendant son temps de travail grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l’exécution de son travail sont présumées avoir un caractère professionnel, de sorte que l’employeur peut les rechercher aux fins de les identifier, hors de sa présence" précise que "l’inscription d’un site sur la liste des "favoris" de l’ordinateur ne lui conférant aucun caractère personnel". (Ch. soc. 9 fév. 2010 n°08-45253)
Utilisation excessive d’internet : licenciement pour faute grave
La Chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 26 février 2013 n°11-27372, a clairement affirmé qu’une utilisation abusive d’internet pour des raisons personnelles pendant les heures de travail est constitutive d’une faute grave, justifiant un licenciement.
En l’espèce, et comme le précise la Cour :" la salariée s’était connectée pendant son temps de travail à de très nombreuses reprises à de nombreux sites extraprofessionnels tels que des sites de voyage ou de tourisme, de comparaison de prix, de marques de prêt-à-porter, de sorties et événements régionaux ainsi qu’à des réseaux sociaux et à un site de magasine féminin et que ces connexions s’établissaient, exclusion faite de celles susceptibles de présenter un caractère professionnel, à plus de 10 000 sur la période du 15 au 28 décembre 2008 et du 8 janvier au 11 janvier 2009 (...) qu’une telle utilisation d’internet par celle-ci pendant son temps de travail présentait un caractère particulièrement abusif et constitutif d’une faute grave ". (Ch. soc. 26 fév. 2013 n°11-27372)
Les courriels professionnels et les courriels personnels
Selon une jurisprudence constante, les courriels adressés par le salarié grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par l’employeur sont présumés avoir un caractère professionnel. (Ch. soc. 16 mai 2013 n°12-11866 F-P+B)
Ainsi, l’employeur peut les ouvrir hors la présence du salarié, sauf si celui-ci les a identifiés comme étant personnels.
Cette solution a été étendue à la clé USB, appartenant au salarié, mais connectée à un outil informatique mis à disposition par l’employeur pour l’exécution du contrat de travail.
En effet, il a été jugé récemment que « dès lors qu’elle (la clé USB) est connectée à un outil informatique mis à la disposition du salarié par l’employeur pour l’exécution du contrat de travail, une clé USB est présumée utilisée à des fins professionnelles ».
Ainsi « l’employeur peut avoir accès aux fichiers non identifiés comme personnels qu’elle contient, hors la présence du salarié ».( Ch. soc. 12 fév. 2013 n° 11-28649).
Pour conclure, une interdiction générale et absolue de l’utilisation d’internet à des fins personnelles par le salarié, et ce, grâce à l’outil informatique mis à disposition par l’employeur, ne peut être envisageable. La CNIL préconise aux salariés, que l’utilisation à des fins personnelles ne doit pas dépasser une durée raisonnable et les sites visités ne doivent pas être contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs.